Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 7 août 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national de l'enseignement technique agricole public - fédération syndicale unitaire (SNETAP-FSU) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution du 2è alinéa du B du II de la note de service du 17 juillet 2015 du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt relative au temps syndical des représentants des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, ainsi que de l'annexe 3 de cette note ;
2°) d'enjoindre sous astreinte au ministre de lui accorder les autorisations d'absence prévues à l'article 2 de l'arrêté interministériel du 27 octobre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a intérêt à agir contre la note de service contestée ;
- la condition d'urgence est remplie dès lors que la note de service, qui entre en vigueur dès la rentrée scolaire 2015, porte une atteinte grave et immédiate aux intérêts défendus par le syndicat, à la liberté syndicale et au bon fonctionnement du service public de l'enseignement agricole ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la note de service litigieuse ;
- la secrétaire générale du ministère n'était pas compétente pour prendre cette note qui de plus n'est pas signée ;
- la note de service attribue à ses représentants un contingent annuel d'autorisations d'absence inférieur à celui fixé par l'arrêté interministériel du 27 octobre 2014 ;
- la note de service méconnaît la liberté syndicale garantie par les 6ème et 8ème alinéas du Préambule de la Constitution, par l'article 6 de la directive 89/391/CEE du 12 juin 1989, par l'article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et par l'article 16 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2015, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- l'arrêté interministériel du 27 octobre 2014 pris en application de l'article 75-1 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ;
- l'arrêté du 4 juin 2015 du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt pris pour l'application des quatrième et cinquième alinéas de l'article 75-1 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le syndicat national de l'enseignement technique agricole - fédération syndicale unitaire, d'autre part, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 31 août 2015 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- les représentants du syndicat national de l'enseignement technique agricole - fédération syndicale unitaire ;
- les représentants du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que le prononcé de la suspension d'une décision administrative est subordonné notamment à une condition d'urgence ; que l'urgence justifie la suspension de l'exécution de la décision lorsque celle-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de la décision contestée sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, son exécution soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 75-1 du décret 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, le contingent annuel d'autorisations d'absence attribué aux membres des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut être majoré pour tenir compte de critères géographiques ou de risques professionnels particuliers ; que le contingent annuel ainsi majoré a été fixé par l'arrêté interministériel du 27 octobre 2014 ; que l'arrêté du 4 juin 2015 dispose que les membres des comités régionaux d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'enseignement agricole bénéficient de cette majoration ; que l'annexe 3 de la note de service contestée du 17 juillet 2015 fixe le nombre de jours d'autorisations d'absence accordés à ces derniers en fonction de la région où ils exercent leurs missions ;
3. Considérant que, pour justifier de l'urgence qui s'attacherait à ce que soit suspendue l'exécution de la note de service, le syndicat requérant fait valoir que le nombre de jours d'autorisations d'absence qu'elle prévoit est inférieur d'environ 30 % à celui fixé par l'arrêté interministériel du 27 octobre 2014 ; que, dès lors, les membres des comités concernés ne disposeront pas du temps nécessaire pour accomplir leurs missions, notamment pour prévenir les " risques psycho-sociaux " dans les établissements publics locaux d'enseignement agricole ; que les emplois du temps des enseignants étant d'ores et déjà établis, les autorisations d'absence dont ils bénéficient ne pourront pas être modifiées en cours d'année scolaire sous peine de préjudicier gravement à la qualité de l'enseignement dispensé ; qu'il s'ensuit que l'exécution de la note contestée porte un préjudice grave et immédiat à la continuité et à la qualité du service public de l'enseignement et de la formation agricoles, ainsi qu'à la liberté syndicale ;
4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction ainsi que des échanges lors de l'audience publique qu'en application de la note de service contestée, les membres des comités régionaux d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'enseignement agricole se voient attribuer un contingent annuel d'autorisations d'absence égal à 3 000 jours environ, qui s'ajoute aux autorisations dont ces personnes bénéficiaient jusqu'à présent ; que les missions des comités sont identiques depuis plusieurs années ; qu'ainsi, à supposer même que le contingent attribué par la note de service soit inférieur à celui prévu par l'arrêté du 27 octobre 2014, cette circonstance ne permet pas d'établir que l'exécution de cette note porterait une atteinte grave et immédiate à la liberté syndicale ou qu'elle interdirait aux membres des comités d'exercer leurs missions ; qu'au surplus, les échanges tenus lors de l'audience publique ont fait apparaître que l'administration dispose, si elle le souhaite, des moyens permettant de modifier le contingent d'autorisations d'absence sans qu'il soit porté une atteinte excessive à la continuité et au bon fonctionnement du service ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence n'est pas remplie ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter la requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête du syndicat national de l'enseignement technique agricole - fédération syndicale unitaire est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au syndicat national de l'enseignement technique agricole - fédération syndicale unitaire et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.