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28/11/2013 | FRANCE | N°359981

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 28 novembre 2013, 359981


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 31 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme A...B..., demeurant ... ; Mme B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle la commission d'avancement prévue à l'article 34 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, qui s'est réunie du 7 au 15 décembre 2011, a émis un avis défavorable à l'intégration directe de l'intéressée dans la magistrature ;

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) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 31 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme A...B..., demeurant ... ; Mme B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle la commission d'avancement prévue à l'article 34 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, qui s'est réunie du 7 au 15 décembre 2011, a émis un avis défavorable à l'intégration directe de l'intéressée dans la magistrature ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

Vu le décret n° 72-355 du 4 mai 1972 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Clémence Olsina, Auditeur,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme B...;

1. Considérant que l'article 22 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature prévoit la possibilité pour des personnes remplissant certaines conditions, notamment d'âge et d'exercice professionnel, d'être nommées directement aux fonctions du second grade de la hiérarchie judiciaire ; que l'article 25-2 de la même ordonnance dispose : " Les nominations au titre des articles 22 et 23 interviennent après avis conforme de la commission prévue à l'article 34 " ; qu'aux termes de l'article 25-3 de cette ordonnance dans la rédaction qui lui a été donnée par l'article 9 de la loi organique du 5 mars 2007 : " Les candidats à une intégration au titre des articles 22 et 23 suivent, s'ils sont admis par la commission prévue à l'article 34, une formation probatoire organisée par l'École nationale de la magistrature comportant un stage en juridiction (...) / Le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature établit, sous la forme d'un rapport, le bilan de la formation probatoire de chaque candidat qu'il adresse au jury (...) / Après un entretien avec le candidat, le jury se prononce sur son aptitude à exercer des fonctions judiciaires et transmet son avis à la commission prévue à l'article 34. Toute décision de la commission d'avancement défavorable à l'intégration d'un candidat admis à la formation probatoire (...) est motivée (...) " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., après avoir exercé la profession d'avocat, a été recrutée comme magistrat à titre temporaire et a exercé pendant sept ans les fonctions de juge d'instance ; qu'elle a déposé une demande d'intégration directe aux fonctions du second grade de la hiérarchie judiciaire au titre de l'article 22 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; qu'à la suite d'un premier avis favorable de la commission d'avancement prévue à l'article 34 de cette ordonnance, elle a été admise à effectuer un stage probatoire au tribunal de grande instance de Versailles du 3 novembre 2008 au 28 avril 2009 ; que, lors de ses réunions des 28 et 29 mai et 15, 16, 17 et 18 juin 2009, la commission d'avancement a émis un avis défavorable à l'intégration de Mme B...; que, par une décision du 30 mai 2011, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, à la demande de Mme B..., annulé cette décision pour avoir méconnu l'obligation de motivation prévue par les dispositions citées ci-dessus ; que, lors de sa réunion du 7 au 15 décembre 2011, la commission d'avancement a émis un nouvel avis, défavorable à son intégration ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la candidature de Mme B...à l'intégration directe aux fonctions du second grade de la hiérarchie judiciaire, la commission d'avancement a relevé de façon précise et circonstanciée les éléments de fait et de droit fondant sa décision ; qu'il ne résulte pas de l'article 49-1 du décret du 4 mai 1972 relatif à l'Ecole nationale de la magistrature que l'avis de la commission d'avancement devait, à peine d'irrégularité de sa décision, viser le rapport du directeur du centre de stage ni celui du coordonnateur régional de formation compétent qui sont, en tout état de cause, compris dans le bilan de stage établi par le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature ; que l'obligation de motivation prévue par l'article 25-3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 cité ci-dessus n'implique pas de faire expressément référence à l'ensemble des pièces du dossier de candidature ; que, dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, la commission d'avancement n'était pas tenue de mentionner dans son avis les observations formulées par Mme B...en réponse à certaines de ces pièces ni de relever les conditions dans lesquelles elle a exercé les fonctions de magistrat à titre temporaire ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision ne satisfait pas à l'obligation de motivation prévue par l'article 25-3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 cité ci-dessus ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si la décision attaquée mentionne qu'elle " maintient " le premier avis de la commission d'avancement annulé par la décision précitée du 30 mai 2011 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, il ressort des pièces du dossier qu'il a été procédé à un nouvel examen de la candidature de MmeB..., sans que cette commission ne s'estime liée par son précédent avis ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée par la décision du 30 mai 2011 doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 25-3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 citées ci-dessus que la commission d'avancement statue au vu de l'avis qui lui est transmis par le jury de classement mentionné aux articles 21 et 25-3 de l'ordonnance et compte tenu de l'ensemble des éléments qui lui sont communiqués sur les aptitudes du candidat ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas de la décision attaquée, qui relève d'ailleurs expressément que l'exercice de la fonction de magistrat à titre temporaire ne démontre pas, à lui seul, la capacité d'exercer les fonctions de magistrat, que la commission n'aurait pas tenu compte des conditions dans lesquelles Mme B...a auparavant exercé cette fonction de magistrat à titre temporaire ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur de droit ou d'une dénaturation des pièces du dossier pour s'être abstenue de tenir compte de ses fonctions de juge d'instance à titre temporaire ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, si la requérante a accompli un stage satisfaisant au tribunal d'instance et au parquet, plusieurs avis font état de difficultés rencontrées dans les autres fonctions et émettent des réserves quant à son aptitude à exercer des fonctions judiciaires ; que, sur la base de ces évaluations, la directrice du centre de stage, le magistrat délégué à la formation ainsi que le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature ont émis un avis réservé sur sa candidature ; que le jury de classement mentionné aux articles 21 et 25-3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 a également émis un avis défavorable sur l'aptitude de l'intéressée à exercer des fonctions judiciaires ; qu'ainsi, en émettant, à partir de l'ensemble des éléments qui lui étaient communiqués sur les compétences de l'intéressée, un avis défavorable à son intégration dans la magistrature, la commission d'avancement, que le législateur a entendu investir d'un large pouvoir d'appréciation de l'aptitude des candidats à exercer la fonction de magistrat, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque ; que les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, dès lors, être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 359981
Date de la décision : 28/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2013, n° 359981
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Clémence Olsina
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:359981.20131128
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