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11/05/2015 | FRANCE | N°370533

France | France, Conseil d'État, 9ème / 10ème ssr, 11 mai 2015, 370533


Vu la procédure suivante :

La société A...Promotion a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002. Par un jugement n° 0705997 du 17 novembre 2011, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12PA00344 du 30 mai 2013, la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête d'appe

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Vu la procédure suivante :

La société A...Promotion a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002. Par un jugement n° 0705997 du 17 novembre 2011, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12PA00344 du 30 mai 2013, la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête d'appel de la société A...Promotion à concurrence de la somme de 67 939 euros, correspondant à un dégrèvement intervenu en cours d'instance et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la société.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juillet et 25 octobre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société A...Promotion demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

2°) de mettre à la charge l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bastien Lignereux, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lesourd, avocat de la SCP A...Promotion ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité dont la société A...Promotion a fait l'objet, l'administration a notamment remis en cause la déduction d'une provision pour créance douteuse détenue sur la SARL A...France, sa filiale, constatée à la clôture de l'exercice clos en 1994 et augmentée d'une dotation complémentaire à la clôture de l'exercice clos en 1995 ; que par une décision du 4 juin 2007, l'administration a rejeté la réclamation de la société A...Promotion tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002 à la suite de ces rectifications ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 30 mai 2013 en tant qu'après avoir prononcé un non-lieu partiel à statuer à concurrence d'un dégrèvement intervenu en cours d'instance, il a rejeté le surplus de ses conclusions d'appel tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Melun du 17 novembre 2011 rejetant sa demande en décharge des impositions litigieuses ;

2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient la société A...Promotion, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas dénaturé les faits de l'espèce en estimant que ni le protocole d'accord de règlement amiable conclu le 29 mars 1995 entre des établissements bancaires créanciers et différentes sociétés du groupeA..., ni la note sur le groupe A...établie le 25 février 1997 par le mandataire nommé par le président du tribunal de commerce de Paris pour assister M. A...dans le cadre de la procédure de règlement amiable de son groupe, ne permettaient d'établir un risque d'insolvabilité nettement précisé de la SARL A...France ; que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en en déduisant que la provision en litige avait été déduite des bénéfices de la société en méconnaissance des dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ; que, contrairement à ce que soutient la société, la cour n'a pas irrégulièrement inversé la charge de la preuve, dès lors que les bénéfices imposables au titre de l'exercice clos en 2002 ont été rehaussés suivant la procédure de taxation d'office et qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ;

3. Considérant, en second lieu, d'une part, qu'aux termes du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, issu de l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004 : " Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit. (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, une erreur ou omission affectant l'évaluation d'un élément quelconque du bilan d'un des exercices non prescrits peut, si elle a été commise au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, être corrigée de manière symétrique dans les bilans de clôture et d'ouverture des exercices non prescrits, y compris dans le bilan d'ouverture du premier d'entre eux ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôts sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition, notamment, que ces pertes ou charges apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice ; que, dès lors, l'inscription non justifiée en provision d'une somme pendant plusieurs exercices successifs, même si les montants sont identiques, constitue la répétition d'une erreur ; que, par suite, cette erreur, même lorsqu'elle a été commise pour la première fois au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, ne peut être corrigée dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices ;

5. Considérant qu'il suit de là que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la société ne pouvait utilement se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, dès lors que l'erreur tenant à la déduction de la provision litigieuse, si elle est intervenue la première fois plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit, a été répétée à la clôture de tous les exercices suivants ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SCP A...Promotion est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SCP A...Promotion et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème / 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 370533
Date de la décision : 11/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - PRESCRIPTION - INTANGIBILITÉ DU BILAN D'OUVERTURE DU PREMIER EXERCICE NON PRESCRIT ET DÉROGATION (ART - 38 DU CGI) - APPLICATION AUX PROVISIONS POUR PERTES OU CHARGES [RJ1].

19-01-03-04 Intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit sauf omissions ou erreurs intervenues plus de sept ans avant (art. 38 du code général des impôts (CGI)).... ,,Il résulte des dispositions des articles 39 et 209 du CGI qu'une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition, notamment, que ces pertes ou charges apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice. Dès lors, l'inscription non justifiée en provision d'une somme pendant plusieurs exercices successifs, même si les montants sont identiques, constitue la répétition d'une erreur. Par suite, cette erreur, même lorsqu'elle a été commise pour la première fois au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, ne peut être corrigée dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES - BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ÉVALUATION DE L'ACTIF - THÉORIE DU BILAN - DÉCISION DE GESTION ET ERREUR COMPTABLE - INTANGIBILITÉ DU BILAN D'OUVERTURE DU PREMIER EXERCICE NON PRESCRIT ET DÉROGATION (ART - 38 DU CGI) - APPLICATION AUX PROVISIONS POUR PERTES OU CHARGES [RJ1].

19-04-02-01-03-01-02 Intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit sauf omissions ou erreurs intervenues plus de sept ans avant (art. 38 du code général des impôts (CGI)).... ,,Il résulte des dispositions des articles 39 et 209 du CGI qu'une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition, notamment, que ces pertes ou charges apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice. Dès lors, l'inscription non justifiée en provision d'une somme pendant plusieurs exercices successifs, même si les montants sont identiques, constitue la répétition d'une erreur. Par suite, cette erreur, même lorsqu'elle a été commise pour la première fois au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, ne peut être corrigée dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices.


Références :

[RJ1]

Rappr., pour une méthode erronée de l'évaluation du même poste du bilan, CE, Avis, 17 mai 2006, Société Catimini international et Société Catimini, n° 288511, p. 256.


Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2015, n° 370533
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bastien Lignereux
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP LESOURD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:370533.20150511
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