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09/06/2021 | FRANCE | N°425463

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 09 juin 2021, 425463


Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 425463 du 3 juillet 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'ordonnance n° 18LY02583 du 17 septembre 2018 du président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon et a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de Mme B... dirigées contre le jugement n° 1602067 du 3 mai 2018 du tribunal administratif de Dijon.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 25 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... soutient que le tribunal administratif de Dijon a c

ommis une erreur de qualification juridique des faits en jugeant que le n...

Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 425463 du 3 juillet 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'ordonnance n° 18LY02583 du 17 septembre 2018 du président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Lyon et a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de Mme B... dirigées contre le jugement n° 1602067 du 3 mai 2018 du tribunal administratif de Dijon.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 25 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... soutient que le tribunal administratif de Dijon a commis une erreur de qualification juridique des faits en jugeant que le nouveau contrat qui lui a été proposé n'emportait pas de modification substantielle de son précédent contrat sans justification par la collectivité, que son refus de voir son contrat renouvelé ne pouvait être considéré comme légitime et qu'elle ne pouvait, dès lors, être regardée comme ayant été involontairement privée d'emploi.

Le pourvoi a été communiqué à la commune de Montceau-les-Mines, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2020-741 du 16 juin 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Martin Guesdon, auditeur,

- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... B... a été engagée à partir du 27 août 2012 par la commune de Montceau-les-Mines pour exercer, à temps partiel puis à temps complet, par quatre contrats à durée déterminée successifs, les fonctions d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM). Avant l'expiration de son dernier contrat, Mme B... a présenté sa candidature au poste d'adjoint d'animation au cours du mois de juillet 2015. Par un courrier du 21 août 2015, le maire l'a informée que sa candidature avait été retenue et lui a proposé un contrat à durée déterminée, allant du 1er septembre 2015 au 31 août 2016, à temps non complet. Par un courrier du 2 septembre 2015, Mme B... a refusé cette proposition au motif que la durée hebdomadaire de travail prévue par ce nouveau contrat était de 31 heures. Par un courrier du 3 mai 2016, elle a demandé au maire le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Montceau-les-Mines a rejeté la demande de versement d'allocation d'aide au retour à l'emploi qu'elle lui avait adressée le 3 mai 2016 et d'enjoindre à cette autorité de la " restaurer rétroactivement dans ses droits " dans un délai de quinze jours ou, subsidiairement, de prendre une nouvelle décision dans le même délai. Par un jugement du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par une décision du 3 juillet 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance du 17 septembre 2018 par laquelle le président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement et a admis les conclusions de cassation dirigées contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 5422-1 du code du travail dans sa version alors applicable : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés d'emploi (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du même code dans sa version alors en vigueur : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : / (...) 2° Les agents non titulaires des collectivités territoriales (...) ". Pour l'application des articles L. 5421-1 et L. 5424-1 du code du travail, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de déterminer si les circonstances dans lesquelles un contrat de travail à durée déterminée n'a pas été renouvelé permettent de l'assimiler à une perte involontaire d'emploi. A ce titre, et ainsi que le prévoit désormais le décret n° 2020-741 du 16 juin 2020, l'agent qui refuse le renouvellement de son contrat de travail ne peut être regardé comme involontairement privé d'emploi, à moins que ce refus soit fondé sur un motif légitime, qui peut être lié notamment à des considérations d'ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle et sans justification par l'employeur.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le contrat à durée déterminée proposé à Mme B..., qui était, auparavant et en dernier lieu, employée pour une durée d'un an à temps complet et rémunérée 1 497,87 euros brut par mois, prévoyait une durée hebdomadaire de travail de 31 heures et une rémunération correspondant à un indice majoré supérieur de seulement trois points à l'indice dont elle bénéficiait précédemment. Dans ces conditions, alors qu'il n'est pas contesté que ces modifications représentaient une baisse de sa rémunération mensuelle de plus de 250 euros, le tribunal administratif de Dijon a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que la perte de rémunération découlant de la diminution du temps de travail hebdomadaire ne présentait pas de caractère substantiel et en en déduisant que Mme B... ne pouvait être regardée comme involontairement privée d'emploi. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, Mme B... est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que Mme B... doit être regardée comme involontairement privée d'emploi. Il s'ensuit qu'en l'absence de contestation des autres conditions auxquelles est subordonné l'octroi de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Montceau-les-Mines a rejeté sa demande de versement d'allocation d'aide au retour à l'emploi du 3 mai 2016. En revanche, l'état de l'instruction ne permettant pas de déterminer le montant exact des droits de Mme B..., il y a lieu de la renvoyer devant la commune pour que soient calculées et versées, dans un délai de trois mois, les allocations d'aide au retour à l'emploi qui lui sont dues.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Montceau-les-Mines au titre de l'ensemble de la procédure la somme de 5 000 euros à verser à Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 3 mai 2018 est annulé.

Article 2 : La décision implicite par laquelle le maire de Montceau-les-Mines a rejeté la demande de versement d'allocation d'aide au retour à l'emploi de Mme B... est annulée.

Article 3 : Mme B... est renvoyée devant la commune de Montceau-les-Mines pour qu'il soit procédé, dans les trois mois suivant la notification de la présente décision, au calcul et au versement des allocations d'aide au retour à l'emploi qui lui sont dues.

Article 4 : La commune de Montceau-les-Mines versera une somme de 5 000 euros à Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à la commune de Montceau-les-Mines.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 09 jui. 2021, n° 425463
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Martin Guesdon
Rapporteur public ?: M. Laurent Cytermann
Avocat(s) : SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 09/06/2021
Date de l'import : 26/05/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 425463
Numéro NOR : CETATEXT000043648143 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-06-09;425463 ?
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