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11/05/2022 | FRANCE | N°448191

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 11 mai 2022, 448191


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... Prince demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 48 du décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis et relatif à diverses mesures concernant le fonctionnement de la copropriété, ainsi que la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur la demande qu'il lui

a adressée, tendant à l'abrogation de cet article.

Vu les autres pièces...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... Prince demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 48 du décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis et relatif à diverses mesures concernant le fonctionnement de la copropriété, ainsi que la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur la demande qu'il lui a adressée, tendant à l'abrogation de cet article.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code des postes et des communications électroniques ;

- la loi n° 65-567 du 10 juillet 1965, modifiée notamment par la loi n°2014-366 du 24 mars 2014 ;

- le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ;

- le décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâties, créé par la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové : " Les notifications et mises en demeure, sous réserve de l'accord exprès des copropriétaires, sont valablement faites par voie électronique. "

2. Aux termes des articles 64-1 à 64-5 du décret du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans leur rédaction issue de l'article 48 du décret du 2 juillet 2020 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis et relatif à diverses mesures concernant le fonctionnement de la copropriété : " Art. 64-1.-Lorsque la copropriété est dotée d'un espace en ligne sécurisé, la notification des documents mentionnés à l'article 11 peut, sous réserve de l'accord exprès du copropriétaire, valablement résulter d'une mise à disposition dans un espace du site dont l'accès est réservé aux copropriétaires. (...) / Art. 64-2.-Pour l'application de l'article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965, toutes les notifications et mises en demeure peuvent également être faites soit par lettre recommandée électronique dans les conditions prévues par les articles R. 53 à R. 53-4 du code des postes et des communications électroniques, soit au moyen d'un procédé électronique mis en œuvre par l'intermédiaire d'un prestataire de services de confiance qualifié et garantissant l'intégrité des données, la sécurité, ainsi que la traçabilité des communications, dans les conditions prévues aux articles 64-5 à 64-9 (...) / Art. 64-3.-I.-L'accord exprès du copropriétaire mentionné à l'article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965 précise s'il porte sur les notifications, les mises en demeure ou les deux. Cet accord exprès peut ne porter que sur les modalités particulières de notification mentionnées à l'article 64-1. / Lorsqu'il est formulé lors de l'assemblée générale, cet accord est mentionné sur le procès-verbal d'assemblée générale. Il peut également être adressé à tout moment au syndic par tout moyen permettant d'établir avec certitude la date de sa réception. / II.- Lorsque les notifications et mises en demeure mentionnées au I sont faites au moyen du procédé électronique mis en œuvre par l'intermédiaire d'un prestataire de services de confiance qualifié mentionné à l'article 64-2, chaque copropriétaire concerné en est informé au moins quinze jours avant le premier envoi effectué par ce moyen, sans que cette formalité soit prescrite à peine d'irrégularité de l'acte. / Art. 64-4.-Le copropriétaire peut à tout moment retirer son accord exprès selon les mêmes formes que celles prévues au I de l'article 64-3. Si cette décision est formulée lors de l'assemblée générale, le syndic en fait mention sur le procès-verbal. / Cette décision prend effet le lendemain du huitième jour suivant la réception par le syndic de l'information adressée selon les modalités mentionnées au I de l'article 64-3 ".

3. M. Prince demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 48 du décret du 2 juillet 2020 et de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre sur la demande qu'il lui a adressée tendant à l'abrogation de cet article.

4. En premier lieu, les dispositions issues de l'article 48 du décret du 2 juillet 2020 contesté n'ont ni pour objet ni pour effet de rendre obligatoire le recours aux procédés dématérialisés qu'elles définissent dans les échanges avec les syndics chargés de la gestion d'immeubles, mais seulement de permettre, sous réserve de l'accord exprès du copropriétaire concerné, le recours à un tel mode de transmission. Par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte au principe de sécurité juridique, à l'économie de conventions légalement conclues, à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté d'entreprendre ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, aucun copropriétaire n'étant tenu par les dispositions contestées d'accepter le recours aux différents modes de notification électronique qu'elles prévoient, le requérant ne saurait utilement se prévaloir d'une méconnaissance du principe d'égalité entre les copropriétaires y ayant recours et ceux qui le refusent. De même, la circonstance que les possibilités de recourir à ces différents modes de notification électronique différeraient en pratique selon les ressources financières de la copropriété ou celles du copropriétaire ou selon l'accessibilité d'internet dans la zone géographique concernée n'est en tout état de cause pas de nature à caractériser une méconnaissance du principe d'égalité dès lors que nul copropriétaire ne peut être contraint d'avoir recours à ces outils.

6. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions réglementaires contestées, prises pour l'application de la loi, ne sont pas intervenues dans un domaine réservé à celle-ci par l'article 34 de la Constitution.

7. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter la requête de M. Prince.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. Prince est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... Prince et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée au Premier ministre, à la ministre de la transition écologique et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Délibéré à l'issue de la séance du 21 avril 2022 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Anne Egerszegi, conseillère d'Etat et Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 11 mai 2022.

Le président :

Signé : M. Thomas Andrieu

La rapporteure :

Signé : Mme Cécile Nissen

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida Ghulam


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 448191
Date de la décision : 11/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2022, n° 448191
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Nissen
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:448191.20220511
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