Vu la requête, enregistrée le 6 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SAVOIE ; le PREFET DE LA SAVOIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 3 juillet 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Djamal X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Ménéménis, Conseiller d'Etat ;
- les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de M. X... ,
- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... , de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 9 novembre 2000, de l'arrêté du 3 novembre 2000 par lequel le PREFET DE LA SAVOIE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. X... , qui était marié à une ressortissante marocaine séjournant régulièrement en France depuis 1992 avec laquelle il avait eu un premier enfant né et scolarisé en France, n'était pas en mesure d'emmener sa famille à l'étranger, du fait des conditions difficiles dans lesquelles se déroulait la grossesse de son épouse, enceinte d'un second enfant ; qu'ainsi et alors même qu'une procédure de regroupement familial, dont la durée ne pouvait d'ailleurs être précisée à M. X... , était susceptible d'être engagée, il y a lieu de considérer, dans les circonstances de l'espèce, que l'arrêté du 3 juillet 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et méconnaît, par suite, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SAVOIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 3 juillet 2001 ;
Article 1er : La requête du PREFET DE LA SAVOIE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SAVOIE, à M. Djamal X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.