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09/02/2009 | FRANCE | N°08BX00073

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 09 février 2009, 08BX00073


Vu la requête, enregistrée au greffe le 8 janvier 2008 par télécopie et le 9 janvier 2008 en original, présentée pour M. Mustapha X demeurant chez M. Nejhi Y ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision implicite du préfet de la Haute-Vienne rejetant sa demande de titre de séjour du 30 mars 2007 et, d'autre part, de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 août 2007 portant refus de titre de séjour et obligatio

n de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annul...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 8 janvier 2008 par télécopie et le 9 janvier 2008 en original, présentée pour M. Mustapha X demeurant chez M. Nejhi Y ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision implicite du préfet de la Haute-Vienne rejetant sa demande de titre de séjour du 30 mars 2007 et, d'autre part, de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 août 2007 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer une carte de séjour mention « salarié » ou, à défaut, mention « vie privée et familiale », dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 794 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2009 :

- le rapport de Mme Aubert, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Dupuy, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, ressortissant marocain, demande l'annulation du jugement du 6 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision implicite du préfet de la Haute-Vienne refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié et, d'autre part, de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 août 2007 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur la légalité de la décision implicite de refus de titre de séjour :

Considérant que l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 août 2007 a été pris à la suite du courrier, reçu en préfecture le 3 août 2007, par lequel M. X a demandé au préfet de lui communiquer les motifs de la décision implicite de refus de sa demande de titre de séjour en qualité de salarié du 30 mars 2007 ; que cet arrêté mentionne les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour en cette qualité au requérant ; que le moyen tiré du refus du préfet de communiquer les motifs de sa décision implicite de rejet doit, dès lors, être écarté comme manquant en fait ;

Sur la légalité de l'arrêté du 10 août 2007 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la décision de refus de titre de séjour en qualité de salarié prise par le préfet le 10 août 2007 mentionne les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré du caractère insuffisant de sa motivation doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour « compétences et talents » sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois » ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : « Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention « salarié » éventuellement assortie de restrictions géographiques et professionnelles... Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence... » ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X n'a pas produit le visa de long séjour prévu par l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni présenté le contrat de travail visé par l'autorité compétente, exigé par les stipulations précitées de l'accord franco-marocain ; que, dans ces conditions, le préfet de la Haute Vienne, qui n'avait pas à faire viser par le directeur départemental du travail le contrat de travail produit par le requérant, a pu légalement refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru tenu de rejeter la demande de l'intéressé ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce qu'il aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il n'est pas établi que M. X, entré en France en 2003 et marié avec une ressortissante marocaine en situation irrégulière, soit dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans ; que, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France du requérant, et alors même que ce dernier serait entré régulièrement sur le territoire français, l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 août 2007 n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors et en tout état de cause, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I. L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa... » ; que la décision par laquelle l'autorité administrative oblige un étranger à quitter le territoire français en application des dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est au nombre des décisions qui doivent être motivées en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, toutefois, la motivation de cette mesure se confondant avec celle du refus ou du retrait de séjour dont elle découle nécessairement, elle n'implique pas de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi précitée, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire ont été rappelées ;

Considérant que la décision par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a obligé M. X à quitter le territoire français ne comporte aucun rappel des dispositions législatives de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir un refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que le visa dans l'arrêté du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assorti dans sa motivation de la référence à l'article L. 511-4 de ce code, qui énonce les catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet ni d'une obligation de quitter le territoire français, ni d'une reconduite à la frontière, ne saurait tenir lieu d'un tel rappel ; que, dans ces conditions, M. X est fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet n'est pas suffisamment motivée ; que l'illégalité dont elle est ainsi entachée entraîne son annulation, laquelle implique celle de la décision fixant le pays de renvoi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne en date du 10 août 2007 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et décision fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'il résulte du dernier alinéa de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'annulation par le présent arrêt de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. X, qui n'est pas la conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, n'implique aucune mesure d'exécution particulière autre que celle imposant la délivrance à l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son droit au séjour ; qu'en conséquence, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de statuer de nouveau sur le droit au séjour de M. X dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente de la décision procédant de ce réexamen une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. X ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Préguimbeau, avocat de M. X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner ce dernier à verser à l'avocat de M. X la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi contenues dans l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 août 2007 sont annulées.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 6 décembre 2007 est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Vienne de statuer de nouveau sur le droit au séjour de M. X dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente de la décision procédant de ce réexamen une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à Me Préguimbeau la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37, deuxième alinéa, de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice des sommes versées au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par M. X est rejeté.

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No 08BX00073


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 08BX00073
Date de la décision : 09/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : PREGUIMBEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-02-09;08bx00073 ?
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