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07/12/2005 | FRANCE | N°274618

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 07 décembre 2005, 274618


Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Harouna A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 3 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2004 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoind

re au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte ;

4°) de mettre ...

Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Harouna A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 3 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2004 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité mauritanienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 2 août 2004, de la décision du 26 juillet 2004 lui refusant un titre de séjour ; que, par suite, M. A se trouvait dans le cas prévu à l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que plusieurs ordonnances et certificats médicaux datés de 2004 établissent qu'il est régulièrement suivi en consultation pour un asthme sévère nécessitant un traitement de fond dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par suite, la décision de refus de titre de séjour du 2 août 2004 du préfet de police méconnaît les dispositions du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. est fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ne pouvait légalement servir de fondement à l'arrêté attaqué ; que, par suite, le requérant est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 3 novembre 2004 rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du 22 septembre 2004 ordonnant sa reconduite à la frontière ainsi que l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions aux fins de régularisation de la situation administrative de l'intéressée :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour, mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative - lesquels peuvent être exercés tant par le juge unique de la reconduite à la frontière que par une formation collégiale - pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 3 novembre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 22 septembre 2004 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M. sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de se prononcer sur la situation administrative de M. dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à M. la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Harouna A, au préfet de police et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 274618
Date de la décision : 07/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2005, n° 274618
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Musitelli
Rapporteur public ?: M. Devys

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:274618.20051207
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