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24/03/2009 | FRANCE | N°08BX02192

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 24 mars 2009, 08BX02192


Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour le 18 août 2008 et en original le 19 août 2008 sous le numéro 08BX02192, présentée pour M. Farid X, demeurant au ... par Me Cottet, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2008 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a

fixé l'Algérie comme pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjo...

Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour le 18 août 2008 et en original le 19 août 2008 sous le numéro 08BX02192, présentée pour M. Farid X, demeurant au ... par Me Cottet, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2008 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Vienne de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1.000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-1647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2009,

le rapport de M. Verguet, premier conseiller ;

et les conclusions de Mme Viard, rapporteur public ;

Considérant que M. X, de nationalité algérienne, est entré en France le 6 décembre 2003 sous couvert d'un visa « voyage d'affaires » de 30 jours ; qu'il a sollicité le 29 novembre 2007 la délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'étranger malade ; que, par un arrêté en date du 4 avril 2008, le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination ; que M. X relève appel du jugement du 17 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de ces décisions et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

Sur l'aide juridictionnelle :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'admettre M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, devant le Tribunal administratif de Poitiers, M. X a invoqué « la violation de l'accord franco-algérien relatif au séjour des ressortissants algériens sur le territoire français », en faisant valoir qu'il doit suivre en France un traitement de longue durée qui n'est pas accessible dans son pays d'origine et dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences insurmontables ; que les premiers juges ont omis de répondre à ce moyen ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur le refus de titre de séjour :

Considérant que le secrétaire général de la préfecture de la Vienne, qui a signé l'arrêté contesté, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Vienne en date du 11 décembre 2007, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Vienne ; que le moyen tiré de ce que le refus de séjour aurait été signé par une autorité incompétente doit dès lors être écarté ;

Considérant que l'arrêté en date du 4 avril 2008 comporte l'énoncé des éléments de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision portant refus de titre de séjour et est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en mentionnant que l'état de santé du demandeur nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le médecin inspecteur de santé publique a suffisamment motivé son avis du 12 mars 2008 ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. X pouvait susciter des interrogations sur sa capacité à supporter un voyage, même s'il a conservé des séquelles au poignet de l'accident dont il a été victime en 2006 ; qu'ainsi, en se fondant sur un avis rendu par le médecin inspecteur de santé publique qui ne comportait pas d'indication sur la possibilité pour M. X de voyager sans risque vers son pays, la décision de refus de séjour n'a pas été prise suivant une procédure irrégulière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : « (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. » ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de l'avis du médecin inspecteur de la santé publique du 12 mars 2008, nonobstant les attestations médicales produites par le requérant, que le défaut de suivi médical dont l'intéressé a besoin pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'ainsi, en lui refusant un titre de séjour, le préfet de la Vienne n'a pas méconnu les dispositions précitées du 7ème alinéa de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Vienne qui, dans l'arrêté contesté, après avoir visé l'avis du médecin inspecteur de la santé publique, a énoncé les considérations de fait, médicales et personnelles, et de droit justifiant le refus opposé à M. X, se serait cru à tort lié par cet avis ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : « (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus » ; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

Considérant que, pour soutenir que le refus opposé par le préfet de la Vienne à sa demande de titre de séjour porterait atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, M. X fait valoir qu'il réside en France depuis l'année 2003 et qu'il s'est bien inséré dans la société française ; qu'il n'est toutefois pas établi que M. X, né en 1976, célibataire sans enfant, qui a vécu en Algérie jusqu'à son entrée sur le territoire national le 6 décembre 2003 et qui s'est irrégulièrement maintenu en France à l'expiration de son visa de court séjour, serait dépourvu de toute attache dans son pays d'origine ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment des conditions du séjour en France de l'intéressé, le refus opposé par le préfet de la Vienne à sa demande de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité, le préfet de la Vienne n'a méconnu ni les stipulations du 5ème alinéa de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination:

Considérant qu'il résulte des motifs précédemment exposés que les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination auraient été signés par une autorité incompétente doivent être écartés ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa.» ; que M. X, auquel le préfet de la Vienne a refusé de délivrer un titre de séjour, se trouvait dans le cas prévu par les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code précité où le préfet peut assortir sa décision de refus de titre de séjour, d'une obligation de quitter le territoire français, et fixer le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 20 novembre 2007, applicable à la date de la décision contestée : « (...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation (...) » ; que, par suite, M. X ne peut utilement soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une absence ou d'une insuffisance de motivation dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour est elle-même suffisamment motivée ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. X pouvait susciter des interrogations sur sa capacité à supporter un voyage ; qu'ainsi, en se fondant sur un avis rendu par le médecin inspecteur de santé publique qui ne comportait pas d'indication sur la possibilité pour M. X de voyager sans risque vers son pays, la décision obligeant M. X à quitter le territoire français n'a pas été prise suivant une procédure irrégulière ;

Considérant qu'il résulte des motifs précédemment exposés que le requérant n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2008 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : M. X est admis provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Poitiers en date du 17 juillet 2008 est annulé.

Article 3 : La demande de M. X devant le Tribunal administratif de Poitiers et le surplus des conclusions de sa requête devant la Cour sont rejetés ;

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08BX02192


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Hervé VERGUET
Rapporteur public ?: Mme VIARD
Avocat(s) : COTTET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 24/03/2009
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08BX02192
Numéro NOR : CETATEXT000020540884 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-03-24;08bx02192 ?
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