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09/11/2021 | FRANCE | N°441203

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 09 novembre 2021, 441203


Vu la procédure suivante :

La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun d'ordonner sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative la suspension de l'exécution de la décision du maire de la commune de Champigny-Sur-Marne du 19 septembre 2019 ayant fait opposition à cette déclaration préalable de travaux.

Par une ordonnance n° 1911226 du 8 janvier 2020, la juge des référés du tribunal administratif de Melun a suspendu la décision de non-opposition et enjoint à la commune de réexaminer la déclar

ation préalable.

La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribu...

Vu la procédure suivante :

La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun d'ordonner sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative la suspension de l'exécution de la décision du maire de la commune de Champigny-Sur-Marne du 19 septembre 2019 ayant fait opposition à cette déclaration préalable de travaux.

Par une ordonnance n° 1911226 du 8 janvier 2020, la juge des référés du tribunal administratif de Melun a suspendu la décision de non-opposition et enjoint à la commune de réexaminer la déclaration préalable.

La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun d'ordonner sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Champigny-Sur-Marne a retiré la décision implicite de non-opposition à la déclaration de travaux prise à la suite de cette injonction.

Par une ordonnance n° 2003156 du 5 mai 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 juin et 1er juillet 2020 et le 27 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Société Free mobile demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Champigny-sur-Marne la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Mathieu, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de la société Free Mobile, et à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la commune de Champigny-sur-Marne ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la société Free Mobile a déposé le 6 septembre 2019 une déclaration préalable de travaux en vue de l'implantation d'une station-relais de téléphonie mobile à Champigny-sur-Marne. Le maire de la commune de Champigny-sur-Marne a fait opposition à cette déclaration préalable de travaux et l'exécution de cette décision a été suspendue, le 8 janvier 2020, sur le fondement de l'article

L. 521-1 du code de justice administrative, par le juge des référés du tribunal administratif de Melun. Celui-ci a également enjoint à la commune de réexaminer la déclaration préalable et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification de son ordonnance.

2. La société Free Mobile se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du

5 mai 2020 par laquelle, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés a rejeté sa demande de suspension de la décision de retrait de la non-opposition à la déclaration préalable qu'aurait prise le maire de Champigny-sur-Marne.

Sur le pourvoi :

3. Pour rejeter la demande de suspension, le juge des référés a estimé qu'aucune décision de retrait d'une décision de non-opposition n'avait été prise dès lors qu'en l'absence, par la société Free, de confirmation de sa demande, aucune décision de

non-opposition n'avait pu naitre du silence du maire. En jugeant ainsi alors qu'à la suite de l'injonction prononcée par le juge, la société requérante avait écrit au maire pour lui demander de bien vouloir procéder à l'instruction de sa demande, le juge des référés a dénaturé les faits de l'espèce. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la société est fondée à demander l'annulation de son ordonnance.

Sur la demande de suspension :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par la commune de Champigny-sur-Marne :

4. L'article R. 423-23 du code de l'urbanisme dispose que : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / a) Un mois pour les déclarations préalables (...) " ; aux termes de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III

ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / a) Décision de

non-opposition à la déclaration préalable (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que par courrier du 13 janvier 2020 reçu le

15 en mairie, la société Free a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, demandé au maire de Champigny-sur-Marne de procéder à l'instruction de sa demande. Si, par un courrier du 12 février 2020, celui-ci a informé la requérante qu'il ne pouvait procéder à cette instruction, il n'est pas contesté que ce courrier a été reçu par la requérante le 19 février suivant, soit après l'expiration du délai d'un mois à compter de la confirmation de la demande au terme duquel une décision de

non-opposition tacite est née. Le maire doit donc être regardé comme ayant implicitement retiré sa non-opposition tacite à la déclaration de travaux. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de décision susceptible de recours doit être écartée.

En ce qui concerne les conclusions à fin de suspension :

6. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

" Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

7. En premier lieu, ainsi que l'a au demeurant affirmé dans son ordonnance du 8 janvier 2020 le juge des référés du tribunal administratif de Melun, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile et aux intérêts propres de la société requérante, qui a pris des engagements vis-à-vis de l'Etat quant à la couverture du territoire par son réseau, et à la circonstance, non utilement contestée, que le territoire de la commune de Champigny-sur-Marne n'est que partiellement couvert par le réseau de téléphonie mobile de la société requérante, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie.

8. En second lieu, est de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que en retirant la décision de non-opposition le maire a méconnu les dispositions de l'article 222 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite " loi Elan ", aux termes desquelles " (...) jusqu'au 31 décembre 2022, les décisions d'urbanisme autorisant ou ne s'opposant pas à l'implantation d'antennes de radiotéléphonie mobile avec leurs systèmes d'accroche et leurs locaux et installations techniques ne peuvent pas être retirées ". Est également de nature à faire naître un tel doute sérieux le moyen tiré de l'absence de compétence du directeur général adjoint de la commune pour signer une décision de retrait de la décision de non opposition.

9. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision attaquée.

10 Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune de Champigny-sur-- Marne le versement à la société Free Mobile de la somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions du même article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Free mobile qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Melun est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 12 février 2020 du maire de la commune de Champigny-sur-Marne est suspendue.

Article 3 : La commune de Champigny-sur-Marne versera à la société Free Mobile la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Champigny-sur-Marne présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Free Mobile et à la commune de Champigny-sur-Marne.

Délibéré à l'issue de la séance du 18 octobre 2021 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. F... I...,

M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. G... K..., Mme A... J... et

M. C... E..., M. D... L... et M. Jean-Yves Ollier conseillers d'Etat ; M. Bertrand Mathieu, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 9 novembre 2021.

Le Président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Bertrand Mathieu

La secrétaire :

Signé : Mme H... B...


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 09 nov. 2021, n° 441203
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bertrand Mathieu
Rapporteur public ?: M. Philippe Ranquet
Avocat(s) : SCP SPINOSI ; SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Date de la décision : 09/11/2021
Date de l'import : 12/11/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 441203
Numéro NOR : CETATEXT000044314709 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-11-09;441203 ?
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