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09/04/2010 | FRANCE | N°328541

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 09 avril 2010, 328541


Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 4, 30 juin et 2 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme Anne A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 30 mars 2009 du conseiller de coopération et d'action culturelle, directeur du centre français de culture et de coopération du Caire (Egypte), mettant fin à son détachement à la date du 31 août 2009 et la remettant à disposition du ministère de l'éducation nationale ;

2°) d'annuler, par voie de conséquence, l'arrêté

du ministre de l'éducation nationale en date du 12 juin 2009 ;

3°) de mettre à l...

Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 4, 30 juin et 2 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme Anne A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 30 mars 2009 du conseiller de coopération et d'action culturelle, directeur du centre français de culture et de coopération du Caire (Egypte), mettant fin à son détachement à la date du 31 août 2009 et la remettant à disposition du ministère de l'éducation nationale ;

2°) d'annuler, par voie de conséquence, l'arrêté du ministre de l'éducation nationale en date du 12 juin 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, professeur des écoles, a été placée par un arrêté du ministre de l'éducation nationale en date du 3 décembre 2007 en service détaché auprès de la Mission laïque française (office scolaire et universitaire international) pour exercer les fonctions de directrice de l'école primaire du lycée français d'Alexandrie (Egypte) ; qu'elle a signé, le 15 septembre 2007 un contrat avec le directeur général de la Mission laïque française, qui stipule notamment que ce contrat peut être dénoncé par l'une ou l'autre partie avec un préavis de six mois, que la Mission laïque française gère sa carrière (détachement, avancement, réintégration) , qu'il peut être mis fin au contrat par cessation anticipée de mission dans l'intérêt du service, pour faute ou non-respect de la charte des personnels et que Mme A est placée sous l'autorité hiérarchique du chef d'établissement représentant la Mission laïque française ; que, par un arrêté en date du 12 juin 2009, le ministre de l'éducation nationale a réintégré Mme A dans son corps d'origine, à compter du 1er septembre 2009 ; que cette décision se présente comme ayant été prise sur demande de la Mission laïque française, dont un responsable central a demandé, par lettre du 20 mai 2009, au ministre de l'éducation nationale, que Mme A soit remise à la disposition de celui-ci à compter du 31 août 2009, au motif que sa mission au lycée français d'Alexandrie se terminait le 31 août 2009 ; que, par un courrier du 30 mars 2009, le conseiller de coopération et d'action culturelle auprès de l'ambassade de France en Egypte, directeur du centre français de culture et de coopération du Caire, a indiqué à Mme A qu'il était mis fin à son détachement ;

Sur les conclusions dirigées contre le courrier du 30 mars 2009 du conseiller de coopération et d'action culturelle :

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre des affaires étrangères et européennes :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le courrier ci-dessus mentionné que le conseiller de coopération et d'action culturelle a adressé à Mme A le 30 mars 2009, qui, d'ailleurs, comporte mention de voies et délais de recours et que son auteur comme la Mission laïque française ont eux-mêmes désignés comme constituant la décision de mettre fin au détachement de l'intéressée, ne s'est pas borné à lui notifier une décision qui aurait été prise par la Mission laïque française, organisme auprès duquel Mme A avait été placée en détachement, mais présente par lui-même un caractère décisoire ; qu'il est dès lors susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par le ministre des affaires étrangères et européennes doit être rejetée ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 45 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat susvisée : Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite... Il est révocable ; qu'aux termes de l'article 14 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions susvisé : Le détachement d'un fonctionnaire ne peut avoir lieu que dans l'un des cas suivants : (...) 6° Détachement pour dispenser un enseignement à l'étranger ; qu'aux termes de l'article 24 du même décret : Il peut être mis fin au détachement avant le terme fixé par l'arrêté le prononçant soit à la demande de l'administration ou de l'organisme d'accueil, soit de l'administration d'origine (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision de mettre fin au détachement de Mme A ne pouvait être prise que par la Mission laïque française, organisme accueillant celle-ci en détachement ou par le ministre de l'éducation nationale, laquelle est l'administration d'origine de la requérante ; qu'en revanche, le conseiller de coopération et d'action culturelle ne tenait d'aucun texte le pouvoir de prendre une telle décision ; que, par suite, la décision du 30 mars 2009 de celui-ci mettant fin au détachement de Mme A a été prise par une autorité incompétente et doit être annulée ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 12 juin 2009 du ministre de l'éducation nationale :

Considérant qu'en raison de la connexité entre, d'une part, les conclusions dirigées contre la décision du 30 mars 2009 remettant Mme A à la disposition de son administration d'origine et, d'autre part, les conclusions additionnelles dirigées contre l'arrêté du ministre de l'éducation nationale en date du 12 juin 2009 la réintégrant dans son corps d'origine, le Conseil d'Etat est compétent pour statuer en premier et dernier ressort sur les conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, si l'arrêté en date du 12 juin 2009 par lequel le ministre de l'éducation nationale réintègre Mme A dans son corps d'origine vise une demande formée en ce sens le 20 mai 2009 par la Mission laïque française, il ressort des pièces du dossier que la demande ainsi formée l'a été par voie de conséquence de la décision du conseiller de coopération et d'action culturelle et il est admis par le ministre de l'éducation nationale lui-même qu'il se borne à tirer la conséquence de la décision du 30 mars 2009 prise par le conseiller de coopération et d'action culturelle en Egypte de la remettre à la disposition de son administration d'origine ; que, dès lors, Mme A est fondée à soutenir que l'arrêté du 12 juin 2009 a été pris sur le fondement d'une demande irrégulièrement formée et à demander pour ce motif son annulation ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision du 30 mars 2009 du conseiller de coopération et d'action culturelle en Egypte et l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 12 juin 2009 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Anne A, au ministre des affaires étrangères et européennes et au ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 328541
Date de la décision : 09/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 avr. 2010, n° 328541
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Dandelot
Rapporteur ?: M. Philippe Barbat
Rapporteur public ?: M. Keller Rémi

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:328541.20100409
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