Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février et 27 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat CGT du personnel de l'hôpital Beaujon demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 31 décembre 2019 par laquelle la ministre des solidarités et de la santé a accordé à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris une autorisation sur le fondement de l'article 15 du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La requête a été communiquée au ministre des solidarités et de la santé qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative et le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... A..., maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 15 du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Lorsque les besoins du service l'exigent, les agents peuvent être appelés à effectuer des heures supplémentaires en dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail dans la limite de 180 heures par an et par agent. Ce plafond est porté à 220 heures pour les catégories de personnels suivantes : infirmiers spécialisés, cadres de santé infirmiers, sages-femmes, sages-femmes cadres de santé, personnels d'encadrement technique et ouvrier, manipulateurs d'électroradiologie médicale. / (...) En cas de crise sanitaire, les établissements de santé sont autorisés, par décision du ministre de la santé, à titre exceptionnel, pour une durée limitée et pour les personnels nécessaires à la prise en charge des patients, à dépasser les bornes horaires fixées par le cycle de travail (...) ". En application de ces dernières dispositions, le ministre des solidarités et de la santé a, par une décision du 31 décembre 2019, autorisé l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris à dépasser, pour la période du 1er janvier au 30 juin 2020, les bornes horaires fixées par le cycle de travail pour les personnels relevant des corps d'aides-soignants, d'infirmiers en soins généraux et spécialisés, d'infirmiers anesthésistes, de masseurs-kinésithérapeutes et de manipulateurs d'électroradiologie médicale. Le syndicat requérant demande l'annulation de cette décision.
2. Aux termes de l'article R. 311-1 du code de justice administrative: " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : / (..) / 2° Des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres et des autres autorités à compétence nationale et contre leurs circulaires et instructions de portée générale (...) ".
3. La décision par laquelle le ministre chargé de la santé autorise, sur le fondement des dispositions citées au point 1, un établissement de santé à porter, pour certaines catégories de personnel et pour une certaine durée, le nombre d'heures supplémentaires au-delà des bornes horaires fixées par le cycle de travail, qui est dépourvue de caractère général et impersonnel et n'a pas, par elle-même, pour objet l'organisation du service public, ne revêt pas un caractère réglementaire. Elle n'est donc pas au nombre des décisions que le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort en application des dispositions du 2° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative.
4. Aucune autre disposition du code de justice administrative ne donnant compétence au Conseil d'Etat pour connaître en premier et dernier ressort des conclusions de la requête du syndicat CGT du personnel de l'hôpital Beaujon, il y a lieu, en application des dispositions des articles R. 351-1 et R. 312-15 du même code, d'en attribuer le jugement au tribunal administratif de Paris.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement de la requête du syndicat CGT du personnel de l'hôpital Beaujon est renvoyé au tribunal administratif de Paris.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat CGT du personnel de l'hôpital Beaujon et au ministre de la santé et des solidarités.