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26/11/2014 | FRANCE | N°378157

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 26 novembre 2014, 378157


Vu la requête, enregistrée le 22 avril 2014, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la commune de Roissy-en-France (95700), représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-168 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Val-d'Oise ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Charte européenne de l

'autonomie locale ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territo...

Vu la requête, enregistrée le 22 avril 2014, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la commune de Roissy-en-France (95700), représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-168 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Val-d'Oise ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Charte européenne de l'autonomie locale ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article R. 611-8 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles Touboul, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la commune de Roissy-en-France ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 191-1 du code électoral, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " Le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair. / Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants " ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " I. - Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil départemental qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. / II. - La qualité de chef-lieu de canton est maintenue aux communes qui la perdent dans le cadre d'une modification des limites territoriales des cantons, prévue au I, jusqu'au prochain renouvellement général des conseils départementaux. / III. - La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes : / a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ; / b) Le territoire de chaque canton est continu ; / c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants ; / IV. - Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d'autres impératifs d'intérêt général " ;

3. Considérant que le décret attaqué a, en application de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, procédé à une nouvelle délimitation des cantons du département du Val d'Oise, tenant compte de l'exigence de réduction du nombre des cantons de ce département de 39 à 21 résultant de l'article L. 191-1 du code électoral ;

Sur la légalité externe du décret attaqué :

4. Considérant, en premier lieu, que la commune de Roissy-en-France relève que l'avis du conseil général du Val d'Oise délibéré le 18 octobre 2013 ne mentionne pas que le projet de délimitation des cantons transmis par le préfet était accompagné d'un rapport de présentation ; que la commune soutient que l'absence de transmission d'un tel rapport impliquait une méconnaissance des prescriptions de la circulaire du 12 avril 2013 du ministre de l'intérieur relative à la méthodologie du redécoupage cantonal en vue de la mise en oeuvre du scrutin binominal majoritaire aux élections départementales ; que, toutefois, cette circulaire, qui se borne à adresser des recommandations aux préfets et dépourvue de caractère réglementaire, ne peut être utilement invoquée au soutien des conclusions tendant à l'annulation du décret attaqué ; que, par suite, le moyen tiré de sa méconnaissance est, en tout état de cause, inopérant ;

5. Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales se bornent à prévoir la consultation du conseil général du département concerné à l'occasion des créations, suppressions et modifications de cantons ; qu'aucune autre disposition législative ou réglementaire, non plus qu'aucun principe, n'imposent que la modification de la délimitation des cantons fasse l'objet d'une consultation des communes ; que si la commune requérante invoque également à cet égard les stipulations du § 6 de l'article 4 de la Charte européenne de l'autonomie locale, aux termes duquel : " Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement ", le département du Val d'Oise est la seule collectivité locale directement concernée par le décret contesté, qui se borne à délimiter les circonscriptions pour l'élection des membres du conseil général ; qu'ainsi qu'il a été dit, le conseil général du Val d'Oise a été consulté sur le projet de décret ; que, par suite, la commune requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que la procédure suivie aurait méconnu les stipulations précitées ;

Sur la légalité interne du décret attaqué :

6. Considérant qu'il résulte des dispositions des III et IV de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales citées au point 2 que le territoire de chaque canton doit être défini sur des bases essentiellement démographiques, qu'il doit être continu et que toute commune de moins de 3 500 habitants doit être entièrement comprise dans un même canton, des exceptions de portée limitée et spécialement justifiées au cas par cas pouvant toutefois être apportées à ces règles ;

7. Considérant, en premier lieu, que ni les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, ni aucun autre texte non plus qu'aucun principe n'imposent au Premier ministre de prévoir que les limites des cantons, qui sont des circonscriptions électorales, coïncident avec les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale, les prévisions des schémas de coopération intercommunale ou les limites des " bassins de vie " définis par l'Institut national de la statistique et des études économiques ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la délimitation de plusieurs cantons du département ne correspondrait pas à celle des communautés de communes ou d'agglomération ou des bassins de vie, ou ne tiendrait pas suffisamment compte de ces derniers, doit être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que la délimitation ayant été conduite dans le respect des principes édictés par le législateur à l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, le moyen tiré de ce que la délimitation retenue ne reposerait sur aucune considération objective ne peut être utilement soulevé ;

9. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les choix opérés par le décret attaqué dans les rattachements des communes formant la communauté d'agglomération de Roissy-Porte de France, ainsi que dans la délimitation des cantons de Villiers-le-Bel, de Fosses et de Goussainville seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la commune de Roissy-en-France doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la commune de Roissy-en-France est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Roissy-en-France et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au Premier ministre.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 nov. 2014, n° 378157
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Charles Touboul
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 26/11/2014
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 378157
Numéro NOR : CETATEXT000029805409 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2014-11-26;378157 ?
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