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04/11/2020 | FRANCE | N°427501

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 04 novembre 2020, 427501


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 427501, par une requête, un mémoire en réplique, et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 30 janvier, 16 mai, 28 juin et 28 octobre 2019 et 3 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 novembre 2018 par lequel le président de l'université de Picardie Jules Verne a prononcé sa suspension à titre conservatoire pour une durée de trois mois ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes mesures utiles

de nature à lui permettre de reprendre ses fonctions et d'être rétabli dans ses droi...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 427501, par une requête, un mémoire en réplique, et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 30 janvier, 16 mai, 28 juin et 28 octobre 2019 et 3 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 novembre 2018 par lequel le président de l'université de Picardie Jules Verne a prononcé sa suspension à titre conservatoire pour une durée de trois mois ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes mesures utiles de nature à lui permettre de reprendre ses fonctions et d'être rétabli dans ses droits pécuniaires, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de dix jours à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 429955, par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 avril et 30 octobre 2019 et le 3 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 février 2019 par lequel le président de l'université de Picardie Jules Verne a prolongé, pour une durée de trois mois à compter du 5 mars 2019, la mesure de suspension prononcée à son encontre ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre toutes mesures utiles de nature à lui permettre de reprendre ses fonctions et d'être rétabli dans ses droits pécuniaires, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de dix jours à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'éducation, notamment son article L. 951-4 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;

- l'arrêté du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche du 10 février 2012 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion de certains personnels enseignants des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme C... D..., conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 951-4 du code de l'éducation : " Le ministre chargé de l'enseignement supérieur peut prononcer la suspension d'un membre du personnel de l'enseignement supérieur pour un temps qui n'excède pas un an, sans suspension de

traitement ". La suspension d'un professeur des universités, sur la base de ces dispositions, est une mesure à caractère conservatoire, prise dans le souci de préserver l'intérêt du service public universitaire. Elle peut être prononcée lorsque les faits imputés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité.

2. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 29 novembre 2018, le président de l'université Picardie Jules Verne, agissant par délégation de la ministre chargée de l'enseignement supérieur, a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 951-4 du code de l'éducation citées ci-dessus, suspendu pour une durée de trois mois M. B..., professeur des universités enseignant au sein de cet établissement, après avoir engagé à son encontre une procédure disciplinaire pour des faits de harcèlement sexuel commis sur des étudiantes de l'université. Par une deuxième décision du 27 février 2019, le président de l'université a prolongé cette suspension pour une durée de trois mois à compter du 5 mars 2019. M. B... demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces décisions de suspension, prononcées les 29 novembre 2018 et 27 février 2019, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision.

3. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le président de l'université de Picardie Jules Verne aurait méconnu sa compétence en se croyant, à tort, lié par les conclusions de la commission d'enquête interne qu'il avait diligentée après un signalement relatif au comportement de M. B... envers une étudiante.

4. En deuxième lieu, M. B... ne saurait utilement soutenir que le déroulement de cette commission d'enquête aurait été entachée d'irrégularités dès lors que cette procédure, qui n'est pas exigée par les dispositions citées au point 1 de l'article L. 951-4 du code de l'éducation, a eu pour seul objet d'éclairer le président de l'université qui, comme il a été dit au point précédent, n'était pas lié par les conclusions de celle-ci.

5. En troisième lieu, M. B... soutient que les faits que l'administration lui impute ne revêtent pas le caractère de vraisemblance suffisant pour prendre légalement la mesure attaquée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment des témoignages concordants recueillis par la commission d'enquête, qui ne sont pas démentis par les pièces produites par M. B... à l'appui de ses écritures, que, même si ce dernier en conteste la matérialité, le président de l'Université Picardie Jules Verne a pu, en l'état des éléments portés à sa connaissance, estimer que les faits imputés à M. B... revêtaient un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité. Par suite, il n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 951-4 du code de l'éducation ni commis d'erreur d'appréciation en prenant les mesures de suspension attaquées.

6. Enfin, M. B... ne saurait utilement se prévaloir, pour soutenir que les décisions litigieuses du président d'université seraient entachées d'erreur d'appréciation en ce qui concerne la durée de sa suspension, de la circonstance, à la supposer avérée, que la section disciplinaire de l'université n'aurait pas respecté les dispositions règlementaires relatives aux délais d'instruction et de jugement des plaintes disciplinaires. Par ailleurs, eu égard notamment aux tensions suscitées par la procédure disciplinaire entre M. B... et les autres enseignants de son département, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 27 février 2019 est entachée d'erreur d'appréciation en ce qu'elle maintient sa suspension pendant une période comprenant une période de vacances universitaires pour les étudiants de son département. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le président de l'université a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 951-4 du code de l'éducation en prenant les deux décisions litigieuses.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de M. B... doivent être rejetées, y compris les conclusions qu'elles comportent au titre des articles L. 911-1 et L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Copie en sera adressée à l'université de Picardie Jules Verne.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 nov. 2020, n° 427501
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Brouard-Gallet
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon

Origine de la décision
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 04/11/2020
Date de l'import : 10/11/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 427501
Numéro NOR : CETATEXT000042499830 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2020-11-04;427501 ?
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