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10/10/1997 | FRANCE | N°153385;165025;160958

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 10 octobre 1997, 153385, 165025 et 160958


Vu 1°/, sous le n° 153385, la requête, enregistrée le 12 novembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Marcel A..., demeurant ... ; M. A... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 16 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de l'association communale de chasse agréée de Taninges, annulé les arrêtés des 21 août 1992 et 5 mai 1993 par lesquels le préfet de la HauteSavoie a, d'une part, attribué sur la montagne d'Uble un plan de chasse aux mouflons pour la campagne 1993-1994, d'au

tre part, attribué à la chasse privée d'Uble un plan de chasse aux ...

Vu 1°/, sous le n° 153385, la requête, enregistrée le 12 novembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Marcel A..., demeurant ... ; M. A... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 16 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de l'association communale de chasse agréée de Taninges, annulé les arrêtés des 21 août 1992 et 5 mai 1993 par lesquels le préfet de la HauteSavoie a, d'une part, attribué sur la montagne d'Uble un plan de chasse aux mouflons pour la campagne 1993-1994, d'autre part, attribué à la chasse privée d'Uble un plan de chasse aux mouflons pour cette campagne ;
2°) ordonne le sursis à l'exécution dudit jugement ;
3°) rejette la demande présentée par l'association communale de chasse agréée de Taninges devant le tribunal administratif de Grenoble ;
4°) condamne l'association communale de chasse agréée de Taninges à lui verser la somme de 28 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu 2°/, sous le n° 165025, la requête, enregistrée le 25 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Marcel A..., demeurant ... ; M. A... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 8 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de l'association communale de chasse agréée de Taninges, annulé l'arrêté du 10 juin 1994 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a attribué sur la montagne d'Uble un plan de chasse individuel pour la saison 1994-1995 ;
2°) prononce le rétablissement dudit arrêté ; ordonne le sursis à l'exécution dudit jugement ;
3°) condamne l'association communale de chasse agréée de Taninges à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu 3°/, sous le n° 160958, la requête, enregistrée le 16 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Alfred Edmond Z..., demeurant ... ; M. Z... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 23 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête en tierce-opposition contre le jugement en date du 16 octobre 1993 par lequel ledit tribunal a, à la demande de l'association communale de chasse agréée de Taninges, annulé les arrêtés des 21 août 1992 et 5 mai 1993 par lesquels le préfet de la Haute-Savoie a, d'une part, attribué sur la montagne d'Uble un plan de chasse aux mouflons pour la campagne 1993-1994, d'autre part, attribué à la chasse privée d'Uble un plan de chasse aux mouflons pour cette campagne ;
2°) annule ledit jugement en date du 16 octobre 1993 ;
3°) prononce le rétablissement des arrêtés du préfet de la Haute-Savoie en date des 21 août 1992 et 5 mai 1993 ;
4°) condamne l'association communale de chasse agréée de Taninges à lui verser la somme de 20 000 F ;

