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03/05/2006 | FRANCE | N°256135

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 03 mai 2006, 256135


Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 septembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mamadou A ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention europ

enne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n...

Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 24 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 septembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mamadou A ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45 ;2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Meyer-Lereculeur, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, alors en vigueur, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté litigieux : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention ‘‘vie privée et familiale'' est délivrée de plein droit : (…) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (…) » ;

Considérant que, si M. Mamadou A, de nationalité malienne, soutient résider habituellement en France depuis dix années accomplies, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des documents produits par l'intéressé, dont certains sont dépourvus de valeur probante, que la durée et la continuité du séjour dont M. A se prévaut soient établies ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler son arrêté du 13 septembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 11 octobre 2001 par lequel le PREFET DE POLICE a refusé à M. A le titre de séjour qu'il sollicitait, a été régulièrement notifié à l'intéressé le 15 octobre suivant ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris alors que le délai d'un mois prévu par le 3°) du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 n'aurait pas été écoulé ;

Considérant que, si l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945, modifiée, impose au préfet de consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de délivrer ou de renouveler une carte de séjour à un étranger relevant de l'une ou l'autre des catégories mentionnées aux articles 12 bis à 15 de cette ordonnance, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A, qui ne peut, ainsi qu'il a été dit précédemment, se prévaloir d'un droit au séjour au titre du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, appartienne à l'une de ces catégories ; qu'il en résulte que le moyen tiré de l'irrégularité de la décision de refus de séjour du PREFET DE POLICE faute d'avoir été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour, doit être écarté ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A, célibataire, sans enfant, soit dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans ; que, par suite, l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre n'a pas porté, eu égard aux buts en vue desquels il a été pris, une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 septembre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 24 février 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Mamadou A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 03 mai. 2006, n° 256135
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Catherine Meyer-Lereculeur
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave

Origine de la décision
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 03/05/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 256135
Numéro NOR : CETATEXT000008224832 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-05-03;256135 ?
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