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13/10/2003 | FRANCE | N°253804

France | France, Conseil d'État, 1ere et 2eme sous-sections reunies, 13 octobre 2003, 253804


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février et 18 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 décembre 2002 par laquelle le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à être autorisé à se constituer partie civile au nom de la commune de Tarascon (Bouches-du-Rhône) à l'occasion des poursuites engagées contre M. , maire de Tarascon, pour prise illégale d'intérêts ;

2°) de l'autorise

r à se constituer partie civile auprès de la juridiction pénale au nom de la commu...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février et 18 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 décembre 2002 par laquelle le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à être autorisé à se constituer partie civile au nom de la commune de Tarascon (Bouches-du-Rhône) à l'occasion des poursuites engagées contre M. , maire de Tarascon, pour prise illégale d'intérêts ;

2°) de l'autoriser à se constituer partie civile auprès de la juridiction pénale au nom de la commune de Tarascon et à l'encontre de M. , à l'occasion des poursuites engagées à son encontre pour prise illégale d'intérêts ;

3°) de condamner ladite commune au versement de la somme de 2 300 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme de Salins, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Delvolvé, avocat de M. X et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la commune de Tarascon,

- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales : Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif les actions qu'il croit devoir appartenir à la commune et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou a négligé d'exercer ; qu'en vertu de l'article L. 2132-6, Le contribuable adresse au tribunal administratif un mémoire détaillé ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable n'est recevable à saisir le tribunal administratif d'une demande d'autorisation en vue d'exercer une action en justice au nom de la commune que si celle-ci a préalablement été saisie d'une demande tendant à ce qu'elle exerce elle-même l'action considérée et a refusé ou négligé de l'exercer ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 85 du code de procédure pénale : Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d'instruction compétent ;

Considérant que, par une décision en date du 26 décembre 2002, le tribunal administratif de Marseille a refusé d'accorder à M. X l'autorisation d'exercer une action en justice pour le compte de la commune de Tarascon en vue de se constituer partie civile dans le cadre des poursuites engagées contre M. pour prise illégale d'intérêts pour avoir, en tant qu'adjoint en charge de l'urbanisme, participé à la préparation et au vote d'une révision du plan d'occupation des sols de la commune qui concernait notamment des terrains dont il est propriétaire ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une délibération en date du 5 septembre 2002, soit antérieurement à la décision du tribunal administratif de Marseille, le conseil municipal de Tarascon a autorisé la commune à se constituer partie civile dans l'affaire opposant le ministère public à M. à raison des mêmes faits que ceux dénoncés par M. X ; que, toutefois, selon les termes mêmes de cette délibération, il est expressément demandé à l'avocat mandaté par la commune d'intervenir afin qu'il soit donné acte que la commune déclare n'avoir subi dans cette affaire aucun préjudice ; qu'il résulte des énonciations mêmes de cette délibération, par laquelle le conseil municipal mandate son avocat pour soutenir que la condition à laquelle l'article 85 du code de procédure pénale subordonne la constitution de partie civile n'est pas remplie, que la commune de Tarascon ne peut être regardée comme ayant exercé l'action demandée par M. X en vue de faire reconnaître et réparer le préjudice financier subi par la commune, à raison des faits susmentionnés ; que, dès lors, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, la délibération du 5 septembre 2002 n'a pas rapporté le refus tacite précédemment opposé à M. X ;

Considérant qu'il est soutenu que l'action de M. aurait eu pour effet de rendre constructibles des terrains lui appartenant et de favoriser la prise en charge par la commune de travaux de viabilisation de ces mêmes terrains ; que, dans les circonstances de l'affaire, l'action envisagée par M. X en vue de se constituer partie civile au nom de la commune, contre M. , pour prise illégale d'intérêts, sur le fondement des dispositions de l'article 432-12 du code pénal n'est pas dépourvue de chance de succès et présente un intérêt suffisant pour la commune ; que, par suite, la décision du tribunal administratif de Marseille en date du 26 décembre 2002 doit être annulée ;

Considérant, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Tarascon, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 300 euros que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n'est pas la partie perdante, la somme que la commune de Tarascon demande au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du tribunal administratif de Marseille en date du 26 décembre 2002 est annulée.

Article 2 : M. X est autorisé à se constituer partie civile, au nom de la commune de Tarascon, à l'encontre de M. pour prise illégale d'intérêts.

Article 3 : La commune de Tarascon versera à M. X la somme de 2 300 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Tarascon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Claude X, à la commune de Tarascon et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 1ere et 2eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 253804
Date de la décision : 13/10/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-02-05-01 COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - COMMUNE - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - EXERCICE PAR UN CONTRIBUABLE DES ACTIONS APPARTENANT À LA COMMUNE - RECEVABILITÉ DE LA SAISINE DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF - REFUS OU NÉGLIGENCE DE LA COMMUNE À EXERCER L'ACTION CONSIDÉRÉE - EXISTENCE - COMMUNE INTERVENANT AFIN DE DÉCLARER N'AVOIR SUBI AUCUN PRÉJUDICE.

135-02-05-01 Conseil municipal ayant autorisé la commune à se constituer partie civile dans l'affaire en cause à raison des mêmes faits que ceux dénoncés par les intéressés. Toutefois, selon les termes mêmes de cette délibération, il est expressément demandé à l'avocat mandaté par la commune d'intervenir afin qu'il soit donné acte que la commune déclare n'avoir subi dans cette affaire aucun préjudice. Il résulte des énonciations mêmes de cette délibération, par laquelle le conseil municipal mandate son avocat pour soutenir que la condition à laquelle l'article 85 du code de procédure pénale subordonne la constitution de partie civile n'est pas remplie, que la commune ne peut être regardée comme ayant exercé l'action demandée par les intéressés.


Références :



Publications
Proposition de citation : CE, 13 oct. 2003, n° 253804
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: Mme Catherine de Salins
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : DELVOLVE ; SCP VIER, BARTHELEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:253804.20031013
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