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05/04/2004 | FRANCE | N°254111

France | France, Conseil d'État, 5eme sous-section jugeant seule, 05 avril 2004, 254111


Vu la requête, enregistrée le 11 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Lazhar X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1) d'annuler le jugement du 11 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 8 janvier 2003 du préfet de la Drôme décidant sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision du même jour fixant le pays de destination ;

2) d'annuler pour excès de pouvoir cet

arrêté et cette décision ;

3) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 82...

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Lazhar X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1) d'annuler le jugement du 11 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 8 janvier 2003 du préfet de la Drôme décidant sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision du même jour fixant le pays de destination ;

2) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;

3) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 820 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Fabre-Aubrespy, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français au delà du délai d'un mois à compter de la notification de la décision du 2 septembre 2002 par laquelle le préfet de la Drôme a, d'une part, rejeté la demande d'admission au séjour présentée par l'intéressé et lui a, d'autre part, notifié la décision du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, en date du 7 juin 2002, rejetant sa demande d'asile territorial ; qu'ainsi, M. X se trouvait dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sur les moyens tirés, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales rejetant la demande d'asile territorial de M. X et de l'illégalité de la décision de refus de séjour du préfet de la Drôme :

Considérant que les moyens tirés de ce que M. X n'aurait pas été convoqué à la préfecture pour l'audition prévue à l'article 1er du décret du 23 juin 1998 pris pour l'application de l'article 13 de la loi du 25 juillet 2002 relative au droit d'asile et à l'asile territorial et qu'il n'aurait pas été informé de la possibilité d'être assisté d'un interprète et d'une personne de son choix sont dépourvus de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant que, si M. X soutient qu'il a été menacé en Algérie par des groupes islamistes en raison de son engagement dans la vie politique et associative et parce qu'il était chanteur de raï, l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la commission des recours des réfugiés, n'apporte pas d'éléments suffisamment probants au soutien de ses allégations ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus d'asile territorial est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que la décision de refus de séjour du préfet de la Drôme, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ;

Considérant que M. X, entré en France le 30 mars 2000, ne justifiait, à la date de la décision de refus de séjour litigieuse, d'aucune vie familiale en France ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision du préfet de la Drôme refusant de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, M. X étant entré en France en 2000 et étant célibataire et sans enfant, cette décision ait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour du préfet aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté l'exception d'illégalité dirigée contre la décision de refus d'asile territorial et la décision de refus de séjour ;

Sur l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que l'arrêté attaqué, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

Considérant que, si M. X fait valoir que, postérieurement à la date à laquelle le préfet lui a refusé un titre de séjour mais avant celle de l'arrêté de reconduite, il vivait en concubinage avec une Française et qu'il a tissé de nombreux liens en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Drôme aurait porté, en décidant sa reconduite à la frontière, une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale ;

Considérant que, si M. X a déposé un dossier à la mairie de Valence en vue d'un mariage avec une Française, prévu à la date du 18 janvier 2003, et s'il a été convoqué le 7 janvier 2003 par les services de police à la suite du dépôt de son dossier du mariage à la mairie, il ressort des pièces du dossier qu'en prenant le 8 janvier 2003 l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière, alors que l'intéressé avait fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour en date du 2 septembre 2002 et se trouvait ainsi en situation irrégulière sur le territoire français, le préfet de la Drôme a voulu mettre fin à cette situation irrégulière et non empêcher l'intéressé de se marier ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Drôme aurait commis un détournement de pouvoir en prenant l'arrêté attaqué dans le but de faire obstacle à son mariage ;

Considérant que la circonstance que M. X serait bien intégré en France et qu'il aurait des perspectives professionnelles dans le domaine artistique, n'est pas de nature à faire regarder l'arrêté décidant la reconduite à la frontière du requérant comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de la gravité de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que le moyen tiré de ce que la décision attaquée n'est pas motivée manque en fait ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. X n'apporte pas de justifications suffisamment probantes au soutien de ses allégations selon lesquelles il encourrait des risques pour sa vie ou serait menacé, en cas de retour dans son pays d'origine, de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet de la Drôme en date du 8 janvier 2003 décidant sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Lazhar X, au préfet de la Drôme et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 5eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 254111
Date de la décision : 05/04/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 avr. 2004, n° 254111
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delon
Rapporteur ?: M. Hervé Fabre-Aubrespy
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:254111.20040405
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