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21/12/2006 | FRANCE | N°279277

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 21 décembre 2006, 279277


Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SA LARIVIERE, dont le siège est 36, bis rue Delaâge BP 446 à Angers (49000) ; la SA LARIVIERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 26 février 2004 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à une réduction de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003 ;

2°) statuant au fond, de lui accorder la réduction de la cotisation en cause

à hauteur de 11 387 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 00...

Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SA LARIVIERE, dont le siège est 36, bis rue Delaâge BP 446 à Angers (49000) ; la SA LARIVIERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 26 février 2004 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à une réduction de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003 ;

2°) statuant au fond, de lui accorder la réduction de la cotisation en cause à hauteur de 11 387 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Courtial, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de la SA LARIVIERE,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Melun que la SA LARIVIERE est propriétaire d'un établissement à Vaux-le-Pénil, composé d'un terrain et de constructions à usage d'entrepôt et de bureaux, où elle exerce une activité de négoce de matériaux de construction ; que, pour l'établissement des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles cette société a été assujettie au titre des années 2001 à 2003, la valeur locative des immeubles a été déterminée par comparaison avec un local-type situé dans la commune selon la méthode prévue pour les locaux commerciaux et biens divers alors que, jusqu'en 2000, la valeur locative des immeubles avait été déterminée selon la méthode prévue pour des immobilisations industrielles ; qu'il est résulté de ce changement de méthode d'appréciation de la base d'imposition une augmentation des cotisations ; que la SA LARIVIERE se pourvoit en cassation contre le jugement du 26 février 2004 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions tendant à la réduction de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties qui lui a été assignée au titre de l'année 2003 à raison de son établissement de Vaux-le-Pénil ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 19 juillet 2006, postérieure à l'introduction du pourvoi, le directeur des services fiscaux a prononcé un dégrèvement partiel de la cotisation contestée d'un montant de 2 870 euros ; qu'à concurrence de ce montant le pourvoi de la SA LARIVIERE est devenu sans objet ;

Sur les autres conclusions du pourvoi :

Considérant que les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont différemment définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession, à l'article 1498 pour tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1498 et à l'article 1499 pour les immobilisations industrielles ; que revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mise en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ;

Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif de Melun, après avoir énoncé que le caractère industriel d'un établissement dépend à la fois de la nature et des activités qui y sont exercées et de l'importance des moyens techniques mis en oeuvre pour la réalisation des opérations qui y sont effectuées, a relevé que la nature de l'activité de stockage et de négoce de matériaux de construction exercée dans l'établissement en cause ne pouvait être qualifiée d'industrielle et que, par suite, la valeur locative de cet établissement devait être déterminée selon les prescriptions de l'article 1498 du code général des impôts et non, comme le soutenait la société requérante, selon celles définies à l'article 1499 du même code ; qu'en statuant ainsi le tribunal a fait une fausse application des dispositions précitées ; que, par suite, la SA LARIVIERE est fondée à demander, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de sa requête, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à une réduction de la cotisation en cause excédant le montant du dégrèvement prononcé en cours d'instance ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Sur le bien-fondé du surplus des conclusions de la demande présentée au tribunal administratif de Melun :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment des tableaux d'amortissement et des photographies produits par la SA LARIVIERE, que, si l'activité d'entreposage et de livraison de matériaux de construction que cette entreprise exerce dans son établissement de Vaux-le-Pénil requiert des installations de stockage des matériaux et l'utilisation de divers équipements mobiles de levage et de manutention, ces moyens techniques ne peuvent être qualifiés d'importants ; qu'au surplus, s'agissant d'une entreprise dont l'activité ne consiste pas dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que la mise en oeuvre des installations, matériels et outillages puisse être regardée comme jouant un rôle prépondérant dans l'exploitation, notamment en raison de leur place dans les processus qu'elle met en oeuvre ; que, dès lors, la SA LARIVIERE n'est pas fondée à soutenir que l'établissement en cause revêt un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, que selon la documentation administrative de base 6 C-251 du 15 décembre 1988, sont considérés comme industriels les établissements où sont réalisés des opérations de manipulation et de prestations de service (marchand en gros utilisant notamment des engins de levage de grande puissance tels que grues, ponts roulants et monte-charge ou des installations de stockage de grande capacité...) et dans lesquels le rôle de l'outillage et de la force motrice est prépondérant alors même qu'ils ne constituent pas des usines ou ateliers où s'effectue, à l'aide d'un outillage relativement important, la transformation des matières premières ainsi que la fabrication ou la réparation des objets ; que ces commentaires ne comportent aucune interprétation formelle de l'article 1499 différente de celle énoncée précédemment ; que, par suite, la SA LARIVIERE ne peut s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, la valeur locative des immeubles commerciaux est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision, lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ; qu'aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III au même code : La valeur locative cadastrale des biens (...) est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance (...) les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la valeur locative de l'établissement litigieux, qui n'était pas construit à la date du 1er janvier 1970, a été déterminée par comparaison avec le local-type n° 19 figurant au procès-verbal n° 6670 C d'évaluation des locaux commerciaux et biens divers de la commune de Vaux-le-Pénil ; que la société requérante n'est fondée à soutenir ni que ce local-type, qui est constitué par un entrepôt commercial, dont la surface pondérée totale de 1 040 m² est voisine de celle de 1 621 m² de l'établissement en cause et qui est situé dans la même zone industrielle, ne peut être légalement retenue comme terme de comparaison, ni que le local-type n° 13 du même procès-verbal, qui est constitué par un entrepôt artisanal de 48 m² de surface pondérée totale, doit être substitué au premier ; que, toutefois, par application des dispositions précitées de l'article 324 AA de l'annexe III, il y a lieu, pour tenir compte de différences mineures entre l'établissement de la SA LARIVIERE et l'immeuble type pris à bon droit comme terme de comparaison, d'une part dans la répartition des immeubles entre constructions et terrain, d'autre part dans la situation moins favorable du premier par rapport à celle de l'immeuble type dans la zone industrielle, d'opérer un ajustement de moins 20 p. cent sur le tarif de 8,08 euros le m² qui a été appliqué et de réduire ainsi ce tarif à 6,46 euros le m² ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA LARIVIERE, dont les biens ont été imposés conformément à la loi, ne peut utilement invoquer la circonstance que d'autres établissements de la SA LARIVIERE situés dans d'autres communes d'autres départements seraient imposés sur la base de tarifs inférieurs à celui appliqué à Vaux-le-Pénil ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que le montant de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties laissée à la charge de la SA LARIVIERE après le prononcé du dégrèvement susmentionné n'excède pas le montant qui résulterait de ce qui précède ; que, dès lors, le surplus des conclusions de la SA LARIVIERE ne peut qu'être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SA LARIVIERE de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi présenté par la SA LARIVIERE à concurrence du dégrèvement prononcé par le directeur des services fiscaux le 19 juillet 2006.

Article 2 : Le jugement du 26 février 2004 du tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la SA LARIVIERE tendant à une réduction de la cotisation de la taxe foncière sur les propriétés bâties établie au titre de l'année 2003 excédant le dégrèvement mentionné à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat paiera à la SA LARIVIERE une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des demandes présentées par la SA LARIVIERE devant le tribunal administratif de Melun est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SA LARIVIERE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 279277
Date de la décision : 21/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 déc. 2006, n° 279277
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: M. Jean Courtial
Rapporteur public ?: M. Olléon
Avocat(s) : SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:279277.20061221
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