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14/04/2022 | FRANCE | N°448898

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 14 avril 2022, 448898


Vu les procédures suivantes :

La société Mefro Wheels France a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge partielle des cotisations foncières des entreprises, des taxes foncières sur les propriétés bâties et des taxes assimilées auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 dans les rôles de la commune de La Chapelle-Saint-Luc (Aube). Par deux jugements n° 1601339 et n° 1700227 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèveme

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Vu les procédures suivantes :

La société Mefro Wheels France a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge partielle des cotisations foncières des entreprises, des taxes foncières sur les propriétés bâties et des taxes assimilées auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 dans les rôles de la commune de La Chapelle-Saint-Luc (Aube). Par deux jugements n° 1601339 et n° 1700227 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements intervenus en cours d'instance au titre des impositions dues au titre de l'année 2014 et a rejeté le surplus des demandes.

Par un arrêt nos 18NC00108, 18NC00109, 18NC00110 du 9 mai 2019 et une ordonnance nos 18NC00109, 18NC00110 de sa présidente du 15 janvier 2021, la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions de deux pourvois de la société Mefro Wheels France tendant à l'annulation de ces deux jugements du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant qu'ils rejettent ses demandes relatives aux cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.

Par ces pourvois et des mémoires complémentaires, enregistrés les 15 janvier 2018, 9 mars 2018 et 31 juillet 2018 au greffe de cette cour, et par un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire enregistrés les 19 avril 2021 et 9 août 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Mefro Wheels France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les jugements du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n° 1601339 et n° 1700227 du 21 décembre 2017, en tant qu'ils rejettent une partie de ses demandes relatives aux cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société Mefro Wheels France ;

Considérant ce qui suit :

1. Les pourvois visés ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que la société Mefro Wheels France exploite à La Chapelle-Saint-Luc (Aube) un établissement industriel de fabrication de roues pour véhicules automobiles. Elle a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge partielle des cotisations foncières des entreprises, des taxes foncières sur les propriétés bâties et des taxes assimilées auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015. Elle se pourvoit en cassation contre les jugements du 21 décembre 2017 en tant qu'ils rejettent ses demandes relatives à la taxe foncière sur les propriétés bâties.

3. L'article 1380 du code général des impôts dispose : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". Selon l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; / 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication (...) ". Selon l'article 1382 du code général des impôts : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ". Aux termes du premier alinéa de l'article 1495 de ce code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Aux termes du II de l'article 324 B de l'annexe III au même code : " Pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux, équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ".

4. Pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles, mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.

5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus qu'en jugeant que les sols techniques, dès lors qu'ils constituent des ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation au sens du 1° de l'article 1381 du code général des impôts, ne peuvent être exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties sur le fondement du 11° de l'article 1382, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit.

6. En second lieu, en revanche, il résulte également de ce qui a été dit au point 4 qu'en jugeant que les outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels mentionnés au 11° de l'article 1382 du code général des impôts s'entendent de ceux qui participent directement à l'activité industrielle de l'établissement et sont dissociables des immeubles, et en rejetant pour ce motif les demandes de la société requérante relatives à la chaufferie et à l'adaptateur électrique, le tribunal administratif a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen soulevé sur ces points par ses pourvois, la société Mefro Wheels France est fondée à demander l'annulation des jugements attaqués en tant qu'ils se prononcent sur l'exclusion de la chaufferie et de l'adaptateur électrique de la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Mefro Wheels France, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 décembre 2017 sont annulés en tant qu'ils se prononcent sur l'exclusion de la chaufferie et de l'adaptateur électrique de la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Article 2 : Les affaires sont renvoyées, dans cette mesure, au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Article 3 : L'Etat versera à la société Mefro Wheels France une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des pourvois de la société Mefro Wheels France est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Mefro Wheels France et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 mars 2022 où siégeaient : M. Frédéric Aladjidi, président de chambre, présidant ; M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat et M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 14 avril 2022.

Le président :

Signé : M. Frédéric Aladjidi

Le rapporteur :

Signé : M. Matias de Sainte Lorette

La secrétaire :

Signé : Mme B... A...


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 448898
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 14 avr. 2022, n° 448898
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Matias de Sainte Lorette
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:448898.20220414
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