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12/04/2022 | FRANCE | N°460252

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 12 avril 2022, 460252


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 10 janvier et le 7 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1932 du 30 décembre 2021 relatif au tarif minimal applicable aux heures d'aide à domicile et à la dotation visant à garantir le fonctionnement intégré de l'aide et du soin au sein d'un service autonomie à domicile mentionnés à l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles ;

2°) d'enjoi

ndre au ministre des solidarités et de la santé :

- de déclarer que l'objet du serv...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 10 janvier et le 7 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2021-1932 du 30 décembre 2021 relatif au tarif minimal applicable aux heures d'aide à domicile et à la dotation visant à garantir le fonctionnement intégré de l'aide et du soin au sein d'un service autonomie à domicile mentionnés à l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles ;

2°) d'enjoindre au ministre des solidarités et de la santé :

- de déclarer que l'objet du service public pour la dépendance à domicile est d'assurer que tous les bénéficiaires aient rendez-vous avec un intervenant approprié, dès qu'ils le demandent ;

- de déclarer que les aides sociales aux personnes dépendantes à domicile sont dorénavant dissociées du financement des services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) ;

- d'indiquer aux bénéficiaires de ces services qu'ils ont le libre choix entre ces services, le recours à des plateformes, l'emploi de salariés ou le recours à des professionnels libéraux ;

- de réglementer le statut des professionnels libéraux et d'interdire aux SAAD de leur sous-traiter des missions ;

- de réglementer le droit des bénéficiaires de SAAD de demander un remplacement à partir de la 31ème minute après un début de rendez-vous prévu non démarré ;

- de réglementer la restitution des indus.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative, notamment son article R. 611-8 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Arnaud Skzryerbak, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. En application de l'article R. 314-130 du code de l'action sociale et des familles, les services dispensant des prestations d'aide et d'accompagnement à domicile qui relèvent du 6° ou du 7° du I de l'article L. 314-2-1 du même code, c'est-à-dire les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ainsi que ceux qui accueillent des personnes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert, font l'objet de tarifs horaires fixés par le président du conseil départemental de leur département d'implantation. Le financement de ces services et établissements peut également, par dérogation à ces dispositions, s'effectuer sous la forme d'une dotation globale de financement, par convention entre le département et le service concerné, en application de l'article R. 314-135 du même code. Le b du 6° de l'article 1er du décret du 30 décembre 2021 relatif au tarif minimal applicable aux heures d'aide à domicile et à la dotation visant à garantir le fonctionnement intégré de l'aide et du soin au sein d'un service autonomie à domicile mentionnés à l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles complète le I de l'article R. 314-135 du code de l'action sociale et des familles par l'alinéa suivant : " Pour les services relevant du 6° ou du 7° du I de l'article L. 312-1, le montant de cette dotation globale ne peut être inférieur au produit du total du nombre d'heures prévisionnel d'intervention par le montant minimal mentionné au I de l'article L. 314-2-1, le cas échéant après incorporation du report à nouveau d'un exercice antérieur retenu par le président du conseil départemental et avant soustraction du montant des produits d'exploitation directement perçus par le service. " M. B... doit être regardé comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir de cette disposition du décret du 30 décembre 2021.

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles : " Les modalités de fixation de la tarification des établissements et services mentionnés au I de l'article L. 312-1 sont déterminées par un décret en Conseil d'Etat ". Contrairement à ce que soutient M. B..., la disposition contestée a pour objet de modifier les conditions de tarification des services relevant du 6° et du 7° du I de cet article, afin de préciser les modalités de prise en compte du tarif minimal lorsque le financement de ces services s'effectue sous la forme d'une dotation globale, et non d'imposer aux personnes bénéficiant de l'aide sociale de faire appel à eux. Elle a été édictée par décret en Conseil d'Etat. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir qu'elle serait entachée d'incompétence.

3. En deuxième lieu, aucun texte ni aucun principe ne faisait obligation au Premier ministre, avant l'adoption de la disposition litigieuse, de recueillir l'avis des bénéficiaires de ces services, d'organiser des enquêtes publiques au sujet des plans d'aide non réalisés ou de " prendre en compte " les services de la plateforme développée par M. B..., dénommée YouTime, dont il n'établit pas qu'elle relèverait des dispositions du 6° ou du 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Dès lors, le moyen tiré de ce que la disposition attaquée serait pour ces motifs entachée de vices de forme ou de procédure ne peut qu'être écarté.

4. En troisième lieu, eu égard à l'objet déjà mentionné de la disposition contestée, qui, contrairement à ce que soutient M. B..., n'attribue aucun contrat de commande publique ni n'impose aux personnes bénéficiant de l'aide sociale de faire appel à l'un de ces services ou à un service unique, M. B... ne peut utilement soutenir qu'elle aurait dû être précédée d'un appel d'offres en application de l'article L. 3 du code de la commande publique ou prévoir des garanties destinées à permettre aux bénéficiaires de l'aide sociale de faire appel à l'intervenant qui leur convient le mieux.

5. En quatrième lieu, en prévoyant que le montant de la dotation globale minimale de financement du service ou de l'établissement est calculé en fonction du nombre d'heures prévisionnel d'intervention de ce service ou de cet établissement, le décret contesté s'est, comme il a été dit, borné à préciser les modalités de prise en compte du tarif minimal lorsque le financement des services s'effectue sous la forme d'une dotation globale, elle-même établie en vertu du deuxième alinéa du I de l'article R. 314-135 du code de l'action sociale et des familles, que le décret attaqué n'a pas modifié, et de l'article R. 314-106 du même code, selon les charges et produits d'exploitation prévus. Par suite, M. B... ne saurait utilement soutenir qu'il serait illégal en ce qu'il ne remédierait pas aux inconvénients de ce mode de financement, tenant selon lui à ce qu'il ne permet pas de garantir que le nombre d'heures prévisionnel d'intervention sera effectivement et efficacement réalisé.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la disposition qu'il attaque. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par suite, qu'être également rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. D... B....

Copie en sera adressée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré à l'issue de la séance du 11 mars 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 12 avril 2022.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

Le rapporteur :

Signé : M. Eric Buge

La secrétaire :

Signé : Mme A... C...


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 460252
Date de la décision : 12/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 avr. 2022, n° 460252
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Eric Buge
Rapporteur public ?: M. Arnaud Skzryerbak

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:460252.20220412
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