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11/06/2007 | FRANCE | N°277305

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 11 juin 2007, 277305


Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 7 février 2005, 2 juin 2005 et 29 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roland A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 2 novembre 2004 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 janvier 2002 par laquelle la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme a maintenu la décision de récupération contre la succession d

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Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 7 février 2005, 2 juin 2005 et 29 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roland A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 2 novembre 2004 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 janvier 2002 par laquelle la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme a maintenu la décision de récupération contre la succession de sa mère, Mme Germaine A, des sommes qui ont été avancées par l'aide sociale au titre de la prestation spécifique dépendance ;

2°) statuant au fond, d'annuler la décision de la commission départementale d'aide sociale en date du 24 janvier 2002 et celle de la commission d'admission de Royat du 13 juin 2001 ;

3°) de mettre à la charge du département du Puy-de-Dôme le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 ;

Vu le décret n° 61-495 du 15 mai 1961 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine de Salins, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Hemery, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;



Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 146 du code de la famille et de l'aide sociale, en vigueur à la date du décès de Mme A et désormais codifié à l'article L. 132 ;8 du code de l'action sociale et des familles : « Des recours sont exercés par le département (…) : /a) (…) contre la succession du bénéficiaire » ; qu'aux termes de l'avant ;dernier alinéa du même article : « Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire (…) de la prestation spécifique dépendance (…) s'exerce sur la partie de l'actif net successoral, défini par les règles du droit commun, qui excède un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat » ; que l'article 4 ;1 du décret du 15 mai 1961 modifié a fixé à un montant de 46 000 euros ce dernier seuil et prévu que seule la partie de la prestation spécifique dépendance excédant la somme de 760 euros peut faire l'objet d'une récupération ; que la détermination des sommes pouvant être déduites pour le calcul de l'actif net successoral se fait par application des règles du droit civil ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 815 ;13 du code civil : « Lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au moment du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des impenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés. / Inversement, l'indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il doit être tenu compte des travaux d'amélioration, à l'exception des travaux de simple entretien, d'un bien réalisé par un propriétaire indivis dans la mesure où ils ont contribué à augmenter la valeur de ce bien, ainsi que ceux de conservation de ce bien, sans que puisse lui être utilement opposée la circonstance qu'il serait le seul ou le principal bénéficiaire des travaux ainsi réalisés ; que lorsque, comme en l'espèce, l'indivision a pris fin du fait du décès de l'un des deux co-indivisaires et que l'autre indivisaire est son seul héritier, la prise en compte des travaux que l'indivisaire survivant a effectué peut se faire par une inscription de ceux ;ci au passif de la succession, dans la limite, pour les travaux d'amélioration, du montant de la plus ;value apportée à l'immeuble ;

Considérant que, pour juger que les dispositions de l'article 146 du code de la famille et de l'aide sociale permettaient de récupérer la somme de 8 830,57 euros correspondant au montant, après déduction des 760 euros, de la prestation spécifique dépendance perçue par Mme A entre le 1er janvier 1998 et la date de son décès le 31 décembre 1999 sur sa succession revenue à son fils et unique héritier M. A et confirmer les décisions de la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme en date du 24 janvier 2002 et de la commission d'admission à l'aide sociale de Royat du 13 juin 2001, la commission centrale d'aide sociale a principalement retenu que ces travaux - qu'elle a qualifiés de travaux d'amélioration - avaient amélioré le confort du bien et permis au requérant de le mettre en location et d'en tirer des revenus fonciers ; qu'en se fondant ainsi à la fois sur le caractère de travaux de confort et sur la circonstance que M. A et sa mère avaient dores et déjà bénéficié de ces travaux, sans rechercher s'il s'agissait de travaux d'amélioration ayant augmenté la valeur du bien indivis à due concurrence du montant de ces travaux ou de travaux de conservation, la commission centrale d'aide sociale a entaché son raisonnement d'erreur de droit ; que sa décision doit, en conséquence, être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative, de statuer sur l'appel formé par M. A devant la commission centrale d'aide sociale ;

Considérant que pour évaluer à 40 879,61 euros le montant de l'actif net de la succession de sa mère, M. A soutient que doivent être déduits du montant des biens figurant à l'actif, non seulement les frais funéraires et les dépenses qu'il a acquittés pour le compte de sa mère et qui se chiffrent à la somme de 235 570 F (35 912 euros) mais également des travaux d'un montant de 436 804,37 F (66 590 euros) qu'il a fait réaliser à ses frais sur un bien immobilier dont ils étaient co ;indivisaires ; que le litige porte uniquement sur la déduction de ces travaux ;

Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la circonstance que ces travaux constitueraient des travaux de confort ne peut légalement justifier à elle seule le refus de les déduire pour calculer l'actif net successoral ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'ensemble des factures versées au dossier que ces dépenses sont réelles et qu'elles n'ont pas revêtu un caractère somptuaire ; qu'elles ont, pour l'essentiel et selon le cas, amélioré le bien ou permis sa conservation ; que le département du Puy-de-Dôme, qui les a lui-même qualifiés de travaux d'amélioration, ne conteste pas que les travaux en litige ont augmenté la valeur du bien d'un montant au moins égal à celui dont M. A sollicite la déduction pour le calcul de l'actif net successoral ; que, si ont été à tort incluses parmi ces factures des dépenses d'entretien, le montant de celles ;ci ne dépasse pas la somme de 5 120 euros correspondant à l'écart entre le seuil de l'actif net successoral permettant la récupération soit 46 000 euros et l'actif net déclaré soit 40 879,61 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par sa décision du 24 janvier 2002, la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission d'admission à l'aide sociale de Royat du 13 juin 2001 autorisant le département du Puy-de-Dôme à récupérer la somme de 8 830,57 euros sur la succession de Mme A ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département du Puy ;de ;Dôme, sur le fondement de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative, le versement à M. A de la somme de 2 000 euros qu'il demande au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;



D E C I D E :
--------------
Article 1er : La décision de la commission centrale d'aide sociale en date du 2 novembre 2004, celles de la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme en date du 24 janvier 2002 et de la commission d'admission à l'aide sociale de Royat en date du 13 juin 2001 sont annulées.

Article 2 : Le département du Puy-de-Dôme versera à M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Roland A, au département du Puy ;de ;Dôme et au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 jui. 2007, n° 277305
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: Mme Catherine de Salins
Rapporteur public ?: M. Derepas
Avocat(s) : HEMERY

Origine de la décision
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Date de la décision : 11/06/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 277305
Numéro NOR : CETATEXT000018006442 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-06-11;277305 ?
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