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08/04/1998 | FRANCE | N°129527

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 08 avril 1998, 129527


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 septembre 1991 et 16 janvier 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Robert X..., demeurant 5 k, avenue du Général de Gaulle à Caluire (69300) et Mme Colette X..., née Y..., demeurant 14, parc du Béarn à Saint-Cloud (92210) ; ils demandent que le Conseil d'Etat annule la décision du 9 juillet 1991, par laquelle la cour administrative d'appel de Nancy, faisant partiellement droit à leur demande, a :
1°) annulé le jugement du 14 novembre 1989 par lequel le tribunal adm

inistratif de Châlons-sur-Marne a rejeté leur requête tendant, d'un...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 septembre 1991 et 16 janvier 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Robert X..., demeurant 5 k, avenue du Général de Gaulle à Caluire (69300) et Mme Colette X..., née Y..., demeurant 14, parc du Béarn à Saint-Cloud (92210) ; ils demandent que le Conseil d'Etat annule la décision du 9 juillet 1991, par laquelle la cour administrative d'appel de Nancy, faisant partiellement droit à leur demande, a :
1°) annulé le jugement du 14 novembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté leur requête tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Charleville-Mézières leur a refusé le versement d'une indemnité d'un montant de 8 628 444 F en réparation du préjudice qu'ils auraient subi à la suite d'une procédure d'expropriation concernant des terrains leur appartenant et, d'autre part, à la condamnation de la ville de Charleville-Mézières à verser aux requérants la somme de 8 628 444 F augmentés des intérêts de droit capitalisés ;
2°) rejeté le surplus des conclusions desdits requérants tendant à la condamnation de la ville de Charleville-Mézières à leur verser la somme de 8 628 444 F augmentés des intérêts de droit capitalisés à compter du 19 juin 1987 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. Z... HUBERT et de Mme Colette Y..., de Me Baraduc-Benabent, avocat de la commune de Charleville-Mézières et de Me Ricard, avocat de la Société Interbail,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société Interbail qui a produit un mémoire en réponse à la communication du pourvoi de M. X... et de Mme Y... n'a pas la qualité d'intervenant à l'instance ; qu'ainsi les requérants ne sauraient soutenir que son "intervention" serait irrecevable ;
Considérant qu'il ressort du dossier soumis aux juges du fond que M. X... et Mme Y... ont saisi le juge administratif d'une demande tendant non pas à la mise en oeuvre de la procédure de rétrocession de leurs biens expropriés prévue par l'article L. 12-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique mais à la condamnation de la ville de CharlevilleMézières à réparer les conséquences dommageables qui seraient résultées pour eux des conditions prétendument fautives dans lesquelles la ville a réalisé l'équipement commercial de la zone d'activités dont la création avait donné lieu à une déclaration d'utilité publique prononcée par l'Etat ; que contrairement à ce que soutiennent la ville de Charleville-Mézières et la société Interbail, c'est à bon droit que la cour administrative d'appel de Nancy a jugé qu'un tel litige relevait de la compétence de la juridiction administrative et annulé pour ce motif le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne ;
Considérant en revanche qu'il ressort du dossier soumis aux juges du fond que M. X... et Mme Y... ont fondé leur action en responsabilité dirigée contre la ville de Charleville-Mézières non pas sur l'illégalité fautive de l'arrêté préfectoral déclarant d'utilité publique l'acquisition de leurs terrains mais sur des fautes distinctes qui auraient été commises par la ville dans l'aménagement de cette zone d'activités commerciales ; qu'ainsi en rejetant leurs conclusions comme mal dirigées au motif que l'illégalité de l'arrêté préfectoral n'était susceptible d'engager que la seule responsabilité de l'Etat, la cour a partiellement dénaturé les conclusions de la requête ; que l'arrêt attaqué doit être annulé sur ce point ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrativestatuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'à supposer même que la ville de Charleville-Mézières ait, comme le soutiennent les requérants, donné à leurs terrains expropriés une destination différente de celle qui justifie la procédure d'expropriation, en particulier ce qui concerne la place réservée à une grande surface commerciale dans une zone destinée à l'artisanat, cette circonstance ne serait pas de nature à faire naître un droit à indemnité distinct de celui qu'ils ont pu faire valoir au cours de la procédure d'expropriation au profit des anciens propriétaires des biens expropriés conformément à la législation en vigueur ; que par suite les conclusions indemnitaires présentées par M. X... et Mme Y... devant le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne doivent être rejetées ;
Sur l'application de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X... et Mme Y... à verser à la ville de Charleville-Mézières et à la société Interbail les sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 9 juillet 1991 est annulé en tant qu'il rejette la demande présentée par M. X... et Mme Y... devant le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne et le surplus des conclusions de leurs requête.
Article 2 : Le surplus des conclusions présentés par M. X... et Mme Y... devant le Conseil d'Etat et les conclusions incidentes de la ville de Charleville-Mézières et de la société Interbail sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Robert X..., à Mme Colette Y..., à la ville de Charleville-Mézières, à la société Interbail et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 129527
Date de la décision : 08/04/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

68-02-02 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PROCEDURES D'INTERVENTION FONCIERE - OPERATIONS D'AMENAGEMENT URBAIN.


Références :

Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique L12-6
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11


Publications
Proposition de citation : CE, 08 avr. 1998, n° 129527
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Errera
Rapporteur public ?: M. Abraham

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:129527.19980408
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