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14/07/2021 | FRANCE | N°454527

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 14 juillet 2021, 454527


Vu la procédure suivante :

L'Association nationale des supporters a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 12 juillet 2021 réglementant le déplacement des supporters du Football Club de Nantes à Pornic lors de la rencontre du 14 juillet 2021 opposant le Football Club de Nantes à En avant Guingamp et, à titre subsidiaire, d'ordonner la suspension de l'exécutio

n de cet arrêté en tant qu'il s'applique hors du stade de Pornic.

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Vu la procédure suivante :

L'Association nationale des supporters a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 12 juillet 2021 réglementant le déplacement des supporters du Football Club de Nantes à Pornic lors de la rencontre du 14 juillet 2021 opposant le Football Club de Nantes à En avant Guingamp et, à titre subsidiaire, d'ordonner la suspension de l'exécution de cet arrêté en tant qu'il s'applique hors du stade de Pornic.

Par une ordonnance n° 2107785 du 13 juillet 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association nationale des supporters demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le juge des référés s'est fondé sur des éléments inopérants pour justifier d'interdire le fait de se prévaloir de la qualité de supporter nantais tels que le fait que quelques individus aient adoptés des comportements répréhensibles et inacceptables, qu'un individu ait menacé le président du club, que des supporters auraient entendu acquérir des billets sans passer par le club de Nantes et le fait que le terrain ne serait protégé que par une main-courante ;

- l'arrêté n'est ni nécessaire, ni proportionné dès lors que la rencontre se jouerait à huis-clos ;

- les supporters du club n'ont pas indiqué vouloir acheter des billets sans passer par l'intermédiaire du club, ce dernier étant le seul habilité à vendre des billets ;

- l'ordonnance litigieuse est entachée d'une contradiction de motif en indiquant à la fois que la rencontre se jouera à huis clos mais en présence des membres de la famille du président du club nantais et entérine une rupture d'égalité ;

- le fait que le match se tienne le 14 juillet 2021, jour de la fête nationale, ne permet pas de caractériser une circonstance de lieu particulière de nature à justifier l'interdiction opposée aux personnes se prévalant de la qualité de supporter du Football Club de Nantes ;

- l'arrêté ne délimite pas un périmètre précis d'interdiction ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'arrêté prive des citoyens de leurs libertés fondamentales à quelques jours de la rencontre prévue ;

- l'arrêté porte une atteinte grave à la liberté d'aller et venir, aux libertés d'association, de réunion et d'expression ;

- l'arrêté n'est justifié par aucune circonstance particulière, en l'absence de toute rivalité entre supporters des deux équipes, de tout élément propre à la ville de Pornic, les supporters nantais n'ayant jamais assisté à des rencontres à Pornic, en l'absence de toute précision sur la disponibilité limitée des forces mobiles ;

- la mesure n'est pas proportionnée, le préfet n'ayant mis en oeuvre aucune des mesures prévues dans la circulaire du 18 novembre 2019 et l'arrêté n'interdisant pas aux supporters de venir mais d'y soutenir leur équipe ;

- le périmètre de l'interdiction est imprécis, la notion d'abords du stade sur la commune de Pornic n'étant pas claire alors que le fait de méconnaître un tel arrêté est un délit pénal exposant à la garde-à-vue et à des peines d'emprisonnement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- le code du sport ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part l'Association nationale des supporters et, d'autre part, le ministre de l'intérieur ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 14 juillet 2021 à 10 heures 30 :

Me A..., avocate au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate de l'Association nationale des supporters ;

- le représentant de l'Association nationale des supporters ;

- le représentant du ministre de l'intérieur ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a prononcé la clôture de l'instruction.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".

2. Aux termes de l'article L. 332-16-2 du code du sport : " Le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, restreindre la liberté d'aller et de venir des personnes se prévalant de la qualité de supporter d'une équipe ou se comportant comme tel sur les lieux d'une manifestation sportive et dont la présence est susceptible d'occasionner des troubles graves pour l'ordre public. / L'arrêté énonce la durée, limitée dans le temps, de la mesure, les circonstances précises de fait et de lieu qui la motivent, ainsi que le territoire sur lequel elle s'applique. / Le fait pour les personnes concernées de ne pas se conformer à l'arrêté pris en application des deux premiers alinéas est puni de six mois d'emprisonnement et d'une amende de 30 000 euros. (...) ".

3. Sur le fondement des dispositions citées au point 2, le préfet de la Loire Atlantique a pris, le 12 juillet 2021, un arrêté portant interdiction, à toute personne se prévalant de la qualité de supporter du Football Club de Nantes d'accéder au stade Val Saint-Martin à Pornic et de circuler ou stationner sur la voie publique aux abords du stade sur la commune de Pornic à l'occasion de la rencontre amicale de football organisée le 14 juillet 2021 entre le Football Club de Nantes et En avant Guingamp. L'Association nationale des supporters a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, à titre principal, d'ordonner la suspension de l'exécution de cet arrêté et, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution cet arrêté en tant qu'il s'applique hors du stade de Pornic. Par une ordonnance du 13 juillet 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette requête. L'Association nationale des supporters relève appel de cette ordonnance.

4. Il ressort des indications fournies tant devant le juge des référés du tribunal administratif de Nantes que devant le Conseil d'Etat que de vives tensions se sont récemment manifestées entre certains supporters du Football Club de Nantes et l'équipe dirigeante de ce club avec l'organisation d'une expédition ayant entraîné l'agression de certains salariés du club. Il résulte également de l'audience tenue devant le juge des référés du tribunal administratif de Nantes qu'à la suite de la réunion de sécurité qui s'est tenue le 9 juillet 2021 pour ce match amical, il a été décidé, sur le fondement d'informations recueillies par les renseignements territoriaux, que ce match, auquel doivent assister des membres de la famille du président du club nantais, se tiendrait hors la présence du public compte tenu de la configuration du stade. Eu égard à la mobilisation particulière des forces de l'ordre le 14 juillet, jour de la fête nationale, qui est le jour choisi pour tenir cette rencontre, c'est à bon droit que le premier juge a jugé que les mesures prises par le préfet dans l'arrêté du 13 juillet 2021 pour assurer la sécurisation du stade et de ces abords, conformément au périmètre clairement énoncé dans cet arrêté, pendant ce match ne peuvent être regardées comme portant une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, à la liberté de réunion et à la liberté d'expression.

5. Il résulte de ce qui précède que la requête de l'association requérante doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de l'Association nationale des supporters est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Association nationale des supporters et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 14 jui. 2021, n° 454527
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Avocat(s) : GALY

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 14/07/2021
Date de l'import : 20/07/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 454527
Numéro NOR : CETATEXT000043799828 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-07-14;454527 ?
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