La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2018 | FRANCE | N°420771

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 17 septembre 2018, 420771


Vu la procédure suivante :

Le préfet de la Marne a transmis au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la réclamation consignée par M. C...A...sur le procès-verbal des élections municipales partielles qui se sont déroulées le 8 avril 2018 dans la commune de Faux-Fresnay en vue de l'élection d'un conseiller municipal. Par une ordonnance n° 1800789 du 18 avril 2018, le président de la troisième chambre du tribunal administratif a rejeté la protestation de M. A....

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M.

A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Le préfet de la Marne a transmis au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la réclamation consignée par M. C...A...sur le procès-verbal des élections municipales partielles qui se sont déroulées le 8 avril 2018 dans la commune de Faux-Fresnay en vue de l'élection d'un conseiller municipal. Par une ordonnance n° 1800789 du 18 avril 2018, le président de la troisième chambre du tribunal administratif a rejeté la protestation de M. A....

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 8 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code électoral ;

- le décret n° 2017-1873 du 29 décembre 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la démission d'un conseiller municipal le 31 décembre 2016 et de la démission du maire de la commune le 22 février 2018, des élections municipales partielles ont été organisées le 8 avril 2018 dans la commune de Faux-Fresnay pour pourvoir un siège de conseiller municipal. A l'issue des opérations électorales, les deux candidats, M. E...F...et M. C...A..., ont été proclamés élus. M. A...ayant cependant porté une réclamation sur le procès-verbal des opérations électorales, le préfet de la Marne, en application de l'article R. 119 du code électoral, l'a fait enregistrer au greffe du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne. M. A...relève appel de l'ordonnance du 18 avril 2018 par laquelle le président de la troisième chambre du tribunal administratif a rejeté sa protestation comme irrecevable.

2. Aux termes de l'article L. 248 du code électoral : " Tout électeur et tout éligible a le droit d'arguer de nullité les opérations électorales de la commune devant le tribunal administratif. (...) ". M. A...avait ainsi qualité pour contester les opérations électorales, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'il avait été proclamé élu à leur issue. C'est ainsi à tort que le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a jugé qu'il n'avait pas intérêt pour agir et rejeté sa protestation pour ce motif. Son ordonnance doit, par suite, être annulée.

3. Le délai imparti au tribunal administratif par l'article R. 120 du code électoral pour statuer sur la protestation de M. A...est expiré. Dès lors, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de statuer immédiatement sur cette protestation.

Sur les griefs dirigés contre le déroulement des opérations électorales :

4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 60 du code électoral : " Les électeurs des communes de 1 000 habitants et plus doivent présenter au président du bureau, au moment du vote, en même temps que la carte électorale ou l'attestation d'inscription en tenant lieu, un titre d'identité ; la liste des titres valables est établie par arrêté du ministre de l'intérieur. / Les assesseurs sont associés, sur leur demande, à ce contrôle d'identité ". La commune de Faux-Fresnay comptant moins de 1 000 habitants, il résulte de ces dispositions que ses électeurs n'étaient pas soumis à l'obligation de présenter une pièce d'identité pour prendre part au vote. D'autre part, si M. A...soutient que certains habitants n'étaient pas connus des membres du bureau de vote et pouvaient ne pas être inscrits sur la liste électorale, il ne résulte pas de l'instruction que certains des électeurs admis à voter n'auraient pas été régulièrement inscrits sur cette liste ou auraient voté sous une fausse identité. En l'absence de toute indication de nature à établir l'existence d'une manoeuvre, le grief ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, le premier alinéa de l'article L. 63 du code électoral prévoit que : " L'urne électorale est transparente. Cette urne n'ayant qu'une ouverture destinée à laisser passer l'enveloppe contenant le bulletin de vote doit, avant le commencement du scrutin, avoir été fermée à deux serrures dissemblables, dont les clefs restent, l'une entre les mains du président, l'autre entre les mains d'un assesseur tiré au sort parmi l'ensemble des assesseurs ". Si M. A...fait valoir que les clefs de l'urne ont été laissées à côté de l'urne, sur la même table que celle-ci, il ne résulte pas de l'instruction que cette irrégularité aurait eu pour but ou pour effet de favoriser une quelconque fraude ou aurait porté atteinte au secret du vote. Par suite, elle ne peut être regardée comme ayant altéré la sincérité du scrutin.

6. En dernier lieu, les griefs soulevés par M.A..., tirés de l'incertitude sur le nombre de conseillers municipaux à élire, de la mauvaise comptabilisation des bulletins blancs ou nuls par les assesseurs et de l'insuffisante neutralité de ces derniers, ne sont pas d'ordre public. Ils sont distincts des griefs, mentionnés aux points 4 et 5 ci-dessus, seuls formulés dans le délai prévu par l'article R. 119 du code électoral. Invoqués tardivement, ils ne sont, dès lors, pas recevables. Enfin, les conditions d'élection du maire et des adjoints le 13 avril 2018 sont sans incidence sur la régularité des opérations électorales qui se sont déroulées le 8 avril 2018 pour compléter le conseil municipal.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation dans leur ensemble des opérations électorales qui se sont déroulées le 8 avril 2018.

Sur la proclamation des résultats :

8. Aux termes de l'article L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales : " (...) Pour toute élection du maire ou des adjoints, les membres du conseil municipal sont convoqués dans les formes et délais prévus aux articles L. 2121-10 à L. 2121-12. La convocation contient mention spéciale de l'élection à laquelle il doit être procédé. / Avant cette convocation, il est procédé aux élections qui peuvent être nécessaires lorsque le conseil municipal est incomplet. (...) ".

9. Il résulte de l'instruction que l'un des membres du conseil municipal de Faux-Fresnay a démissionné le 31 décembre 2016. Si M. B...D..., maire de la commune, a démissionné de son mandat de maire le 22 février 2018, il est en revanche resté membre du conseil municipal. Par suite, l'élection d'un seul conseiller municipal était requise, en application des dispositions de l'article L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales citées ci-dessus, pour que le conseil municipal soit de nouveau complet et qu'il puisse être procédé à l'élection du maire. C'est, dès lors, à tort qu'à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 8 avril 2018, ont été proclamés élus non seulement M.F..., qui avait obtenu 59 voix, mais également M. A..., qui en avait obtenu 53. Il suit de là que l'élection de M. A...doit être annulée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du président de la troisième chambre du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 18 avril 2018 est annulée.

Article 2 : L'élection de M. A...en qualité de conseiller municipal de la commune de Faux-Fresnay est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la protestation de M. A...est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C...A...et à M. E...F....

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 420771
Date de la décision : 17/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 sep. 2018, n° 420771
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:420771.20180917
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award