La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/2005 | FRANCE | N°275893

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 09 décembre 2005, 275893


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le 27 décembre 2004 présentée par le PREFET DES HAUTES-ALPES ; le PREFET DES HAUTES-ALPES demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 3 décembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé son arrêté du 28 novembre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libe

rtés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant d...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le 27 décembre 2004 présentée par le PREFET DES HAUTES-ALPES ; le PREFET DES HAUTES-ALPES demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 3 décembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé son arrêté du 28 novembre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 2004-789 du 29 juillet 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur la compétence du Conseil d'Etat :

Considérant que l'article 10 du 29 juillet 2004 relatif au contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière et modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative a transféré l'appel des jugements de reconduite à la frontière aux cours administratives d'appel ; qu'aux termes de l'article 11 du même décret : Les dispositions des articles 9 et 10 s'appliquent aux appels enregistrés à compter du 1er janvier 2005 ; que l'appel relatif au présent litige a été enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 décembre 2004 ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été porté devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité géorgienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 4 juin 2004, de la décision du 27 mai 2004 par laquelle l'autorité administrative compétente lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'à supposer établie la présence en France de sa fille mineure à la date de l'arrêté attaqué, il ne ressort des pièces du dossier ni que M. A partage une communauté de vie avec son enfant ni qu'il subvienne à ses besoins ; qu'en outre, rien ne ferait obstacle à ce que M. A rejoigne son pays d'origine en emmenant son enfant avec lui ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a jugé que l'arrêté litigieux du PREFET DES HAUTES-ALPES porte une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie familiale et méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. A devant le tribunal administratif de Marseille ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Un étranger ne peut être éloigné à destination du pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) ; que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ; que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait des personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que si M. A soutient qu'il pourrait être victime de violences de la part de la famille de son épouse en cas de retour en Géorgie, il n'apporte en tout état de cause pas d'éléments de nature à établir la réalité des risques allégués ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été pris en violation de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTES-ALPES est fondé à demander l'annulation du jugement du 3 décembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé son arrêté du 28 novembre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 3 décembre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal de Marseille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A, devant le tribunal administratif de Marseille, est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTES-ALPES, à M. X... A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 275893
Date de la décision : 09/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 déc. 2005, n° 275893
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stasse
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:275893.20051209
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award