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06/11/2020 | FRANCE | N°426102

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 06 novembre 2020, 426102


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'agence régionale de santé de Basse-Normandie à lui verser la somme de 249 247,80 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes qu'elle aurait commises dans le cadre de la création et du suivi du groupement de coopération sanitaire des urgences de la Côte Fleurie, pour lequel il a travaillé. Par un jugement n° 1401840 du 7 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 16NT03076 du 15 octobre 201

8, la cour administrative d'appel de Nantes, saisie de l'appel formé par M...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'agence régionale de santé de Basse-Normandie à lui verser la somme de 249 247,80 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes qu'elle aurait commises dans le cadre de la création et du suivi du groupement de coopération sanitaire des urgences de la Côte Fleurie, pour lequel il a travaillé. Par un jugement n° 1401840 du 7 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 16NT03076 du 15 octobre 2018, la cour administrative d'appel de Nantes, saisie de l'appel formé par M. B..., a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions à concurrence de la somme de 12 188,80 euros et en a rejeté le surplus.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 décembre 2018 et 8 mars 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Basse-Normandie la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000

- la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Pacoud, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., médecin libéral ayant exercé des activités de médecine d'urgence au sein du groupement de coopération sanitaire des urgences de la Côte fleurie, créé entre le centre hospitalier de la Côte fleurie et la polyclinique de Deauville pour gérer le service des urgences, jusqu'à la dissolution de ce groupement le 30 décembre 2011, a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'agence régionale de santé de Basse-Normandie à l'indemniser des préjudices résultant, d'une part, de l'absence de rémunération de certaines des activités de médecine d'urgence exercées au sein du groupement et, d'autre part, de sa baisse de rémunération à la suite de la dissolution du groupement. Par un jugement du 7 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. B.... Celui-ci se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, saisie de son appel, a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de sa requête à concurrence de la somme de 12 188,80 euros et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Sur la personne publique dont la responsabilité est recherchée :

2. Si les agences régionales de l'hospitalisation étaient, en vertu de l'article L. 6115-2 du code de la santé publique applicable à la date de la constitution du groupement de coopération sanitaire de la Côte fleurie, des personnes morales de droit public distinctes de l'Etat, leur directeur exerçait, au nom de l'Etat, les compétences mentionnées à l'article L. 6115-1 de ce code ne relevant pas de la compétence de leur commission exécutive, parmi lesquelles la coordination de l'activité des établissements de santé publics et privés et le contrôle de leur fonctionnement. Il en va de même des compétences confiées au même titre depuis la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires par l'article L. 1431-2 de ce code aux agences régionales de santé et exercées par leur directeur général, l'agence régionale de santé étant en outre, aux termes du troisième alinéa du I de l'article 129 de cette loi, substituée à l'agence régionale de l'hospitalisation dans l'ensemble de ses droits et obligations.

3. M. B... recherchant l'indemnisation des préjudices subis à raison des fautes qu'il estime avoir été commises par l'agence régionale de l'hospitalisation et l'agence régionale de santé de Basse Normandie au titre des compétences exercées au nom de l'Etat, ses conclusions indemnitaires doivent être regardées comme dirigées à la fois contre l'agence régionale de santé et contre l'Etat, lequel, en l'absence de décision expresse de sa part, est réputé, en vertu des articles 20 et 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dont les dispositions sont désormais reprises aux articles L. 114-2, L. 114-3 et L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration, avoir implicitement rejeté la réclamation préalable de M. B... à l'expiration du délai de deux mois suivant la date de sa réception par l'agence régionale de santé saisie.

Sur l'arrêt, en tant qu'il statue sur les préjudices subis par M. B... au titre des actes non rémunérés :

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... concluait devant eux à ce que l'agence régionale de santé de Basse-Normandie soit, au nom de l'Etat, condamnée à l'indemniser à hauteur d'une somme de 10 188,80 euros au titre du préjudice financier subi du fait de l'absence de rémunération de soins qu'il avait dispensés au sein du groupement de coopération sanitaire de la Côte fleurie et d'une somme de 2 500 euros au titre du préjudice moral subi du fait de cette absence de rémunération.

