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02/04/2021 | FRANCE | N°433989

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 02 avril 2021, 433989


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'obligation de payer résultant d'une mise en demeure valant commandement de payer du 15 juin 2015 correspondant à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1996 et 1999, au recouvrement de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 1999 et aux pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1615990 du 13 mars 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18PA01611 du 5

juillet 2019, la cour administrative d'appel de Paris, faisant droit à l'app...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'obligation de payer résultant d'une mise en demeure valant commandement de payer du 15 juin 2015 correspondant à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1996 et 1999, au recouvrement de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 1999 et aux pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1615990 du 13 mars 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18PA01611 du 5 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Paris, faisant droit à l'appel de M. A..., a annulé ce jugement et fait droit à sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 27 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... était redevable de cotisations primitives et supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1996 et 1999 qui ont été mises en recouvrement les 30 avril et 31 juillet 2000 ainsi que le 31 juillet 2003. Pour obtenir le paiement de ces impositions, le comptable public a émis à l'encontre de M A... une première mise en demeure de payer le 21 juin 2012 puis a émis, le 15 juin 2015, un nouveau commandement de payer. Par un jugement du 13 mars 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A... tendant à la décharge de son obligation de payer. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 juillet 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris et prononcé la décharge de l'obligation de payer en litige.

2. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable ". Aux termes de l'article L. 281-1 du même livre dans sa rédaction applicable au litige : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites (...) ". Aux termes de l'article R. 281-1 du même livre dans sa rédaction applicable au litige : " Les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L. 281 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne solidaire. / Elles font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes les justifications utiles, en premier lieu, au chef du service du département ou de la région dans lesquels est effectuée la poursuite (...) ". Aux termes de l'article R. 281-3-1 du même livre dans sa rédaction applicable au litige : " La demande prévue à l'article R. 281-1 doit, sous peine d'irrecevabilité, être présentée, selon le cas, au directeur départemental des finances publiques, au responsable du service à compétence nationale ou au directeur régional des douanes et droits indirects dans un délai de deux mois à partir de la notification : / a) De l'acte de poursuite dont la régularité en la forme est contestée ; / b) De tout acte de poursuite si le motif invoqué porte sur l'obligation de payer ou le montant de la dette ; / c) Du premier acte de poursuite permettant d'invoquer tout autre motif. " Aux termes de l'article R. 281-4 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " Le chef de service se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande, dont il doit accuser réception. / Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le juge compétent tel qu'il est défini à l'article L. 281. Il dispose pour cela de deux mois à partir : / a) soit de la notification de la décision du chef de service ; / b) soit de l'expiration du délai de deux mois accordé au chef de service pour prendre sa décision. / La procédure ne peut, à peine d'irrecevabilité, être engagée avant ces dates. Elle doit être dirigée contre le comptable chargé du recouvrement. " Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article R. 281-5 du même livre : " Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires. "

3. Lorsque le redevable d'une imposition se prévaut de la prescription de l'action en recouvrement, il soulève une contestation qui ne porte pas sur l'obligation de payer mais qui a trait à l'exigibilité de l'impôt. La prescription de l'action en recouvrement doit, en application du c de l'article R. 281-3-1 du livre des procédures fiscales, être invoquée à l'appui de la réclamation préalable adressée à l'administration compétente dans un délai de deux mois à partir de la notification du premier acte de poursuite permettant de s'en prévaloir. Lorsqu'une réclamation a été présentée à l'administration à l'encontre de ce premier acte de poursuite sans invoquer un tel motif, le contribuable, s'il conteste devant le juge le rejet de cette réclamation, peut néanmoins invoquer devant ce juge, eu égard au premier alinéa de l'article R. 281-5 du même livre, la prescription de l'action en recouvrement à la condition que celle-ci n'implique l'appréciation d'aucune autre pièce justificative ou circonstance de fait que celles qu'il a produites ou exposées dans sa réclamation.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que postérieurement à une première mise en demeure de payer qui a été, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, irrégulièrement notifiée, M. A... a été rendu destinataire de deux avis à tiers détenteurs en date du 24 juillet 2012 qu'il a contestés sans, toutefois, invoquer, comme il l'aurait pu, la prescription de l'action en recouvrement. Par suite, en jugeant que M. A... était fondé à invoquer cette prescription à l'encontre du commandement de payer litigieux ultérieur, en date du 15 juin 2015, alors que ce moyen était irrecevable dès lors qu'il n'aurait pu être soulevé qu'à l'appui de la contestation du premier acte de poursuite que constituaient les avis à tiers détenteur, la cour a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 5 juillet 2019 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. B... A....


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-02-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. QUESTIONS COMMUNES. - CONTENTIEUX DU RECOUVREMENT - RECEVABILITÉ [RJ1] - 1) CONCLUSIONS FONDÉES SUR LA PRESCRIPTION DE L'ACTION EN RECOUVREMENT - A) NATURE - CONTESTATION AYANT TRAIT À L'EXIGIBILITÉ DE L'IMPÔT - B) CONSÉQUENCE - CONDITION - PRÉSENTATION DANS LES DEUX MOIS DU PREMIER ACTE DE POURSUITE PERMETTANT DE S'EN PRÉVALOIR (C DE L'ART. R. 281-3-1 DU LPF) - 2) MOYEN TIRÉ DE LA PRESCRIPTION DE L'ACTION EN RECOUVREMENT - CONDITIONS.

19-02-01 1) a) Lorsque le redevable d'une imposition se prévaut de la prescription de l'action en recouvrement, il soulève une contestation qui ne porte pas sur l'obligation de payer mais qui a trait à l'exigibilité de l'impôt.,,,b) La prescription de l'action en recouvrement doit, en application du c de l'article R. 281-3-1 du livre des procédures fiscales (LPF), être invoquée à l'appui de la réclamation préalable adressée à l'administration compétente dans un délai de deux mois à partir de la notification du premier acte de poursuite permettant de s'en prévaloir.,,,2) Lorsqu'une réclamation a été présentée à l'administration à l'encontre de ce premier acte de poursuite sans invoquer un tel motif, le contribuable, s'il conteste devant le juge le rejet de cette réclamation, peut néanmoins invoquer devant ce juge, eu égard au premier alinéa de l'article R. 281-5 du même livre, la prescription de l'action en recouvrement à la condition que celle-ci n'implique l'appréciation d'aucune autre pièce justificative ou circonstance de fait que celles qu'il a produites ou exposées dans sa réclamation.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 17 mars 1999,,, n° 163929, p. 71 ;

CE, 28 mars 2007, Société Hallumeca, n°s 289613 289614, T. pp. 786-789.


Publications
Proposition de citation: CE, 02 avr. 2021, n° 433989
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Ferreira
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP SPINOSI

Origine de la décision
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Date de la décision : 02/04/2021
Date de l'import : 28/07/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 433989
Numéro NOR : CETATEXT000043328504 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-04-02;433989 ?
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