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23/10/2006 | FRANCE | N°282605

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 23 octobre 2006, 282605


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme X... A représentée par M. Mohamed B régulièrement mandaté par cette dernière, demeurant C ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 juin 2005 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du Consul général de France à Fès refusant de lui délivrer un visa court séjour ;

2°) d'enjoindre au consul généra

l de France à Fès de lui délivrer un visa de court séjour dans un délai de quinze jours...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme X... A représentée par M. Mohamed B régulièrement mandaté par cette dernière, demeurant C ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 juin 2005 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du Consul général de France à Fès refusant de lui délivrer un visa court séjour ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Fès de lui délivrer un visa de court séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que pour confirmer la décision du consul général de France à Fès refusant à Mme A le visa de court séjour qu'elle sollicitait en qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'insuffisance des ressources de l'intéressée pour pourvoir aux dépenses occasionnées pour le séjour de trois mois envisagé et sur la circonstance que son fils, M. B, ne justifiait pas de revenus suffisants pour assurer l'accueil et l'entretien d'une personne supplémentaire à son foyer ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des affaires étrangères :

Considérant que la requête présentée devant le Conseil d'Etat par Mme A, régulièrement représentée par M. B, son fils, contre la décision de la commission a pour effet de confirmer que M. B était titulaire d'un mandat au moins verbal devant cette commission ; qu'il en résulte que le ministre des affaires étrangères n'est pas fondé à soutenir que la requête de Mme A serait tardive et donc irrecevable faute pour M. B d'avoir justifié d'un mandat écrit devant la commission ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, l'étranger souhaitant faire en France un séjour n'excédant pas trois mois doit … c)…disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée de séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance (…) ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ; que, nonobstant le fait Mme A n'exerce plus aucune activité professionnelle et qu'elle a encore à sa charge deux enfants, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, elle justifie bénéficier d'une pension alimentaire versée par son fils, M. Y... B, d'un montant annuel pour 2003 de 3109 euros et dispose d'un solde de compte bancaire créditeur, au jour où la commission s'est prononcée, de 174 461,11 dirhams soit environ 16 000 euros ; que, d'autre part, M. B, chez qui Mme A doit être hébergée et prise en charge, était en 2004 titulaire d'un emploi salarié lui procurant un revenu annuel de 14 310 euros ; que, depuis le 1er janvier 2005, il a repris le fonds artisanal au sein duquel il était salarié depuis 1993 et présentait un solde créditeur au moment de la décision attaquée de 24 146,98 euros ; qu'en outre, c'est à tort que la commission puis le ministre des affaires étrangères soutiennent que M. B a des charges liées à son mariage, alors qu'un jugement du tribunal de grande instance d'Evry en date du 16 décembre 2003 atteste du divorce de ce dernier et de l'absence de charge liée à ce divorce ; qu'ainsi, en confirmant le refus opposé à Mme A, à raison de l'insuffisance de ses ressources et de celles de son fils pour assurer son accueil et son entretien pendant la durée de son séjour, la commission a inexactement apprécié la situation de la requérante au regard des stipulations de l'article 5 de la convention de Schengen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. » ; qu'eu égard aux motifs de la présente décision, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de Mme A aurait été modifiée, en droit ou en fait depuis l'intervention de la décision attaquée, l'exécution de celle-ci implique nécessairement la délivrance d'un visa ; que, par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de prescrire à l'autorité compétente la délivrance à l'intéressée, dans un délai d'un mois, d'un visa d'entrée en France ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en date du 2 juin 2005 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au consul général de France à Fès de délivrer à Mme A un visa d'entrée et de court séjour en France dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme X... A et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 282605
Date de la décision : 23/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 oct. 2006, n° 282605
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur public ?: M. Aguila

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:282605.20061023
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