6. Il ressort également des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un litige distinct, M. B... a recherché, au titre des mêmes préjudices, la responsabilité du centre hospitalier de la Côte fleurie et du groupement de coopération sanitaire des urgences de la Côte fleurie et que, par un arrêt du 22 septembre 2017, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Nantes a écarté la responsabilité du centre hospitalier de la Côte fleurie et jugé que celle du groupement de coopération sanitaire était engagée. Elle a condamné celui-ci à indemniser M. B... de la totalité des préjudices au titre desquels il avait présenté ses conclusions, dont elle a apprécié le montant à la somme de 10 188,80 euros s'agissant du préjudice financier et à 2 000 euros s'agissant du préjudice moral, soit un total de 12 188,80 euros.

7. En retenant, par son précédent arrêt du 22 septembre 2017, la responsabilité pour faute du groupement de coopération sanitaire de la Côte fleurie et en le condamnant à réparer l'intégralité des préjudices subis par M B... au titre de ses actes non rémunérés, sans prévoir une quelconque subrogation, la cour administrative d'appel de Nantes a nécessairement écarté à ce titre la responsabilité de toute autre personne publique. Il s'ensuit que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que cette condamnation rendait sans objet, à hauteur de la somme qui lui avait été ainsi accordée, les conclusions de M. B... présentées à l'encontre de l'agence régionale de santé au titre des mêmes préjudices. Elle n'a pas davantage commis d'erreur de droit, ni insuffisamment motivé son arrêt, en ne répondant pas à l'argumentation par laquelle M. B... faisait valoir qu'il n'avait reçu du groupement de coopération sanitaire, dissous en 2011, aucune somme d'argent à la suite de cet arrêt le condamnant, une telle circonstance étant sans incidence sur le caractère exécutoire de l'arrêt du 22 septembre 2017, passé en force de chose jugée, et sur les droits que M. B... en tenait, notamment à l'égard des personnes morales ayant succédé aux droits et obligations du groupement après sa dissolution.

Sur l'arrêt, en tant qu'il statue sur les préjudices subis par M. B... au titre de sa baisse de rémunération à la suite de la dissolution du groupement de coopération sanitaire :

8. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... concluait également devant eux à ce que l'agence régionale de santé de Basse-Normandie soit, au nom de l'Etat, condamnée à l'indemniser à hauteur d'une somme de 233 559 euros au titre du préjudice financier subi du fait de sa baisse de rémunération à la suite de la dissolution le 30 décembre 2011 du groupement de coopération sanitaire de la Côte fleurie et d'une somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral subi du fait de la précarité à laquelle son exercice au sein de ce groupement l'avait ainsi exposé.

9. En jugeant que l'échec de l'expérimentation du groupement de coopération sanitaire de la Côte fleurie, concrétisé par sa dissolution à effet du 30 décembre 2011, résultait pour l'essentiel du comportement des deux partenaires hospitaliers, la cour a porté sur les faits, qu'elle n'a pas dénaturés, une appréciation souveraine. En en déduisant qu'aucun lien de causalité direct ne pouvait être regardé comme établi entre les éventuelles carences de l'agence régionale de santé de Basse-Normandie, dont la cour n'a mentionné qu'à titre surabondant qu'elles n'étaient pas établies, et la baisse de rémunération subie à la suite de cette dissolution par M. B..., qui n'apportait pas d'autre élément à l'appui de l'origine de son manque à gagner dans une telle carence, elle n'a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis. Enfin, dès lors qu'elle estimait qu'un tel lien de causalité direct n'était pas caractérisé, la cour n'a pas insuffisamment motivé son arrêt en ne se prononçant pas sur l'ensemble des éléments par lesquels M. B... soutenait que le comportement de l'agence régionale de l'hospitalisation puis de l'agence régionale de santé avait été fautif.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être également rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée à l'agence régionale de santé de Normandie.


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 426102
Date de la décision : 06/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2020, n° 426102
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Pacoud
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP BUK LAMENT - ROBILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:426102.20201106
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