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05/05/2021 | FRANCE | N°438223

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 05 mai 2021, 438223


Vu la procédure suivante :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 à 2010 ainsi que de l'amende qui leur a été infligée, sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts, au titre des années 2009 et 2010. Par un jugement n°s1607096, 1607163, 1607164 du 16 mai 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leurs demandes.

Par un arrêt n° 18VE0

2431 du 3 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Versailles, sur l'ap...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 à 2010 ainsi que de l'amende qui leur a été infligée, sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts, au titre des années 2009 et 2010. Par un jugement n°s1607096, 1607163, 1607164 du 16 mai 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leurs demandes.

Par un arrêt n° 18VE02431 du 3 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Versailles, sur l'appel de M. et Mme A..., a réduit le montant de l'amende qui leur a été infligée sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts à hauteur de 8 500 euros par année et a rejeté le surplus de leurs conclusions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février et 24 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de M. et Mme B... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2009 et 2010. Parallèlement, l'administration fiscale a exercé son droit de communication auprès du tribunal de grande instance de Pontoise pour consulter le dossier relatif aux détournements frauduleux d'allocations logement par les époux A.... Par une proposition de rectification en date du 13 novembre 2012, l'administration fiscale a assujetti M. et Mme A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2003 à 2010, ainsi qu'à des amendes fondées sur le IV de l'article 1736 du code général des impôts. M. et Mme A... se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 3 décembre 2019 de la cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'il a rejeté les conclusions de leur appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 16 mai 2018 qui avait rejeté leurs demandes contestant ces impositions supplémentaires et ces amendes.

2. En premier lieu, d'une part, l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ". D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 81 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées ". L'article L. 82 C du même livre, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que : " A l'occasion de toute instance devant les juridictions civiles ou criminelles, le ministère public peut communiquer les dossiers à l'administration des finances ".

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les rehaussements notifiés par l'administration fiscale aux contribuables par la proposition de rectification en date du 13 novembre 2012 procèdent, d'une part, des opérations de contrôle menées dans le cadre d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, diligenté sur le fondement de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, au titre des années 2009 et 2010, et d'autre part, au titre des années 2003 à 2008, de l'exercice par l'administration fiscale de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire sur le fondement de l'article L. 81 du même livre. Dès lors que les rehaussements notifiés au titre des années 2003 à 2008 trouvent leur origine exclusive dans les informations communiquées à l'administration fiscale par le ministère public et ne résultent pas de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des contribuables, la circonstance que l'avis de vérification adressé à ces derniers ne mentionnait que les années 2009 et 2010 est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition au titre des années 2003 à 2008. Par suite, alors même que l'ensemble des redressements a fait l'objet d'une proposition de rectification unique, c'est sans erreur de droit que la cour administrative d'appel a, par une appréciation souveraine des pièces du dossier exempte de dénaturation, jugé que le droit de communication exercé par l'administration fiscale concomitamment à l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des contribuables n'avait pas pour effet de soumettre les redressements résultant de la première procédure aux obligations prévues pour la seconde.

4. En deuxième lieu, en vertu de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration fiscale a, par une décision en date du 23 juin 2016, prononcé un dégrèvement partiel au profit de M. et Mme A... à concurrence des rectifications fondées sur des documents qui n'avaient pas été communiqués à ces derniers. Il s'ensuit qu'en jugeant que le défaut de communication de ces documents était sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition concernant les autres chefs de redressement demeurant en litige, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

6. D'autre part, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que les éléments contenus dans la procédure judiciaire transmis à l'administration fiscale dans le cadre de son droit de communication et qui ont été joints en annexe à la proposition de rectification notifiée aux contribuables le 13 novembre 2012, retranscrivent précisément les informations relatives aux opérations bancaires qui ont servi à fonder les redressements litigieux. En déduisant de ces éléments, qu'elle a souverainement appréciés, que l'administration avait communiqué aux contribuables l'ensemble des documents ayant fondé les impositions restant en litige, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

7. En troisième lieu, d'une part, le premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Conformément à l'article R*. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

8. D'autre part, aux termes du 7 de l'article 158 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : / 1° Aux titulaires de revenus passibles de l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles, réalisés par des contribuables soumis à un régime réel d'imposition : / a) Qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion ou association agréés définis aux articles 1649 quater C à 1649 quater H, à l'exclusion des membres d'un groupement ou d'une société mentionnés aux articles 8 à 8 quinquies et des conjoints exploitants agricoles de fonds séparés ou associés d'une même société ou groupement adhérant à l'un de ces organismes ; (...) ". En vertu du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale : " Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : / (...) f) ) De tous revenus qui entrent dans la catégorie des bénéfices industriels et, lorsque la plus-value est imposée conformément aux dispositions de l'article 244 bis B du code général des impôts, commerciaux, des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles au sens du même code, à l'exception de ceux qui sont assujettis à la contribution sur les revenus d'activité et de remplacement définie aux articles L. 136-1 à L. 136-5 ".

9. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la proposition de rectification en date du 13 novembre 2012 mentionne explicitement l'application du coefficient multiplicateur de 1,25, institué par le 7 de l'article 158 du code général des impôts, cité au point 8, aux bénéfices non commerciaux perçus par M. et Mme A... et soumis à l'impôt sur le revenu. Ces montants majorés, qui sont constitutifs de l'assiette soumise aux prélèvements sociaux en vertu de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale cité au point précédent, figurent explicitement, au titre de chaque année concernée, dans la partie de la proposition de rectification relative aux conséquences financières du contrôle. Dès lors que cette assiette majorée correspond à l'assiette prévue par la loi, la cour administrative d'appel a pu, sans erreur de droit, juger que la proposition de rectification adressée à M. et Mme A... ne devait comporter aucune mention supplémentaire relative à son application pour le calcul des prélèvements sociaux.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme A... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 438223
Date de la décision : 05/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 2021, n° 438223
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Christelle Thomas
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo
Avocat(s) : CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:438223.20210505
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