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26/03/2013 | FRANCE | N°12BX02000

France | France, Cour administrative d'appel de, 5ème chambre (formation à 3), 26 mars 2013, 12BX02000


Vu la requête enregistrée le 27 juillet 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 30 juillet 2012, présentée par le préfet des Hautes-Pyrénées ;

Le préfet des Hautes-Pyrénées demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200695 du 26 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau, sur demande de M.A..., a annulé sa décision du 7 mars 2012 portant refus de séjour à l'intéressé, lui a enjoint de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour et de prendre une nouvelle décision dans délai de deux mois à compter de

la notification du jugement et l'a condamné à verser la somme de 1 000 euros au titre de l...

Vu la requête enregistrée le 27 juillet 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 30 juillet 2012, présentée par le préfet des Hautes-Pyrénées ;

Le préfet des Hautes-Pyrénées demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200695 du 26 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau, sur demande de M.A..., a annulé sa décision du 7 mars 2012 portant refus de séjour à l'intéressé, lui a enjoint de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour et de prendre une nouvelle décision dans délai de deux mois à compter de la notification du jugement et l'a condamné à verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 pris pour application du chapitre II du titre Ii de la loi n° 2000-321 du 1er avril 2000 relatif à l'accusé de réception des demandes présentées aux autorités administratives ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2013 :

- le rapport de M. Michel Dronneau, président de chambre ;

- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité algérienne, est entré en France le 6 septembre 2009 muni d'un visa étudiant ; qu'il a été mis en possession d'un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " étudiant ", renouvelé une fois ; que le 1er août 2011, il a sollicité un changement de statut et la délivrance d'un certificat de résident algérien mention " salarié " ; que par un premier jugement en date du 14 février 2012, le tribunal administratif de Pau a annulé la décision de refus de titre de séjour et enjoint au préfet de réexaminer sa demande de titre ; qu'à la suite de ce réexamen, par un arrêté du 7 mars 2012, le préfet des Hautes-Pyrénées a, une nouvelle fois, rejeté la demande de l'intéressé ; que le préfet interjette régulièrement appel du jugement en date du 26 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé ladite décision ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 7 b) de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française " ; que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; qu'il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l'exception de certaines dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers qui n'ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans ledit accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par ledit accord ; que les stipulations précitées de l'accord franco-algérien ne font pas obligation au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour mention " salarié ", de faire viser le contrat de travail de l'intéressé par les services du ministre chargé de l'emploi, en cas de défaut d'un tel visa ; que, dès lors, le préfet des Hautes-Pyrénées est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 7 mars 2012 pour ce motif ;

3. Considérant qu'il appartient à la cour, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A...à l'encontre de la décision attaquée ;

4. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 5 septembre 2011, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le jour même, le préfet des Hautes-Pyrénées a donné à Mme Demiguel, secrétaire générale de la préfecture, délégation à l'effet de signer tous actes, arrêtés et décisions relevant des attributions de l'État dans le département des Hautes-Pyrénées, à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions concernant le séjour et l'éloignement des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que Mme Demiguel n'aurait pas été compétente pour signer l'arrêté attaqué manque en fait ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en précisant notamment faire application des articles 6 et 7 b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et en mentionnant en particulier que M. A...n'avait pas produit de contrat visé par les services du ministre chargé de l'emploi et qu'il ne démontrait pas que sa cellule familiale était établie en France ; qu'elle est donc suffisamment motivée ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hautes-Pyrénées a procédé à l'examen particulier de la situation de droit et de fait du requérant, notamment au regard des stipulations de l'article 7 b) de l'accord franco algérien, l'absence d'avis émis par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi n'étant, contrairement à ce que soutient le requérant, pas de nature à révéler une quelconque carence en ce domaine ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence est entachée d'un vice de procédure, au motif que le préfet n'a pas transmis sa demande pour instruction au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (D.I.R.E.C.C.T.E.), le préfet n'ayant pas compétence pour viser le contrat de travail présenté par un ressortissant algérien dans le cadre d'une demande de titre séjour " salarié ", formée en application du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien et n'étant par ailleurs pas tenu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, de faire viser ledit contrat de travail par la DIRECCTE, en cas de défaut d'un tel visa ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...n'a pas joint à sa demande de titre de séjour le contrat visé par les services du ministre chargé de l'emploi tel qu'exigé par les stipulations précitées de l'article 7 b) de l'accord franco-algérien ; qu'à cet égard, M. A...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 2 du décret du 6 juin 2001 susvisé aux termes duquel : " lorsque la demande est incomplète, l'autorité administrative indique au demandeur les pièces manquantes dont la production est indispensable à l'instruction de la demande (....) ", dès lors qu'est en cause, en l'espèce, non l'absence d'une pièce mais celle d'un visa du contrat de travail que le préfet n'a pas compétence pour délivrer lui-même ; qu'il ne peut davantage se prévaloir des dispositions de l'article 16 A de la loi susvisée du 12 avril 2000, un tel visa ne pouvant être regardé comme une " information " ou une " donnée " au sens des dispositions de cet article, ou de celles de l'article 19-1 de la même loi, l'absence d'un tel visa ne constituant pas un " vice de forme ou de procédure " ; qu'il n'appartenait par ailleurs pas au préfet d'informer M. A...des exigences posées par l'article 7 b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

