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23/07/2021 | FRANCE | N°449274

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 23 juillet 2021, 449274


Vu la procédure suivante :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2019 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 1906115 du 5 mars 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20NT01051 du 1er décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par Mme C... contre ce jugement.


Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er févri...

Vu la procédure suivante :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2019 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement n° 1906115 du 5 mars 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20NT01051 du 1er décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par Mme C... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er février et 3 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 3 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, Mme C... demande au Conseil d'État, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de son pourvoi, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

- le règlement (UE) n° 610/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme B... D..., conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme C... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 juin 2021, présentée par Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, dans sa version issue du règlement (UE) n° 610/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties Contractantes peuvent être tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie Contractante, aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration est souscrite, au choix de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent, soit à l'entrée, soit dans un délai de trois jours ouvrables à compter de l'entrée ". Aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de la décision contestée : " L'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1 et L. 311-1 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire (...) ". Aux termes de l'article L. 531-2 du même code, en vigueur à la date de la décision contestée : " L'article L. 531-1 est applicable à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux dispositions des articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, ou 21, paragraphe 1 ou 2, de cette convention ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité ".

3. Mme C... soutient que les dispositions de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaissent les principes constitutionnels de proportionnalité et d'individualisation des peines.

4. Toutefois, la décision de remise aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne que peut prendre l'autorité administrative compétente à l'égard d'un étranger qui n'a pas souscrit à l'obligation de déclarer son entrée sur le territoire français, prévue par l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, constitue une mesure de police et non une sanction ayant le caractère d'une punition au sens de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Dès lors, Mme C... ne saurait utilement soutenir que l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaitrait les principes de proportionnalité et d'individualisation des peines qui résultent de l'article 8 de la Déclaration de 1789. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.

5. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée.

Sur les autres moyens :

6. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

7. Pour demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative de Nantes qu'elle attaque, Mme C... soutient que :

- l'arrêt est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il juge qu'elle ne justifie pas être entrée régulièrement sur le territoire français alors qu'elle y est entrée pendant la période de validité de son visa Schengen de type C délivré par les autorités françaises ;

- l'arrêté préfectoral litigieux a porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme C....

Article 2 : Le pourvoi de Mme C... n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... C....

Copie en sera adressée au Premier ministre, au ministre de l'intérieur et au Conseil constitutionnel.


Type d'affaire : Administrative

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 jui. 2021, n° 449274
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Carine Chevrier
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Formation : 6ème chambre
Date de la décision : 23/07/2021
Date de l'import : 27/07/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 449274
Numéro NOR : CETATEXT000043852122 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-07-23;449274 ?
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