Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES DEUX-SEVRES, est 4, rue Duguesclin à Niort Cedex (79021) ; le PREFET DES DEUX-SEVRES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 mai 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 13 mai 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Serge Y et fixant le Gabon comme pays de destination ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Touraine, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : I. - Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours validité (...) ; 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;
Considérant que ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de subordonner la légalité d'un arrêté de reconduite pris sur le fondement du 1° précité du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 à l'examen préalable de la demande de titre de séjour que l'étranger a pu présenter alors qu'il se trouvait en situation irrégulière au regard des dispositions relatives aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ; que, dans ces conditions, la circonstance que M. Y, ressortissant gabonais dont il n'est pas contesté qu'il est entré en France dépourvu de visa, se soit présenté le 14 mars 2003 à la mairie de Saint-Varent (Deux-Sèvres) pour y formuler une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 3° de l'article 12 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 n'obligeait pas le préfet à surseoir à l'édiction d'un arrêté de reconduite à la frontière jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande ; que, par suite, le PREFET DES DEUX-SEVRES est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 13 mai 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. Y au motif, seul soutenu devant lui, qu'il appartenait à l'autorité administrative de statuer préalablement sur la demande de titre de séjour dont elle avait été saisie par celui-ci ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y devant le tribunal administratif de Poitiers ;
Considérant que, si M. Y soutient qu'il vivait en France depuis plus de 10 ans à la date de la décision litigieuse, il n'apporte aucun élément à l'appui de cette affirmation ; qu'il ressort au contraire des pièces du dossier que M. Y a effectué plusieurs séjours dans son pays d'origine depuis 1983, date présumée de son entrée en France ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que M. Y n'aurait commis aucun délit et ne constituerait pas une menace pour l'ordre public, est inopérant à l'encontre de la décision contestée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. Y devant le tribunal administratif de Poitiers doivent être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers en date du 16 mai 2003 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES DEUX-SEVRES, à M. Serge Y et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.