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05/05/2021 | FRANCE | N°434007

France | France, Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 05 mai 2021, 434007


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 22 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société DMP Corporation demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir la résolution des 2 et 3 juillet 2019 du Conseil supérieur du notariat relative à la sous-traitance des activités notariales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 ;

- le décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 ;

- le décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 ;

- l'arrêté du 22 juille

t 2014 portant approbation du règlement national et du règlement intercours du conseil supérieur du notariat ;
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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 22 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société DMP Corporation demande au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir la résolution des 2 et 3 juillet 2019 du Conseil supérieur du notariat relative à la sous-traitance des activités notariales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 ;

- le décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 ;

- le décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 ;

- l'arrêté du 22 juillet 2014 portant approbation du règlement national et du règlement intercours du conseil supérieur du notariat ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Olivier Fuchs, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. L'assemblée générale du Conseil supérieur du notariat a adopté, les 2 et 3 juillet 2019, une résolution relative à la sous-traitance des activités notariales, dont la société DMP Corporation demande l'annulation pour excès de pouvoir. Cette résolution prévoit que, " dans un premier temps ", les sous-traitants des notaires " sont tenus d'être labellisés ETIC et de souscrire à la charte éthique du numérique notarial au terme du processus de labellisation " puis que, " dans un second temps ", ces sous-traitants " devront (...) respecter les clauses de confidentialité et les autres prérequis qui seront proposés dans un cahier des charges ad hoc (...) qui participera à une procédure d'agrément des sous-traitants à mettre en place ", dispositif qui " ne pourra concerner " que certaines tâches recensées par un tableau figurant dans cette résolution.

2. La société requérante, dont l'activité consiste à mettre en relation des notaires et des sous-traitants sélectionnés selon des critères de qualification, justifie d'un intérêt suffisant pour demander l'annulation de la résolution qu'elle attaque. La fin de non-recevoir soulevée à ce titre par le conseil supérieur du notariat doit, par suite, être écartée.

3. " Aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, il y a " auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, un conseil supérieur du notariat ". L'article 3 de la même ordonnance précise que le conseil supérieur est un établissement d'utilité publique. En vertu de l'article 6 de la même ordonnance, il " représente l'ensemble de la profession auprès des pouvoirs publics (...) / Le conseil supérieur, siégeant en comité mixte, règle les questions d'ordre général concernant la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études (...) ". L'article 26 du décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 relatif aux créations, transferts et suppressions d'office de notaire, à la compétence d'instrumentation et à la résidence des notaires, à la garde et à la transmission des minutes et registres professionnels des notaires, habilite le Conseil supérieur du notariat à " établir, en ce qui concerne les usages de la profession à l'échelon national et les rapports des notaires établis dans des ressorts de cours d'appel différentes, un règlement qui est soumis à l'approbation du garde des sceaux, ministre de la justice ".

4. Par ailleurs, l'article 16 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires dispose que " le notaire qui établit un acte sur support électronique utilise un système de traitement et de transmission de l'information agréé par le Conseil supérieur du notariat et garantissant l'intégrité et la confidentialité du contenu de l'acte. / Les systèmes de communication d'informations mis en oeuvre par les notaires doivent être interopérables avec ceux des autres notaires et des organismes auxquels ils doivent transmettre des données ". L'article 28 du même décret dispose que le minutier central sur lequel doivent être enregistrés, pour leur conservation, les actes notariés dressés sur support électronique " est établi et contrôlé par le Conseil supérieur du notariat ". Enfin, l'article 6.7 du règlement national approuvé par arrêté du 22 juillet 2014 de la garde des sceaux, ministre de la justice, dispose que " le notaire se conforme aux téléprocédures telles qu'elles sont définies par la loi, les textes réglementaires et les conventions ou circulaires du Conseil supérieur du notariat ".

5. En premier lieu, la procédure dite de labellisation des sous-traitants qui manient des données électroniques, prescrite " dans un premier temps " par la résolution attaquée, n'est prévue par aucune disposition législative ou réglementaire en vigueur.

6. En deuxième lieu, si le Conseil supérieur du notariat fait valoir que la résolution attaquée se borne à annoncer l'entrée en vigueur possible de la procédure d'agrément des sous-traitants qui sera requise " dans un second temps ", cette résolution décrit le principe de cet agrément, demande au bureau d'en établir le cahier des charges et précise que les prestations susceptibles, par nature, d'être sous-traitées ne pourront l'être qu'à des sous-traitants bénéficiant dudit agrément. Ni les dispositions législatives et réglementaires générales citées au point 6, ni les missions particulières relatives aux systèmes électroniques et numériques confiées à ce conseil ne l'habilitaient à prévoir le principe d'un tel agrément ou à fixer son champ d'application.

7. En troisième lieu, s'il est soutenu que le tableau, qui distingue celles des prestations qui peuvent être confiées à des tiers par un contrat de sous-traitance de celles qui ne peuvent l'être, se borne à tirer les conséquences nécessaires des principes et règles fixés notamment par l'ordonnance du 2 novembre 1945, le décret du 26 novembre 1971 et le règlement national approuvé par arrêté du 22 juillet 2014 de la garde des sceaux, ministre de la justice, il ressort des pièces du dossier que certaines des catégories qu'il désigne ont, par leur généralité, pour effet d'interdire la sous-traitance de certains actes, sans que cette exclusion soit la conséquence nécessaire des dispositions législatives et réglementaires en vigueur.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le Conseil supérieur du notariat n'était pas compétent pour prendre, par la résolution attaquée, de telles dispositions normatives. La société DMP est, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, recevable et fondée à en demander l'annulation.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société DMP Corporation qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La résolution du Conseil supérieur du notariat des 2 et 3 juillet 2019 est annulée.

Article 2 : Les conclusions du Conseil supérieur du notariat présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société DMP Corporation et au Conseil supérieur du notariat.

Copie en sera adressée au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 434007
Date de la décision : 05/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 2021, n° 434007
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: M. Olivier Fuchs

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:434007.20210505
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