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26/07/2019 | FRANCE | N°432384

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 26 juillet 2019, 432384


Vu la procédure suivante :

La société Anatha a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le préfet de la Martinique a ordonné la fermeture administrative temporaire pour une durée de trois mois de l'établissement Le Domaine de l'Oasis à Rivière-Salée et toute mesure de sauvegarde nécessaire à l'exercice de son activité et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Et

at une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de jus...

Vu la procédure suivante :

La société Anatha a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le préfet de la Martinique a ordonné la fermeture administrative temporaire pour une durée de trois mois de l'établissement Le Domaine de l'Oasis à Rivière-Salée et toute mesure de sauvegarde nécessaire à l'exercice de son activité et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 1900373 du 2 juillet 2019, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa requête.

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 juillet 2019 et 18 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Anatha demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que la fermeture administrative durant la période estivale la prive d'une large partie de son chiffre d'affaires ;

- la fermeture administrative porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l'industrie ;

- la mesure de fermeture administrative est disproportionnée en ce qu'elle est d'une durée de trois mois ;

- l'ordonnance attaquée est entachée d'insuffisance de motivation dès lors que le juge des référés ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure qui a été menée non pas avec la représentante légale de la société mais avec son directeur délégué ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en ce que le juge des référés n'a pas tenu compte des circonstances de droit et de fait existant à la date de la décision mais au vu des évènements survenus fin avril et début mai.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la société Anatha et le ministre de l'intérieur ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 18 juillet 2019 à 16 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société Anatha ;

- les représentants de la société Anatha ;

- les représentants du ministre de l'intérieur ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 19 juillet à 19 heures ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 19 juillet 2019 avant la clôture de l'instruction, présenté par le ministre de l'intérieur ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".

2. Aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : " 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'État dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements (...) / 2. En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois (...) / 3. Lorsque la fermeture est motivée par des actes criminels ou délictueux prévus par les dispositions pénales en vigueur, à l'exception des infractions visées au 1, la fermeture peut être prononcée pour six mois. Dans ce cas, la fermeture entraîne l'annulation du permis d'exploitation visé à l'article L. 3332-1-1. / 4. Les crimes et délits ou les atteintes à l'ordre public pouvant justifier les fermetures prévues au 2 et au 3 doivent être en relation avec la fréquentation de l'établissement ou ses conditions d'exploitation. 5. Les mesures prises en application du présent article sont soumises aux dispositions du code des relations entre le public et l'administration ".

3. La société Anatha, qui exploite à Rivière-Salée, sous l'enseigne Le Domaine de l'Oasis, un établissement destiné à l'accueil et à l'organisation d'évènements festifs a fait l'objet d'une fermeture administrative pour une durée de trois mois par un arrêté du préfet de la Martinique du 20 juin 2019 pris sur le fondement de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique. Par une requête, enregistrée le 27 juin 2019, la société Anatha a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de cette mesure de fermeture administrative. Par une ordonnance n° 1900373 du 2 juillet 2019 dont la société Anatha relève appel, le juge des référés a rejeté sa demande.

4. D'une part et contrairement à ce que la requérante soutient, l'ordonnance attaquée est suffisamment motivée en écartant comme inopérant le moyen tiré de ce que la procédure n'aurait pas été contradictoire.

5. D'autre part, il n'y a urgence à ordonner la suspension d'une décision administrative que s'il est établi qu'elle préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du demandeur ou aux intérêts qu'il entend défendre. En outre, lorsque le requérant fonde son intervention non sur la procédure de suspension régie par l'article L. 521-1 du code de justice administrative, mais sur la procédure de protection particulière instituée par l'article L. 521-2 de ce code, il lui appartient de justifier de circonstances caractérisant une situation d'urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par l'article L. 521-2 soient remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans les quarante-huit heures.

6. Pour justifier l'existence d'une situation d'urgence impliquant la suspension de l'arrêté du préfet de la Martinique du 20 juin 2019 ordonnant la fermeture administrative de l'établissement qu'elle exploite pour une durée de trois mois à compter du jour même, la société Anatha se borne à faire valoir que la période estivale assure une large partie de son chiffre d'affaires et que la fermeture administrative entraînerait des conséquences économiques difficilement réparables. Elle n'apporte à l'appui de ses allégations, contestées par le ministre de l'intérieur, aucun élément probant, malgré l'invitation en ce sens qui lui a été faite, invoquant à l'audience la circonstance que ces documents se trouveraient entre les mains de son expert-comptable qui refuserait de les lui communiquer. Ces éléments ne suffisent pas à caractériser, à la date de la présente ordonnance, une situation d'urgence impliquant qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise à très bref délai.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la Société Anatha n'est pas fondée à se plaindre du rejet de sa demande par l'ordonnance du 2 juillet 2019 du juge des référés du tribunal administratif de La Martinique. Il y a donc lieu de rejeter sa requête, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la Société Anatha est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Société Anatha et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 432384
Date de la décision : 26/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2019, n° 432384
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:432384.20190726
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