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07/03/2006 | FRANCE | N°289990

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 07 mars 2006, 289990


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Michel A, demeurant ... (51000) ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du Premier président de la Cour des comptes rejetant sa demande de mutation au poste de président de section déclaré vacant en 2006 à la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes ;

2°) d'enjoindre au Premier président de la Cour des comptes de r

éexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la présente décision ;...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Michel A, demeurant ... (51000) ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du Premier président de la Cour des comptes rejetant sa demande de mutation au poste de président de section déclaré vacant en 2006 à la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes ;

2°) d'enjoindre au Premier président de la Cour des comptes de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la présente décision ;

il soutient que la décision contestée le prive de toute chance de se rapprocher de Lyon, ville où réside son épouse et ses deux parents très âgés, notamment sa mère gravement handicapée par la maladie, dont il est le seul soutien ; qu'en poste à la chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne, il ne peut leur apporter l'assistance dont ils ont constamment besoin ; qu'il justifie ainsi de l'urgence à suspendre l'exécution de la décision rejetant sa demande de mutation à la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes ; qu'il ressort du relevé des avis rendus par le conseil supérieur des chambres régionales et territoriales des comptes dans sa séance du 21 septembre 2005 que le motif du refus qui lui a été opposé est tiré de ce qu'il ne satisfait pas à la règle des trois ans minimum d'ancienneté dans la fonction avant de pouvoir bénéficier d'une mutation ; qu'il a été fait une application automatique de ce critère ; que la décision attaquée repose ainsi sur une erreur de droit ; que l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 qui oblige à tenir compte, outre des nécessités du service, de la situation familiale et confère une priorité aux fonctionnaires éloignés de leur conjoint, a été méconnu ; qu'ont été également méconnus l'article 205 du code civil obligeant les enfants à soutenir leurs parents dans le besoin et l'article 223-3 du code pénal qui sanctionne le délaissement des personnes qui doivent être protégés du fait de leur âge ou de leur état de santé ; que la décision attaquée porte atteinte excessive à son droit au respect de sa vie familiale consacré par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu, enregistré le 26 janvier 2006, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande le rejet de la requête ; il soutient qu'aucune des conditions prévues par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est remplie ; que l'éloignement de son épouse et de ses deux parents âgés dont M. A se prévaut ne résulte pas de la décision contestée mais de son affectation le 1er janvier 2004 en Champagne-Ardenne, qu'il avait alors demandée ; qu'à cette date, l'état de santé de sa mère était déjà préoccupant même si l'aggravation de sa maladie ne pouvait être datée avec précision ; que la situation familiale de M. A n'a pas un caractère de gravité justifiant la mesure de suspension sollicitée ; qu'aucun des moyens invoqués n'est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité du refus de mutation ; que l'administration ne s'est pas fondée seulement sur sa doctrine selon laquelle il est généralement contraire à l'intérêt du service de procéder à une mutation avant trois ans de fonction dans le poste ; qu'elle a procédé à un examen particulier des circonstances d'ordre familial invoquées par M. A au regard de l'intérêt du service ; qu'elle a déjà écarté, dans des circonstances particulières, la règle de gestion liée à la durée des fonctions ; qu'elle n'a pas fait une appréciation manifestement erronée de la situation familiale du requérant au regard de l'intérêt du service ;

Vu, enregistré le 28 février 2006, le mémoire en réplique présenté par M. A, tendant aux mêmes fins que la requête par le mêmes moyens ; il soutient en outre que l'aggravation soudaine de l'état de santé de sa mère était imprévisible ; que le compte-rendu de la séance du conseil supérieur des chambres régionales et territoriales des comptes du 21 décembre 2005 fait clairement ressortir que la règle des trois ans lui a été mécaniquement appliquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code pénal ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. Michel A et, d'autre part, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 6 mars 2006 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus M. A et le représentant du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés peut ordonner la suspension d'une décision administrative à la condition, notamment, que l'urgence le justifie ; que cette condition doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des indications fournies, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et des éléments recueillis au cours de l'audience, que M. A, alors premier conseiller de chambre régionale des comptes ayant été inscrit au tableau d'avancement au grade de président de section, a été nommé le 1er janvier 2004 sur sa demande président de section à un poste alors vacant à la chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne qui a son siège à Châlons-en-Champagne ; qu'il s'est trouvé de ce fait éloigné de la ville de Lyon où travaille et réside son épouse et où vivent ses deux parents très âgés, notamment sa mère atteinte d'une maladie grave, dont, étant fils unique, il est le seul soutien ; qu'il demande la suspension de l'exécution de la décision rejetant sa demande de mutation à la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes où un poste de président de section a été déclaré vacant en 2006 en invoquant, pour justifier de l'urgence, les grandes difficultés dans lesquelles il se trouve, du fait de son affectation à Châlons-en-Champagne, pour apporter à ses parents l'assistance à laquelle il est moralement et juridiquement tenu, l'aggravation de l'état de santé de sa mère au mois de mai 2005 et son placement dans un établissement spécialisé ; que, toutefois, la situation familiale difficile de M. A ne procède pas directement du rejet de sa demande de mutation ; que cette décision a seulement pour effet, en le privant d'une chance de rapprochement, de prolonger pour une durée indéfinie l'éloignement auquel il avait préalablement consenti ; que compte tenu de cette circonstance, de la distance et des moyens de transport existant entre le lieu d'affectation du requérant et le centre de ses intérêts familiaux ainsi que des indications qu'il donne sur les modalités effectives d'assistance et d'hébergement qu'il a pu obtenir pour ses parents depuis le mois de mai 2005, les effets de l'acte contesté ne sont pas de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, une mesure de suspension soit prononcée ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Michel A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Michel A et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 mar. 2006, n° 289990
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Durand-Viel
Rapporteur ?: M. Marc Durand-Viel

Origine de la décision
Formation : Juge des referes
Date de la décision : 07/03/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 289990
Numéro NOR : CETATEXT000008241202 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-03-07;289990 ?
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