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07/04/2021 | FRANCE | N°446448

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 07 avril 2021, 446448


Vu la procédure suivante :

Madame Q... AC... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Lorry-lès-Metz (Moselle), d'annuler l'élection de M. AB... N... comme conseiller municipal et de déclarer ce dernier inéligible pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2003873 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces opérations électorales et rejeté les conclusions X... à ce que M. N.

.. soit déclaré inéligible.

Par une requête enregistrée le 13 novembre 2020 ...

Vu la procédure suivante :

Madame Q... AC... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Lorry-lès-Metz (Moselle), d'annuler l'élection de M. AB... N... comme conseiller municipal et de déclarer ce dernier inéligible pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2003873 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces opérations électorales et rejeté les conclusions X... à ce que M. N... soit déclaré inéligible.

Par une requête enregistrée le 13 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. AB... N..., Mme C... L..., M. Y... O..., Mme R... G..., M. AA... K..., Mme Z... M..., M. S... E..., M. AE... D..., Mme J... AD..., M. A... V..., Mme U... X..., Mme AF... F..., M. T... W..., Mme I... P... et M. B... H... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé les opérations électorales ;

2°) de rejeter la protestation de Mme AC... ;

3°) de mettre à la charge de Mme AC... et de ses colistiers la somme de 150 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue du second tour des opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 à Lorry-lès-Metz, commune de plus de 1 000 habitants, les dix-neuf sièges de conseillers municipaux et le siège de conseiller communautaire ont été pourvus. Quinze des sièges de conseillers municipaux et le siège de conseiller communautaire ont été attribués à des candidats de la liste " Lorry-lès-Metz - Préserver - Rassembler - Développer - Pour une commune verte et solidaire " conduite par M. N..., qui a obtenu 465 voix, soit 53,26 % des suffrages exprimés, tandis que les quatre autres sièges de conseillers municipaux ont été attribués à des candidats de la liste " Unis pour Lorry ", conduite par Mme AC..., qui a obtenu 408 voix, soit 46,74 % des suffrages exprimés. M. N... et autres font appel du jugement du 15 octobre 2020 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a, à la demande de Mme AC..., annulé ces opérations électorales.

2. Aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 49 du même code : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de : / 1° Distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents (...) ".

3. Il résulte de l'instruction qu'un tract de la liste " Lorry-lès-Metz - Préserver - Rassembler - Développer - Pour une commune verte et solidaire " a été déposé dans les boîtes aux lettres des habitants de la commune de Lorry-lès-Metz le vendredi 26 juin 2020 à partir de 19 heures. Ce tract, qui formulait notamment des accusations visant directement la candidate à la tête de la liste " Unis pour Lorry " et comportait des allégations mettant en cause sa probité, a introduit dans le débat électoral un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que la liste conduite par Mme AC... s'est trouvée dans l'impossibilité d'y répondre utilement avant le scrutin. Par suite, la diffusion de ce tract est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L. 48-2 du code électoral.

4. Toutefois, eu égard à l'importance de l'écart de voix séparant les deux listes, la diffusion du tract du 26 juin 2020 par la liste " Lorry-lès-Metz - Préserver - Rassembler - Développer - Pour une commune verte et solidaire " ne peut, aussi regrettable soit-elle, être regardée comme ayant été de nature à altérer la sincérité du scrutin.

5. Aucun autre grief X... à l'annulation de l'ensemble des opérations électorales n'ayant été soulevé par la protestataire devant le tribunal administratif, M. N... et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les opérations électorales organisées pour le second tour des élections municipales et communautaires de la commune de Lorry-lès-Metz.

6. Il appartient toutefois au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions subsidiaires présentées par Mme AC... devant le tribunal administratif et X... à l'annulation de la seule élection de M. N....

7. Aux termes de l'article L. 231 du code électoral : " (...) Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois : (...) 8° Les personnes exerçant, au sein (...) du conseil départemental, (...), (...) les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président, du président de l'assemblée ou du président du conseil exécutif (...) ". Il résulte de l'instruction que M. N..., bien qu'exerçant les fonctions de directeur-adjoint et de chef de cabinet du président du conseil départemental de la Moselle, ne disposait pas d'une délégation de signature, celle dont il avait été titulaire lui ayant été retirée plus de six mois avant la date de l'élection. Par suite, le grief tiré de son inéligibilité en application des dispositions de l'article L. 231 précitées doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme AC... X... à l'annulation de l'élection de M. N... doivent être rejetées.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. N... et des autres requérants qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a par ailleurs pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. N... et les autres requérants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 1er du jugement du 15 octobre 2020 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Lorry-lès-Metz sont validées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la protestation de Mme AC... est rejeté.

Article 4 : Les conclusions X... à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par M. N... et autres et par Mme AC... sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. AB... N..., représentant unique, pour l'ensemble des requérants ainsi qu'à Mme Q... AC... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

28-04-02-02-065 ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM. ÉLECTIONS MUNICIPALES. ÉLIGIBILITÉ. INÉLIGIBILITÉS. AGENTS DU CONSEIL GÉNÉRAL ET DU CONSEIL RÉGIONAL. - INÉLIGIBILITÉ, À RAISON DE LEURS FONCTIONS, DE CERTAINS AGENTS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, DES EPCI ET DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS LOCAUX DANS LES COMMUNES DU RESSORT OÙ ILS EXERCENT (8° DE L'ART. L. 231 DU CODE ÉLECTORAL) - EXCLUSION - DIRECTEUR, DIRECTEUR-ADJOINT OU CHEF DE CABINET SANS DÉLÉGATION DE SIGNATURE.

28-04-02-02-065 L'intéressé, bien qu'exerçant les fonctions de directeur-adjoint et de chef de cabinet du président du conseil départemental, ne disposait pas d'une délégation de signature, celle dont il avait été titulaire lui ayant été retirée plus de six mois avant la date de l'élection.,,,Par suite, le grief tiré de son inéligibilité en application de l'article L. 231 du code électoral doit être écarté.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 avr. 2021, n° 446448
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Gueudar Delahaye
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil

Origine de la décision
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Date de la décision : 07/04/2021
Date de l'import : 20/04/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 446448
Numéro NOR : CETATEXT000043351188 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-04-07;446448 ?
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