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13/03/1998 | FRANCE | N°167764

France | France, Conseil d'État, 7 /10 ssr, 13 mars 1998, 167764


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés par le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS, régulièrement représenté par le président du Conseil général, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 9 mars et 28 juin 1995 ; le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande du préfet du Pas-de-Calais, l'avenant signé le 29 septembre 1993 entre le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS et le groupement Cochery-Bourdin-Chaussée et Be

ugnet" pour des travaux d'aménagement de la R.D. 160 à Oignies ;
2°) d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés par le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS, régulièrement représenté par le président du Conseil général, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 9 mars et 28 juin 1995 ; le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande du préfet du Pas-de-Calais, l'avenant signé le 29 septembre 1993 entre le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS et le groupement Cochery-Bourdin-Chaussée et Beugnet" pour des travaux d'aménagement de la R.D. 160 à Oignies ;
2°) de rejeter la demande présentée par le préfet du Pas-de-Calais devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Lagumina, Auditeur,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la société CocheryBourdin-Chaussée,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de la société "Cochery-Bourdin-Chaussée" et de la S.A "Beugnet" :
Considérant que la société "Cochery-Bourdin-Chaussée" et la SA "Beugnet" ont été parties en première instance ; qu'elles avaient qualité pour faire appel du jugement attaqué ; que, dès lors, leur prétendue intervention devant le Conseil d'Etat ne peut être regardée que comme un appel ; que ledit appel contre le jugement qui leur a été notifié le 13 janvier 1995 n'a été enregistré au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat que le 4 octobre 1995, soit après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois courant à compter de la notification dudit jugement ; qu'il est tardif et, par suite, irrecevable ;
Sur la requête du DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS :
Considérant, en premier lieu, que l'article 272 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable à la présente espèce, dispose que : "Les prestations qui font l'objet des marchés doivent être déterminées dans leur consistance et leurs spécifications avant tout appel à la concurrence ou négociation" ; qu'aux termes de l'article 255 bis du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable à la présente espèce : "lorsque le montant des prestations exécutées atteint le montant fixé par le marché, la poursuite de l'exécution des prestations est subordonnée : soit à la conclusion d'un avenant ; soit, si le marché le prévoit, à une décision de poursuivre prise par la collectivité ou l'établissement contractant" ;
Considérant que le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS a passé le 6 janvier 1993 avec le groupement d'entreprises "Cochery-Bourdin-Chaussée" et "Beugnet" un marché pour la réfection de la ... pour un montant de 486 841,14 F ; que, le même jour, la commune d'Oignies a conclu avec le même groupement un marché relatif aux bordures de la route, aux trottoirs et à des ouvrages annexes pour un montant de 4 487 895,97 F ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de désordres intervenus sur le chantier imputables à des travaux de déplacement de réseaux réalisés par des concessionnaires du domaine public, un avenant au marché initial a été conclu le 29 septembre 1993 entre le Département et le groupement pour un montant de 377 516,81 F ; que l'incidence de cet avenant ne peut s'apprécier au regard de l'ensemble formé par les marchés du Département et de la commune qui constituent deux marchés distincts par leur objet et par les maîtres d'ouvrage qui en sont titulaires ;

Considérant que cet avenant, qui prévoit la réalisation de prestations qui n'étaient pas prévues dans le marché initial et qui résultent des dommages provoqués par lesconcessionnaires du domaine public, tiers par rapport au marché, doivent s'analyser comme un nouveau marché ; que, par suite, le Département ne pouvait légalement recourir à la procédure prévue à l'article 255 bis susmentionné du code des marchés publics, nonobstant la circonstance alléguée par le Département, que les travaux complémentaires auraient un caractère imprévisibile ; que, par suite, la passation d'un tel avenant sans respecter les règles de mise en concurrence préalable est intervenue en méconnaissance des dispositions des articles 255 bis et 272 du code des marchés publics ;
Considérant, en second lieu, que le Département soutient que l'avenant attaqué doit être requalifié de marché public négocié en application des articles 104-10, 312bis 2°, 3124° du code des marchés publics ;
Considérant qu'en vertu de l'article 308 du code des marchés publics, l'autorité compétente est tenue de mettre en compétition, avant la passation des marchés négociés de l'article 312-4° et 104-10, par une consultation écrite au moins sommaire, les candidats susceptibles d'exécuter un tel marché ; qu'il n'est pas contesté que la signature de l'avenant attaqué n'a été précédée d'aucune mise en concurrence ;
Considérant qu'aux termes de l'article 312bis-2 applicable en l'espèce, peuvent être passés sans mise en concurrence préalable les marchés négociés : "Lorsque les besoins ne peuvent être satisfaits que par une prestation qui, à cause de nécessités techniques, d'investissements préalables importants, d'installations spéciales ou de savoir faire ne peut être confiée qu'à un entrepreneur ou un fournisseur déterminé" ; que la circonstance invoquée que les travaux devaient être étroitement coordonnés avec ceux initialement prévus ne suffit pas à établir que les travaux en cause ne pouvaient être confiés qu'au seul groupement titulaire du marché initial ;
Considérant par suite que les conditions prévues aux articles 104-10, 312bis 2° et 312-4° du code des marchés publics n'étaient pas réunies ; que, dès lors, le DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS ne pouvait légalement recourir à la procédure de marché négocié ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le DEPARTEMENT DU PASDE-CALAIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'avenant conclu le 29 septembre 1993 entre le Département et le groupement "Cochery-Bourdin-Chaussée" et "Beugnet" ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS et les conclusions des sociétés "Cochery-Bourdin-Chaussée" et "Beugnet" sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DU PAS-DE-CALAIS, aux sociétés "Cochery-Bourdin-Chaussée" et "Beugnet", au Préfet du Pas-de-Calais et au ministre de l'intérieur.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contrôle de légalité

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - DIVERSES SORTES DE CONTRATS - MARCHES - Marché conclu en vue de la réfection d'une route départementale - Avenant ayant pour objet de permettre la réalisation de prestations non prévues - résultant des dommages provoqués par les concessionnaires du domaine public - Nouveau marché - Existence.

39-01-03-02, 39-02-005 Marché ayant pour objet la réfection d'une route départementale. Au regard des dispositions de l'article 255 bis du code des marchés publics, dans sa rédaction antérieure au décret du 15 décembre 1992, l'avenant qui prévoit la réalisation de prestations qui n'étaient pas prévues dans le marché initial et qui résultent des dommages provoqués par des travaux de déplacement de réseaux réalisés par les concessionnaires du domaine public, tiers par rapport au marché, doit s'analyser comme un nouveau marché. La passation de l'avenant sans respecter les règles de mise en concurrence préalable est intervenue en méconnaissance des dispositions des articles 255 bis et 272 du code des marchés publics.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - FORMALITES DE PUBLICITE ET DE MISE EN CONCURRENCE - Marché conclu en vue de la réfection d'une route départementale - Avenant ayant pour objet de permettre la réalisation de prestations non prévues - résultant des dommages provoqués par les concessionnaires du domaine public - a) Nouveau marché - Existence - b) Nécessité d'une mise en concurrence - Existence.


Références :

Code des marchés publics 272, 255 bis, 104-10, 308, 312


Publications
Proposition de citation: CE, 13 mar. 1998, n° 167764
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: Mlle Lagumina
Rapporteur public ?: M. Savoie

Origine de la décision
Formation : 7 /10 ssr
Date de la décision : 13/03/1998
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 167764
Numéro NOR : CETATEXT000007991303 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1998-03-13;167764 ?
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