9. Considérant, en sixième lieu, que, dans la mesure où, comme il a été dit, M.A..., lors du dépôt de sa demande de changement de statut le 1er août 2011, ne justifiait pas d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un tel contrat aurait été communiqué ultérieurement à la préfecture, le préfet a pu légalement se fonder sur ce motif pour lui refuser la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " salarié " ; qu'à cet égard, la circonstance que le préfet des Hautes-Pyrénées se soit prononcé dès le 7 mars 2012 sur la demande de changement de statut du requérant, en application de l'injonction de réexamen faite par le tribunal administratif de Pau dans son jugement du 14 février 2012, n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée ; que le moyen tiré de l'erreur de droit au regard des stipulations de l'article 7 b) de l'accord franco-algérien doit, en conséquence, être écarté ;

10. Considérant, enfin, que si les stipulations de l'accord franco-algérien régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et à y exercer une activité professionnelle, elles ne font pas obstacle à ce que le préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, puisse apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; que M. A...fait valoir que s'il ne réside en France que depuis le 6 septembre 2009, il a été scolarisé sur le territoire national de huit à quatorze ans, que son père réside en France, ainsi que deux de ses frères, de nationalité française, qu'il aura des difficultés à retrouver un emploi en Algérie compte tenu des dissensions qui sont intervenues au sein de la fédération algérienne de Boxe lorsqu'il en était le directeur technique national et qu'il dispose d'un contrat de travail en France, en qualité d'éducateur sportif ; que ces circonstances ne sauraient suffire à justifier le bénéfice d'une mesure de régularisation d'autant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'emploi d'éducateur sportif dans une maison d'enfants proposé au requérant nécessiterait une expérience et des qualifications très spécifiques ; que par ailleurs, le requérant n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 40 ans et réside notamment sa femme ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en ne régularisant pas la situation de M.A..., le préfet aurait entaché son refus de titre de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français en litige, assortie d'un délai de trente jours pour en assurer l'exécution, serait dépourvue de base légale ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêté attaqué, et plus particulièrement de son dispositif, que le préfet des Hautes-Pyrénées a, par cette décision, rejeté la demande de changement de statut formée par le requérant, rejet dont découle l'obligation de quitter le territoire français du même jour en litige ;

13. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (... ) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les motifs de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confondent avec ceux du refus de titre de séjour dont elle découle ; que, comme il a été dit, l'arrêté attaqué du 7 mars 2012 contient l'exposé des motifs de droit et de fait sur lesquels s'est fondé le préfet des Hautes-Pyrénées pour rejeter la demande de changement de statut présentée par M. A...; que, par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans cet arrêté serait insuffisamment motivée ;

14. Considérant, enfin, que le préfet des Hautes-Pyrénées n'était pas tenu de motiver de manière particulière sa décision de ne pas accorder au requérant un délai supérieur à trente jours pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté attaqué, M. A... ne faisant pas état de circonstances qui auraient justifié que lui soit accordée une telle prolongation ; qu'à cet égard, s'il fait valoir qu'il est détenteur de biens meubles et de comptes bancaires, et qu'il est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, ces seuls éléments ne permettent pas de considérer qu'un délai d'une durée supérieure à trente jours aurait dû lui être accordé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que le préfet de Hautes-Pyrénées est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 7 mars 2012 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. A...la somme qu'il demande au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 26 juin 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.

Article 3 : Les conclusions d'appel présentées par M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 12BX02000


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-06-02 Étrangers. Emploi des étrangers. Mesures individuelles.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : MOURA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 26/03/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12BX02000
Numéro NOR : CETATEXT000027236045 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.de;arret;2013-03-26;12bx02000 ?
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