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27/01/2020 | FRANCE | N°435612

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 27 janvier 2020, 435612


Vu la procédure suivante :

M. A... C..., à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation ou, à titre subsidiaire, à la réformation de la sanction d'interdiction temporaire d'exercer la pharmacie pendant six mois prononcée à son encontre par la chambre de discipline du conseil central de la section E de l'ordre des pharmaciens, a produit un mémoire, enregistré le 3 avril 2019 au greffe de la chambre de discipline du conseil national de l'ordre des pharmaciens, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel il soulève une que

stion prioritaire de constitutionnalité.

Par une décision n° AD 4...

Vu la procédure suivante :

M. A... C..., à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation ou, à titre subsidiaire, à la réformation de la sanction d'interdiction temporaire d'exercer la pharmacie pendant six mois prononcée à son encontre par la chambre de discipline du conseil central de la section E de l'ordre des pharmaciens, a produit un mémoire, enregistré le 3 avril 2019 au greffe de la chambre de discipline du conseil national de l'ordre des pharmaciens, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel il soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une décision n° AD 4760 du 11 octobre 2019, enregistrée le 28 octobre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la chambre de discipline du conseil national de l'ordre des pharmaciens, avant qu'il soit statué sur la requête d'appel de M. C..., a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du quatrième alinéa de l'article L. 5125-22 du code de la santé publique, devenu le quatrième alinéa de l'article L. 5125-17 de ce code.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- l'article L. 5125-22 du code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Boussaroque, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. M. C... soutient que le quatrième alinéa de l'article L. 5125-22 du code de la santé publique, applicable au litige, repris désormais au quatrième alinéa de l'article L. 5125-17 de ce code, aux termes duquel " un pharmacien qui ouvre son officine pendant un service de garde ou d'urgence, alors qu'il n'est pas lui-même de service, doit la tenir ouverte durant tout le service considéré ", méconnaît le principe de la liberté d'entreprendre. Toutefois, il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi. L'alinéa critiqué fait partie des dispositions, figurant à ce même article, par lesquelles le législateur a entendu, en organisant un service obligatoire de garde des officines d'une même zone en dehors des jours d'ouverture généralement pratiqués et un service obligatoire d'urgence en dehors des heures d'ouverture généralement pratiquées, garantir à tout moment, notamment pour répondre aux demandes et besoins urgents, l'accès de l'ensemble de la population aux services offerts par les officines. Il a ainsi poursuivi un objectif de santé publique. En imposant qu'un pharmacien qui ouvre son officine pendant un service de garde ou d'urgence, alors qu'il n'est pas lui-même de service, la tienne ouverte durant tout le service considéré, il n'a pas interdit de façon absolue une telle ouverture ni même imposé qu'elle soit opérée " à volets ouverts " mais a entendu, par une obligation dont la durée n'excède pas celle du seul service de garde ou d'urgence en cause, que cette ouverture ne soit opérée que dans des conditions, notamment de confraternité et loyauté de la concurrence entre pharmaciens d'officine, ainsi que de clarté pour la population, qui ne soient pas de nature à compromettre l'existence même de ces services de garde et d'urgence. Le législateur n'a pas ce faisant assuré une conciliation manifestement déséquilibrée entre le principe de la liberté d'entreprendre et l'objectif de santé publique poursuivi. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.

3. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la chambre de discipline du conseil national de l'ordre des pharmaciens.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et à la ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre, à M. B... D..., au conseil central de la section E de l'ordre des pharmaciens ainsi qu'à la chambre de discipline du conseil national de l'ordre des pharmaciens.


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 435612
Date de la décision : 27/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jan. 2020, n° 435612
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pierre Boussaroque
Rapporteur public ?: M. Vincent Villette

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:435612.20200127
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