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24/02/2021 | FRANCE | N°428745

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 24 février 2021, 428745


Vu la procédure suivante :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007, 2008, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1407717 du 1er mars 2017, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007, ainsi que des p

énalités correspondantes, et rejeté le surplus de sa demande.

Par un a...

Vu la procédure suivante :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007, 2008, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1407717 du 1er mars 2017, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007, ainsi que des pénalités correspondantes, et rejeté le surplus de sa demande.

Par un arrêt n° 17VE01135 du 10 janvier 2019, la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement intervenu en cours d'instance, a rejeté le surplus de l'appel formé par M. C... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 11 mars et 11 juin 2019 et le 10 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme B... A..., rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boulloche, avocat de M. C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de la vérification de la comptabilité de la société CSD dont il est le gérant, M. C... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces, portant sur ses revenus des années 2007 et 2010, et d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, portant sur ses revenus des années 2008 et 2009, à l'issue desquels il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de ces quatre années. Il se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 10 janvier 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir prononcé un non-lieu à hauteur des sommes dégrevées en cours d'instance, a rejeté le surplus de ses conclusions d'appel contre le jugement du 1er mars 2017 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il avait rejeté le surplus des conclusions de sa demande en décharge contre les impositions restant en litige.

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de considérer que, sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire. Par suite, lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance de l'administration fiscale, celle-ci est en principe tenue d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de la procédure d'imposition. Lorsque le mandataire du contribuable a la qualité d'avocat et que celui-ci déclare que son client a élu domicile à son cabinet, l'administration fiscale est tenue de lui adresser les actes de la procédure d'imposition sans qu'il soit besoin d'exiger la production d'un mandat exprès.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... a produit devant la cour une lettre, reçue par l'administration fiscale le 27 décembre 2010, par laquelle son avocat indiquait que le requérant élisait domicile à son cabinet et lui donnait " mandat pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure le concernant, et y répondre " en demandant à l'administration de lui adresser toute correspondance qui serait destinée au contribuable " dans le cadre de toutes les conséquences personnelles attachées à la vérification de comptabilité de la société CSD pour les années 2007 à 2010 ". Pour écarter le moyen tiré de ce que l'administration aurait entaché la procédure d'irrégularité faute d'avoir notifié les propositions de rectification au mandataire du contribuable, la cour a relevé que ce mandat avait été adressé à l'administration avant que ne lui soient notifiés, d'une part, l'avis d'examen de situation fiscale personnelle du 18 janvier 2011 portant sur ses revenus des années 2008 et 2009 et, d'autre part, la proposition de rectification du 14 octobre 2011 résultant du contrôle sur pièces opéré sur ses revenus de l'année 2010. La cour en a déduit que le mandat donné par M. C... à son conseil n'était pas opposable à l'administration parce qu'il avait été adressé antérieurement à l'engagement des procédures d'imposition litigieuses. En statuant ainsi, alors qu'aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'un mandat, adressé avant l'engagement d'une procédure d'imposition, habilite le mandataire à recevoir l'ensemble des actes des procédures susceptibles d'être engagées au titre d'impositions déterminées et à y répondre, et emporte, dès lors, élection de domicile auprès de ce dernier, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. C... est fondé à demander l'annulation de l'article 2 de l'arrêt qu'il attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 2 de l'arrêt du 10 janvier 2019 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 428745
Date de la décision : 24/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RECTIFICATION (OU REDRESSEMENT) - GÉNÉRALITÉS - DÉSIGNATION PAR LE CONTRIBUABLE D'UN MANDATAIRE POUR RECEVOIR L'ENSEMBLE DES ACTES DE L'ADMINISTRATION AU TITRE D'IMPOSITIONS DÉTERMINÉES [RJ1] - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE - MANDAT PORTÉ À LA CONNAISSANCE DE L'ADMINISTRATION AVANT TOUTE PROCÉDURE DE RECTIFICATION.

19-01-03-02-01 Aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'un mandat, adressé avant l'engagement d'une procédure d'imposition, habilite le mandataire à recevoir l'ensemble des actes des procédures susceptibles d'être engagées au titre d'impositions déterminées et à y répondre, et emporte dès lors élection de domicile auprès de ce dernier.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RECTIFICATION (OU REDRESSEMENT) - PROPOSITION DE RECTIFICATION (OU NOTIFICATION DE REDRESSEMENT) - DÉSIGNATION PAR LE CONTRIBUABLE D'UN MANDATAIRE POUR RECEVOIR L'ENSEMBLE DES ACTES DE L'ADMINISTRATION AU TITRE D'IMPOSITIONS DÉTERMINÉES [RJ1] - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE - MANDAT PORTÉ À LA CONNAISSANCE DE L'ADMINISTRATION AVANT TOUTE PROCÉDURE DE RECTIFICATION.

19-01-03-02-02-02 Aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'un mandat, adressé avant l'engagement d'une procédure d'imposition, habilite le mandataire à recevoir l'ensemble des actes des procédures susceptibles d'être engagées au titre d'impositions déterminées et à y répondre, et emporte dès lors élection de domicile auprès de ce dernier.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 23 mai 2003, Ministre c/ SA Imprimerie Riccobono, n° 253223, p. 239 ;

s'agissant des exigences tenant au contenu du mandat, CE, 27 octobre 2010, Ministre c/,, n° 327163, T. p. 711.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 fév. 2021, n° 428745
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Nicolas Agnoux
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP BOULLOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:428745.20210224
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