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07/10/2020 | FRANCE | N°441747

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 07 octobre 2020, 441747


Vu la procédure suivante :

M. B... A..., à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation de l'ordonnance n° 1703482 du 19 juillet 2019 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices résultant de son exposition à des poussières d'amiante à l'occasion de son activité professionnelle, a produit un mémoire, enregistré le 10 juin 2020 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, en application

de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 581067 du 7 novembre 1958, par lequ...

Vu la procédure suivante :

M. B... A..., à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation de l'ordonnance n° 1703482 du 19 juillet 2019 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices résultant de son exposition à des poussières d'amiante à l'occasion de son activité professionnelle, a produit un mémoire, enregistré le 10 juin 2020 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 581067 du 7 novembre 1958, par lequel il soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 19MA04342 du 8 juillet 2020, enregistrée le lendemain au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le président de la cour administrative d'appel de Marseille, avant qu'il soit statué sur la requête d'appel de M. A..., a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 581067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration.

Dans la question prioritaire de constitutionnalité transmise, M. A... soutient que l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration, applicable au litige, méconnaît le principe d'égalité devant la justice, garanti par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et par l'article 1er de la Constitution.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code des relations entre le public et l'administration, notamment son article L. 112-2 ;

- la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 ;

- l'ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 septembre 2020, présenté par M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. M. B... A... conteste, à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation de l'ordonnance du 19 juillet 2019 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme tardive sa demande indemnitaire dirigée contre l'Etat, la conformité à la Constitution de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration, dont il résulte que ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents les dispositions des articles L. 112-3 et L. 112-6 du même code, qui prévoient, respectivement, que " toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception (...) " et que " les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation (...) ".

3. Les dispositions de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration sont issues de l'ordonnance du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l'administration, prise sur le fondement de l'article 38 de la Constitution en vertu d'une habilitation donnée par l'article 3 de la loi du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens. Un projet de loi de ratification de cette ordonnance a été déposé à l'Assemblée nationale le 16 décembre 2015. Le délai d'habilitation ayant expiré et les dispositions de l'article L. 112-2 étant intervenues, notamment en ce qu'elles s'appliquent aux collectivités territoriales, dans une matière qui relève du domaine législatif, la circonstance que l'ordonnance du 23 octobre 2015 n'a pas encore été ratifiée ne fait pas obstacle à ce que, dans le cadre d'un litige dans lequel cette disposition a été appliquée, la question de la conformité des dispositions en cause aux droits et libertés garantis par la Constitution soit transmise au Conseil constitutionnel.

4. Si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquels elles s'appliquent, c'est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales. La nature des relations qu'un agent employé par une personne publique entretient, en cette qualité, avec son employeur, est différente de celle entretenue par l'administration avec le public, y compris l'agent en sa qualité de citoyen ou d'usager. En excluant l'application aux relations entre l'administration et ses agents des dispositions des articles L. 112-3 et L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration, qui ont pour objet de régir les relations du public avec l'administration, sans viser à intervenir dans les relations entre l'administration et ses agents, les dispositions de l'article L. 112-2 du même code ne procèdent dès lors pas de distinctions injustifiées entre les administrés et les agents de l'administration et assurent aux justiciables des garanties propres à chacune des différentes natures de litiges qui sont susceptibles de les opposer à l'administration. Par suite, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant la justice.

5. Il résulte de ce qui précède que la question de la conformité des dispositions de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration aux droits et libertés que la Constitution garantit, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre ainsi qu'à la cour administrative d'appel de Marseille.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 oct. 2020, n° 441747
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Vincent Villette

Origine de la décision
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 07/10/2020
Date de l'import : 14/10/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 441747
Numéro NOR : CETATEXT000042409986 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2020-10-07;441747 ?
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