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27/04/2021 | FRANCE | N°434450

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 27 avril 2021, 434450


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal départemental des pensions de Paris d'annuler la décision du 22 juillet 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 16/00025 du 26 janvier 2018, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n°18/06650 du 28 juin 2019, la cour régionale des pensions de Paris a, sur appel de M. A..., annulé ce jugement, accordé à l'intéressé une pension d'invalidité au taux global de 40 % pour hypoacousie bilatérale av

ec perte de sélectivité (20 %), acouphènes bilatéraux (10 %) et vertiges (10 %)...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal départemental des pensions de Paris d'annuler la décision du 22 juillet 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 16/00025 du 26 janvier 2018, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n°18/06650 du 28 juin 2019, la cour régionale des pensions de Paris a, sur appel de M. A..., annulé ce jugement, accordé à l'intéressé une pension d'invalidité au taux global de 40 % pour hypoacousie bilatérale avec perte de sélectivité (20 %), acouphènes bilatéraux (10 %) et vertiges (10 %) et ordonné à l'Etat de lui verser les arrérages correspondants, assortis des intérêts moratoires au taux légal à compter du 12 juin 2014, date de la réception de sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 9 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François-René Burnod, auditeur,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de M. B... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a notamment demandé au ministre de la défense le 12 juin 2014 la reconnaissance d'une aggravation de son infirmité d'hypoacousie, de nature, selon lui, à ouvrir droit au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité. Par une décision du 22 juillet 2016, sa demande a été rejetée. Par un jugement du 26 janvier 2018, le tribunal départemental des pensions de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'octroi de la pension correspondante. Par un arrêt du 28 juin 2019, la cour régionale des pensions de Paris a annulé ce jugement et accordé à M. A... une pension militaire d'invalidité au taux global de 40% relative aux infirmités " hypoacousie bilatérale avec perte de sélectivité " (20 %), " acouphènes bilatéraux " (10 %) et " vertiges " (10 %). La ministre des armées se pourvoi en cassation contre ce jugement. Par la voie du pourvoi incident, M. A... demande l'annulation du même arrêt en ce qu'il ne lui a pas accordé une pension d'invalidité au taux global de 50 %, ainsi qu'il le demandait.

2. Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version alors applicable : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...) /3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples ". Aux termes de l'article L. 9 du même code: " (...) Le taux de la pension définitive ou temporaire est fixé, dans chaque grade, par référence au degré d'invalidité apprécié de 5 en 5 jusqu'à 100 %. / Quand l'invalidité est intermédiaire entre deux échelons, l'intéressé bénéficie du taux afférent à l'échelon supérieur (...) ". Aux termes de l'article L. 14 du même code: " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. "

3. Pour fixer le taux global d'invalidité de M. A... à 40 %, la cour régionale des pensions a additionné les taux d'invalidité de 20 % pour l'hypoacousie bilatérale avec perte de sélectivité, de 10 % pour les acouphènes bilatéraux et de 10 % pour les vertiges. En statuant ainsi, elle a méconnu les dispositions de l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre qui prévoient qu'en cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne d'invalidité absolue, d'une part, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et, pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante et, d'autre part, quand l'infirmité principale entraîne une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. Il en résulte que tant la ministre des armées, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, que M. A... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Par application des dispositions précitées, il résulte du rapport médical établi par le docteur Gaëtan Trotin et sans que puissent lui être opposées les recommandations du guide-barème, qui ne sont impératives en matière de pourcentages d'invalidité que dans le cas des amputations et exérèses d'organe, que le taux global de la pension de M. A... doit être déterminé en retenant les infirmités et taux suivants : 1°) hypoacousie bilatérale avec perte de sélectivité : 20 %, 2°) acouphènes bilatéraux : 10 % + 5 %, 3°) : vertiges : 10 % + 10 %. La prise en compte successive de ces infirmités, proportionnellement à la validité restante, aboutit à un taux d'invalidité de 45,6%. Ce taux d'invalidité étant intermédiaire entre deux échelons, M. A... a par conséquent droit à une pension d'invalidité au taux global de 50 %.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision du 22 juillet 2016 de la ministre des armées et à ce que lui soit accordée une pension militaire d'invalidité au taux de 50 %. Le versement des arrérages de cette pension sera assorti des intérêts au taux légal, à compter de la date de réception de sa demande, soit le 12 juin 2014

7. M. A... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. L'Etat devant être regardé, dans la présente instance, comme la partie perdante, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier le versement à cette SCP de la somme de 3 000 euros demandée à ce titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 28 juin 2019 de la cour régionale des pensions de Paris et le jugement du 26 janvier 2018 du tribunal départemental des pensions de Paris sont annulés.

Article 2 : La décision du 22 juillet 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande de M. A... tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité est annulée.

Article 3 : Il est attribué à M. A... une pension au taux global d'invalidité de 50% à compter du 12 juin 2014, date de sa demande de révision.

Article 4 : L'Etat versera à M. A... les intérêts au taux légal sur les arrérages de sa pension militaire d'invalidité à compter du 12 juin 2014, date de la réception de sa demande

Article 5: L'Etat versera à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh avocat de M. A..., la somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat

Article 6: La présente décision sera notifiée à M. B... A... et à la ministre des armées.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 434450
Date de la décision : 27/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 2021, n° 434450
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jonathan Bosredon
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, SEBAGH

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:434450.20210427
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