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27/12/2022 | FRANCE | N°444453

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 27 décembre 2022, 444453


Vu la procédure suivante :

La société parc éolien des Landes de Jugevent a demandé à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler l'arrêté du préfet du Morbihan du 29 mai 2019 lui refusant l'autorisation environnementale qu'elle a demandée afin d'exploiter un parc éolien sur le territoire de la commune de Brignac. Par un arrêt n° 19NT03272 du 17 juillet 2020, la cour administrative d'appel a rejeté sa requête.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 septembre et 16 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d

'Etat, la société parc éolien des Landes de Jugevent demande au Conseil d'Etat ...

Vu la procédure suivante :

La société parc éolien des Landes de Jugevent a demandé à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler l'arrêté du préfet du Morbihan du 29 mai 2019 lui refusant l'autorisation environnementale qu'elle a demandée afin d'exploiter un parc éolien sur le territoire de la commune de Brignac. Par un arrêt n° 19NT03272 du 17 juillet 2020, la cour administrative d'appel a rejeté sa requête.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 septembre et 16 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société parc éolien des Landes de Jugevent demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société parc éolien des Landes de Jugevent ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 décembre 2022, présentée par la société parc éolien des Landes de Jugevent ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 29 mai 2019, le préfet du Morbihan a refusé d'accorder à la société Parc éolien des Landes de Jugevent l'autorisation environnementale qu'elle demandait en vue d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent, composée de cinq aérogénérateurs d'une puissance maximale de 3,2 MW et de deux postes de livraison sur le territoire de la commune de Brignac (Morbihan). Par un arrêt du 17 juillet 2020, contre lequel la société parc éolien des Landes de Jugevent se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête formée contre cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, (...). ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1. / L'autorisation, dénommée autorisation environnementale, est délivrée dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier ". Aux termes de l'article L. 181-3 du même code : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. "

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, d'une part, l'arrêté litigieux du préfet du Morbihan fait état de ce que " les éléments du dossier ne justifient pas de manière significative les impacts de ce projet éolien dans un espace au relief peu accentué, déjà saturé, où sont déjà présents plusieurs autres parcs éoliens " et, d'autre part, que l'étude d'impact, produite par la société parc éolien des Landes de Jugevent au soutien de sa demande d'autorisation, indiquait, s'agissant de l'impact visuel sur les hameaux situés à proximité, que " les nombreux photomontages indiquent que depuis les hameaux proches, les vues sur le parc éolien sont souvent très directes et induisent des phénomènes d'écrasement et de rupture d'échelle avec les éléments du paysage existant ". Dès lors, en se fondant, pour juger que le préfet du Morbihan avait à bon droit estimé qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à la demande d'autorisation environnementale présentée par la société parc éolien des Landes de Jugevent, sur le motif tiré de l'effet d'écrasement suscité par le projet litigieux, la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas méconnu son office ni commis une erreur de droit.

4. En deuxième lieu, en procédant, dans un premier temps, à une analyse de l'intérêt du site, dont elle a estimé qu'il ne présentait aucune particularité remarquable, puis en se prononçant, dans un second temps, sur l'impact du projet litigieux au regard des effets de saturation et d'écrasement subis par le voisinage, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.

5. En troisième lieu, en relevant que le site d'implantation du projet litigieux était, d'une part, constitué de vastes plaines cultivées à ragosses, doucement vallonnées et ponctuellement boisées, entouré de quelques fermes et bourgs, sans présenter d'intérêt significatif et, d'autre part, que celui-ci offrait des vues dégagées sur l'horizon, ponctuellement contraintes par la présence de bosquets et de haies, la cour administrative d'appel, qui a, ce faisant, suffisamment motivé son arrêt, n'a pas commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits de l'espèce.

6. En quatrième lieu, en jugeant, après avoir caractérisé les effets d'écrasement et de saturation importants qu'auraient à subir les hameaux du périmètre rapproché, que le projet litigieux présentait des inconvénients excessifs pour la protection des paysages et la commodité du voisinage ne pouvant être prévenus par des prescriptions spéciales, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit, ni insuffisamment motivé son arrêt.

7. En cinquième lieu, en estimant que le projet litigieux altèrerait de manière excessive les paysages du périmètre rapproché au motif, d'une part, que la construction projetée dominerait nettement la végétation avoisinante et créerait un important effet d'écrasement depuis les hameaux de La Vieuville, Couëtfero, Kerminy et Folleville ainsi que, dans une moindre mesure, depuis celui de Ville Greffray et, d'autre part, qu'il y avait également lieu de prendre en considération, s'agissant des hameaux de La Vieuville, Couëtfero et Folleville, un effet de saturation du fait de la proximité des éoliennes avec ces derniers, de leur implantation désordonnée et de leur prégnance dans le paysage, la cour administrative d'appel, qui a porté une appréciation souveraine, n'a pas dénaturé les pièces du dossier.

8. Enfin, en estimant, s'agissant de l'impact du projet au sein du périmètre intermédiaire ou éloigné, que le faible relief rendrait les éoliennes fréquemment visibles depuis les points de vue lointains, que le parc projeté serait en situation de covisibilité avec certaines des quatre-vingt-sept éoliennes des onze parcs déjà construits dans un rayon de 20 km autour du site d'implantation et viendrait ainsi s'ajouter à un paysage éolien déjà chargé, contribuant ainsi à la saturation visuelle du paysage nonobstant l'atténuation de la fréquence et de l'étendue de la covisibilité avec les parcs existants du fait de la distance les séparant, du léger relief et de la présence d'espaces boisés, la cour administrative d'appel n'a pas davantage dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société parc éolien des Landes de Jugevent n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société parc éolien des Landes de Jugevent est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société parc éolien des Landes de Jugevent et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 1er décembre 2022 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; Mme Suzanne von Coester, conseillère d'Etat et M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 27 décembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Bachini

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 444453
Date de la décision : 27/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2022, n° 444453
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:444453.20221227
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