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13/12/2022 | FRANCE | N°463984

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 13 décembre 2022, 463984


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 18 novembre 2019 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, a rejeté son recours gracieux contre la décision du 14 octobre 2019 par laquelle ce préfet a refusé de procéder à l'échange de son permis de conduire algérien contre un titre de conduite français, et d'enjoindre au préfet de lui accorder cet échange. Par un jugement n° 2000663 du 17 mars 2022, la magistrate désignée par le pr

sident du tribunal administratif a annulé la décision attaquée et a enjoin...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 18 novembre 2019 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, a rejeté son recours gracieux contre la décision du 14 octobre 2019 par laquelle ce préfet a refusé de procéder à l'échange de son permis de conduire algérien contre un titre de conduite français, et d'enjoindre au préfet de lui accorder cet échange. Par un jugement n° 2000663 du 17 mars 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a annulé la décision attaquée et a enjoint au préfet de procéder à l'échange du permis de conduire de Mme A... dans un délai d'un mois.

Par un pourvoi, enregistré les 13 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de Mme A... devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les États n'appartenant ni à l'union européenne, ni à l'Espace économique européen ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme A... a demandé le 8 décembre 2017 l'échange de son permis de conduire algérien contre un titre de conduite français. Par une décision du 18 novembre 2019, le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, a rejeté le recours gracieux de l'intéressée contre sa décision du 14 octobre 2019 rejetant sa demande. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 17 mars 2022 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision attaquée et a enjoint au préfet de procéder à l'échange du permis de conduire de Mme A... dans un délai d'un mois.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-3 du code de la route : " Tout permis de conduire national, en cours de validité, délivré par un Etat ni membre de la Communauté européenne, ni partie à l'accord sur l'Espace économique européen, peut être reconnu en France jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an après l'acquisition de la résidence normale de son titulaire. Pendant ce délai, il peut être échangé contre le permis français, sans que son titulaire soit tenu de subir les examens prévus au premier alinéa de l'article R. 221-2. Les conditions de cette reconnaissance et de cet échange sont définies par arrêté du ministre chargé des transports, après avis du ministre de la justice, du ministre de l'intérieur et du ministre des affaires étrangères (...) ". Aux termes du III de l'article R. 221-1 du même code : " On entend par résidence normale le lieu où une personne demeure habituellement, c'est-à-dire pendant au moins 185 jours par année civile, en raison d'attaches personnelles et professionnelles (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 5 de l'arrêté ministériel du 12 janvier 2012 pris pour l'application de ces dispositions, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - Pour être échangé contre un titre français, tout permis de conduire délivré par un Etat n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen doit répondre aux conditions suivantes : (...) / C. - (...) Pour un ressortissant français ou de l'Union européenne, avoir été obtenu pendant une période au cours de laquelle l'intéressé avait sa résidence normale dans cet Etat (...). / II. - En outre, son titulaire doit : (...) / D. - Apporter la preuve de sa résidence normale au sens du III de l'article R. 221-1 du code de la route sur le territoire de l'Etat de délivrance, lors de l'obtention des droits à conduire, en fournissant tout document approprié présentant des garanties d'authenticité (...). / Entre autres documents permettant d'établir la réalité de cette résidence normale, il sera tenu compte, pour les Français, de la présentation d'un certificat d'inscription ou de radiation sur le registre des Français établis hors de France délivré par le consulat français territorialement compétent (...). / Pour les ressortissants français qui possèdent également la nationalité de l'Etat qui a délivré le permis de conduire présenté pour échange, la preuve de cette résidence normale, à défaut de pouvoir être apportée par les documents susmentionnés, sera établie par tout document suffisamment probant et présentant des garanties d'authenticité (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, pour demander l'annulation de la décision du 18 novembre 2019 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, a refusé l'échange de son permis de conduire algérien, délivré le 9 avril 2017, contre un permis de conduire français, Mme A..., qui possède la double nationalité française et algérienne, a fait valoir qu'elle avait résidé en Algérie de façon ininterrompue entre le 1er septembre 2014 au 20 février 2017, et qu'ainsi elle remplissait, lors de la délivrance du permis en cause, la condition de résidence normale posée par les dispositions précitées. À l'appui de cette affirmation, elle se bornait à produire, à l'appui de son recours gracieux adressé au préfet le 20 octobre 2019, une attestation de travail en Algérie pour la période du 1er septembre 2014 au 20 février 2017, établi par elle-même en qualité de gérante de l'entreprise TSCA, et des compte-rendu d'examens radiographiques réalisés dans ce pays les 16 mars et 3 avril 2017. En estimant que Mme A... apportait ainsi la preuve qu'elle avait obtenu son permis de conduire au cours d'une période de résidence habituelle en Algérie, alors qu'il ressortait d'autres pièces du dossier que Mme A... avait séjourné en France à plusieurs reprises au cours de cette période, la magistrate désignée par le président du tribunal a dénaturé les pièces du dossier qui lui étaient soumis.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. Il ressort de ce qui a été dit au point 4 que Mme A... n'apporte pas la preuve de ce qu'elle a obtenu son permis de conduire au cours d'une période de résidence habituelle en Algérie. Par suite, sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, doit être rejetée.

8. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 10 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 17 mars 2022 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par Mme A... devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 10 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme B... A....


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 463984
Date de la décision : 13/12/2022
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 13 déc. 2022, n° 463984
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Flavie Le Tallec
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:463984.20221213
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