Vu la requête, enregistrée le 8 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Rodrigue A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 octobre 2004 par lequel le préfet de la Somme a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Emmanuelle Cortot, Auditeur,
- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité centrafricaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 12 août 2004, de la décision du 10 août 2004 par laquelle le préfet de la Somme lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que M. A, entré en France le 10 octobre 2001 afin d'y poursuivre ses études, est le père d'un enfant né en France, qu'il a reconnu et dont il assume l'éducation et l'entretien ; que la mère de cet enfant, Mlle B, a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, annulé par un jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 15 octobre 2004 qui a fait l'objet de la part du préfet de la somme d'un appel rejeté par une décision de ce jour ; que compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. A a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; qu'il a, par suite, été édicté en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 21 octobre 2004 du tribunal administratif d'Amiens est annulé, ensemble l'arrêté du 5 octobre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Rodrigue A, au préfet de la Somme et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.