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13/11/2013 | FRANCE | N°340267

France | France, Conseil d'État, 10ème / 9ème ssr, 13 novembre 2013, 340267


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 6 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. C... B..., demeurant... ; Mme F...B...et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08VE03932 de la cour administrative d'appel de Versailles du 6 avril 2010 en tant qu'il rejette la requête de M. C...B...tendant à l'annulation du jugement n° 05008071 du 23 octobre 2008 du tribunal administratif de

Cergy-Pontoise rejetant sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer, en sa

qualité de débiteur solidaire de cette société, la somme de 251 170,62 e...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 6 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. C... B..., demeurant... ; Mme F...B...et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08VE03932 de la cour administrative d'appel de Versailles du 6 avril 2010 en tant qu'il rejette la requête de M. C...B...tendant à l'annulation du jugement n° 05008071 du 23 octobre 2008 du tribunal administratif de

Cergy-Pontoise rejetant sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer, en sa qualité de débiteur solidaire de cette société, la somme de 251 170,62 euros découlant de l'avis à tiers détenteur du 20 février 2004 ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à leur appel ;

Mme F...B...et autres soutiennent que la cour administrative d'appel de Versailles :

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Hassan, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Mme B...et autres ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le tribunal de grande instance de Pontoise a, sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts, condamné M. C...B..., par un jugement rendu contradictoirement le 30 juin 1999, devenu définitif et signifié à l'intéressé à l'initiative de l'administration fiscale le 14 décembre 2001, au paiement solidaire des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dus, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1994, par la société GTDT, dont il était le gérant, et des pénalités correspondantes ; que le comptable a notifié à M. B..., qui en a accusé réception le 27 février 2004, un avis à tiers détenteur pour une somme totale de 251 170,62 euros ; que Mme F... B..., Mme D...A...et Mlle E...B..., héritières de M. C... B..., reprenant l'instance engagée par M. C...B..., décédé, se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 6 avril 2010 de la cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'il rejette la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement du 23 octobre 2008 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande de décharge de l'obligation de payer la somme de 251 170,62 euros mentionnée sur l'avis à tiers détenteur ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription. " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 1745 du code général des impôts : " Tous ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation définitive, prononcée en application des articles 1741, 1742 ou 1743 peuvent être solidairement tenus, avec le redevable légal de l'impôt fraudé, au paiement de cet impôt ainsi qu'à celui des pénalités fiscales y afférentes" ; que la décision juridictionnelle déclarant, sur le fondement de ces dispositions, qu'une personne par ailleurs condamnée en application des articles 1741, 1742 ou 1743 du code général des impôts est tenue au paiement solidaire de l'impôt fraudé interrompt la prescription de l'action en recouvrement de cet impôt et fait courir un nouveau délai de prescription quadriennale à l'encontre du débiteur solidaire ;

3. Considérant que la solidarité ainsi prononcée par le juge pénal constitue, alors même qu'elle ne revêt pas le caractère d'une sanction, une mesure de nature pénale relevant, à ce titre, du code de procédure pénale ; qu'en raison de ce caractère, le jugement rendu est, sauf dans les cas où le code de procédure pénale prévoit que le jugement doit être signifié, opposable dès sa lecture ; que, par suite, en jugeant que le délai de prescription de l'action en recouvrement des impositions en litige n'avait commencé à courir qu'à compter du 14 décembre 2001, date de signification du jugement rendu contradictoirement par le tribunal de grande instance de Pontoise, de sorte que la prescription de l'action en recouvrement n'aurait pas encore été acquise à la date de notification de l'avis à tiers détenteur, le 2 février 2004, la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit ; que son arrêt doit, pour ce motif, être annulé en tant qu'il rejette les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 251 170,62 euros mentionnée sur l'avis à tiers détenteur, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 6 avril 2010 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 251 170,62 euros.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme F...B..., Mme D...A..., Mlle E...B...et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 10ème / 9ème ssr
Numéro d'arrêt : 340267
Date de la décision : 13/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-01-005 CONTRIBUTIONS ET TAXES. GÉNÉRALITÉS. RECOUVREMENT. ACTION EN RECOUVREMENT. PRESCRIPTION. - SOLIDARITÉ PRONONCÉE PAR LE JUGE PÉNAL (ART. 1745 DU CGI) - NATURE - MESURE PÉNALE - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - OPPOSABILITÉ DU JUGEMENT DÈS SA LECTURE - EXISTENCE, SAUF DANS LES CAS OÙ LE CPP PRÉVOIT QUE LE JUGEMENT DOIT ÊTRE SIGNIFIÉ - CONSÉQUENCE - POINT DE DÉPART DU NOUVEAU DÉLAI DE PRESCRIPTION DE L'ACTION EN RECOUVREMENT DES IMPOSITIONS CONTRE LE DÉBITEUR SOLIDAIRE - LECTURE DU JUGEMENT RENDU CONTRADICTOIREMENT - EXISTENCE - SIGNIFICATION DE CE JUGEMENT - INTERRUPTION - ABSENCE.

19-01-05-01-005 La solidarité prononcée par le juge pénal sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts (CGI) constitue, alors même qu'elle ne revêt pas le caractère d'une sanction, une mesure de nature pénale relevant, à ce titre, du code de procédure pénale (CPP). En raison de ce caractère, le jugement rendu est, sauf dans les cas où le code de procédure pénale prévoit que le jugement doit être signifié, opposable dès sa lecture. Par suite, le délai de prescription quadriennale de l'action en recouvrement à l'encontre du débiteur solidaire commence à courir dès la lecture du jugement rendu contradictoirement par le juge pénal prononçant la solidarité, et non à compter de la date de signification de ce jugement, laquelle n'interrompt pas ce délai.


Publications
Proposition de citation : CE, 13 nov. 2013, n° 340267
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Claude Hassan
Rapporteur public ?: Mme Delphine Hedary
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:340267.20131113
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