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08/12/2006 | FRANCE | N°298538

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 08 décembre 2006, 298538


Vu la requête, enregistrée le 3 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Edith A, demeurant ... ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) de suspendre l'exécution de la décision en date du 27 octobre 2005 par laquelle la commission de recours contre les refus de visas a refusé à Monsieur , ressortissant burkinabé et concubin de la requérante, l'attribution d'un visa de court séjour ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de procéder en urg

ence au réexamen de la situation et de prendre les mesures nécessaires à la dél...

Vu la requête, enregistrée le 3 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Edith A, demeurant ... ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) de suspendre l'exécution de la décision en date du 27 octobre 2005 par laquelle la commission de recours contre les refus de visas a refusé à Monsieur , ressortissant burkinabé et concubin de la requérante, l'attribution d'un visa de court séjour ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de procéder en urgence au réexamen de la situation et de prendre les mesures nécessaires à la délivrance du visa sollicité par Monsieur ;

3°) à défaut, d'ordonner à la commission de recours contre les refus de visas, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de réexaminer la demande de visa de Monsieur dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance du Conseil d'Etat ;

4°) en application de l'article R. 522-13 du code de justice administrative, de décider que l'ordonnance sera exécutoire aussitôt qu'elle aura été rendue ;

Mme A soutient que la décision attaquée viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le principe général du droit à mener une vie familiale normale, reconnu par la jurisprudence constitutionnelle et administrative ; qu'en effet, la commission de recours contre les refus de visas a fondé à tort sa décision de rejet sur la considération que Monsieur ne justifierait pas contribuer effectivement à l'entretien de l'enfant né de sa relation avec la requérante, alors que l'obligation de contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ne peut être opposée que dans le cadre d'une demande de titre de séjour fondée sur l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non pas dans le cadre d'une demande de visa de court séjour ; qu'en confirmant la décision refusant la délivrance d'un visa de court séjour au père de l'enfant de la requérante, au motif que celui-ci ne justifiait pas de ressources personnelles garantissant le financement d'un séjour de longue durée en France, et qu'il n'apportait pas la preuve qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant, la décision attaquée a porté une atteinte excessive au droit de Monsieur de mener une vie familiale normale ; que, subsidiairement, la décision litigieuse viole l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, dès lors qu'il ressort d'examens effectués par deux médecins que l'enfant subit un grave préjudice psychologique susceptible de porter atteinte à son développement, rendant la présence de son père indispensable ; qu'enfin, à titre infiniment subsidiaire, la décision attaquée méconnaît la liberté d'aller et de venir dont Monsieur peut se prévaloir ; que, sur l'urgence, il est établi par des professionnels de santé que l'absence de Monsieur est préjudiciable au développement de sa fille ; que dès lors, l'allongement excessif du délai pendant lequel Monsieur en est éloigné crée en lui-même une situation d'urgence qui justifie la suspension de la décision attaquée ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la copie de la requête aux fins d'annulation présentée par Madame A à l'encontre de cette décision ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2006, présenté par le ministre des affaires étrangères, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il n'existe aucun doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée ; qu'en se fondant sur le motif de l'absence de contribution de Monsieur à l'entretien et à l'éducation de son enfant, la commission de recours contre les refus de visas n'a pas commis d'erreur de droit, dès lors que les autorités diplomatiques et consulaires, qui disposent d'un large pouvoir discrétionnaire pour statuer sur les demandes de visas, n'en sont pas moins tenues par les prévisions des articles L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 371-2 du Code civil pour apprécier une demande de visa d'un parent d'enfant mineur français résidant en France ; qu'à cet égard, il résulte de multiples éléments de fait que Monsieur , qui n'a du reste aucune ressource dans son pays d'origine, a bien l'intention de s'établir durablement en France ; qu'en outre, la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet, l'obligation de contribution effective à l'entretien et à l'éducation des enfants n'implique pas que les parents résident en France et ne peut être écartée du seul fait de l'absence de ressources d'un des parents ; qu'en l'espèce, Monsieur n'établit pas participer à l'éducation de l'enfant et contribuer, à proportion de ses ressources, à son entretien ; qu'enfin, la décision litigieuse ne viole ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, ni la liberté d'aller et venir, dans la mesure où Monsieur n'établit ni la réalité et la permanence de ses relations avec sa fille, ni, en dépit de la production de deux certificats médicaux aux conclusions vagues et générales, l'existence d'un grave préjudice psychologique dont sa fille souffrirait ; que, pour finir, la condition d'urgence n'est pas remplie ; qu'à l'occasion du même litige, le juge du référé-liberté a déjà considéré par une ordonnance du 23 décembre 2005 que la condition d'urgence n'était pas satisfaite ; que, de plus, les certificats médicaux produits par la requérante ne sont pas susceptibles de constituer une situation d'urgence ; qu'enfin, il est loisible à Madame A de se rendre avec son enfant au Burkina-Faso pour reconstituer la cellule familiale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme Edith A et d'autre part, le ministre des affaires étrangères ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 7 décembre 2006 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Barthélémy, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A ;

- Mme A ;

- les représentants du ministre des affaires étrangères

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

Considérant qu'aucun des moyens présentés par Mme A à l'appui de sa requête et tenant à la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et du droit à mener une vie familiale normale, à l'erreur de droit commise par la commission de recours contre les refus de visa en se fondant sur la circonstance que M. ne justifierait pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant et à l'atteinte à la liberté d'aller et de venir de M., ne sont ,en l'état de l'instruction, propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, par suite, la requête de Mme A doit être rejetée ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme Edith A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Edith A et au ministère des affaires étrangères.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 08 déc. 2006, n° 298538
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen

Origine de la décision
Formation : Juge des referes
Date de la décision : 08/12/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 298538
Numéro NOR : CETATEXT000008267762 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-12-08;298538 ?
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