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et notamment son article 75-I ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Guyomar, Auditeur,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. A..., enregistrées sous les n° 153385 et 165025, et la requête de M. Z..., enregistrée sous le n° 160958,présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;
Sur les requêtes n° 153385 et 165025 de M. A... :
Considérant que, par arrêté du 15 février 1989, M. Michel X..., préfet de la Haute-Savoie, a régulièrement donné délégation à M. Yves Y..., ingénieur du génie rural, des eaux et des forêts, chargé du service des forêts et de l'environnement à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, pour signer en son nom les décisions relatives à la tutelle des associations communales de chasse agréées "telle que prévue à l'article 53 du décret du 6 octobre 1966, sauf en ce qui concerne le dernier alinéa dudit article" ; que la délégation de signature ainsi définie porte sur l'ensemble des pouvoirs exercés par le préfet à l'égard des associations communales de chasse agréées, à l'exception des sanctions prévues, en cas de méconnaissance des statuts ou des règlements de chasse, par le dernier alinéa de l'article 53 du décret du 6 octobre 1966, dont les prescriptions ont été codifiées à l'article R. 222-3 du code rural ; que M. Y... était, par suite, compétent pour, le 29 janvier 1991, admettre le retrait par M. Z... de ses parcelles incluses dans le périmètre de l'association communale de chasse agréée de Taninges ; que, dès lors, si la légalité de l'arrêté du 29 janvier 1991 pouvait être contestée à l'appui des recours dirigés contre les arrêtés en date des 21 août 1992, 5 mai 1993 et 10 juin 1994, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté soit devenu définitif, c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur l'incompétence du signataire de la décision du 29 janvier 1991 pour annuler, par ses jugements des 16 octobre 1993 et 8 novembre 1994, les arrêtés du préfet de la Haute-Savoie en date des 21 août 1992, 5 mai 1993 et 10 juin 1994 attribuant un plan de chasse individuel à la chasse privée d'Uble ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association communale de chasse agréée de Taninges devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Considérant que l'article L. 222-13 du code rural, qui figure parmi les dispositions de ce code relatives aux associations communales de chasse agréées, dispose que : "Pour être recevable l'opposition des propriétaires ou détenteurs de droits de chasse mentionnés à l'article L. 222-9 doit porter sur des terrains d'un seul tenant et d'une superficie minimum de vingt hectares ( ...) le minimum est porté à cent hectares pour les terrains situés en montagne audessus de la limite de la végétation forestière. Des arrêtés pris, par département, dans les conditions prévues à l'article L. 222-6 peuvent augmenter les superficies minimales ainsi définies les augmentations ne peuvent excéder le double des minima fixés" ; que l'article L. 222-17 du même code dispose que : "Le propriétaire ou le détenteur de droits de chasse d'un terrain d'une étendue supérieure aux superficies minimales mentionnées à l'article L. 222-13 qui désirerait se retirer de l'association ne pourra le faire qu'à l'expiration de chaque période de six ans, avec un préavis de deux ans. ( ...)" ;
Considérant que M. Z... est propriétaire d'un terrain situé sur la Montagne d'Uble, en Haute-Savoie, et dont il a cédé le droit de chasse à M. A... ; que ce terrain, d'une superficie totale de 242,1 hectares environ, est situé au-dessus et au-dessous de la limite de la végétation forestière ; qu'il ressort de l'arrêté en date du 7 mars 1967 du ministre de l'agriculture fixant la liste des départements où des associations communales de chasse agréées doivent être créées dans toutes les communes, que la superfice minimale ouvrant droit à opposition est de 300 hectares en Haute-Savoie au-dessus de la limite de la végétation forestière, et de 60 hectares au-dessous ; que, toutefois, lorsque le territoire de chasse faisantl'objet de la demande d'opposition ou de retrait s'étend sur les deux zones correspondant à cette limite, la superficie minimale applicable à la propriété dans son ensemble s'obtient en pondérant la superficie minimale applicable dans chaque zone d'un coefficient égal à la fraction de la propriété comprise dans cette zone et en additionnant les deux quantités ainsi obtenues ; qu'en l'espèce, le territoire de chasse appartenant à M. Z... comprend 62,5 hectares situés audessous de la limite de la végétation forestière et 179,6 hectares au-dessus ; que la superficie minimale ouvrant droit à opposition est donc de
60 x (62,5) + 300 x (179,6) soit 238 hectares ;
242,1 242,1
que, par suite, le territoire de chasse appartenant à M. Z..., ayant une superficie de 242,1 hectares supérieure à la superficie minimale ainsi calculée, il a pu légalement être soustrait à l'action de l'association communale de chasse agréée de Taninges et faire l'objet des plans de chasse litigieux attribués, alors même que les terrains en cause seraient situés dans une réserve de chasse, à la chasse privée d'Uble pour les campagnes de chasse 1992-1993, 1993-1994 et 1994-1995 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ses jugements des 16 octobre 1993 et 8 novembre 1994, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les arrêtés du préfet de la Haute-Savoie en date des 21 août 1992, 5 mai 1993 et 10 juin 1994 ;

Sur la requête n° 160958 de M. Alfred Edmond Z... :
Considérant que M. Z... fait appel du jugement du 23 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la tierce-opposition qu'il avait formée contre le jugement du 16 octobre 1993 du même tribunal ; que, toutefois, ledit jugement étant annulé par la présente décision, la requête de M. Z... est devenue sans objet ; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, d'y statuer ;
Sur les conclusions de MM. A... et Z... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à M. A... la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui dans les instances n° 153385 et 165025 et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. Z... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui dans l'instance n° 160958 et non couverts par les dépens ;
Article 1er : Les jugements en date des 16 octobre 1993 et 8 novembre 1994 du tribunal administratif de Grenoble sont annulés.
Article 2 : Les demandes de l'association communale de chasse agréée de Taninges devant le tribunal administratif de Grenoble sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 160958 de M. Z....
Article 4 : L'Etat versera au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 une somme de 15 000 F à M. A....
Article 5 : Les conclusions de M. Z... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Marcel A..., à M. Alfred Edmond Z..., à l'association communale de chasse agréée de Taninges et au ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PECHE - CHASSE - ASSOCIATIONS COMMUNALES ET INTERCOMMUNALES DE CHASSE AGREEES - Opposition des propriétaires ou détenteurs de droits de chasse - Terrain situé de part et d'autre de la limite de la végétation forestière - Calcul de la surface minimale permettant l'opposition ou le retrait.

03-08-01, 54-07-02-03 Département dans lequel la surface minimale permettant de faire opposition à l'intégration d'un terrain dans une association communale de chasse a été portée, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L.222-13 du code rural, à 300 ha pour les terrains situés en montagne au dessus de la limite de la végétation forestière et à 60 ha pour les terrains situés en dessous de cette limite. S'agissant d'un terrain situé de part et d'autre de cette limite, la superficie minimale au regard de laquelle doit s'apprécier la recevabilité de l'opposition ou de la demande de retrait s'obtient en pondérant la superficie minimale applicable dans chaque zone d'un coefficient égal à la fraction de la propriété comprise dans cette zone et en additionnant les deux quantités ainsi obtenues. En l'espèce, la surface de la propriété dans son ensemble étant supérieure à la superficie minimale ainsi calculée, la demande de retrait était recevable.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTROLE DU JUGE DE L'EXCES DE POUVOIR - APPRECIATIONS SOUMISES A UN CONTROLE NORMAL - Association communale de chasse - Calcul de la surface minimale permettant l'opposition ou le retrait.


Références :

Code rural R222-3, L222-13, L222-17
Décret du 06 octobre 1966 art. 53
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 10 oct. 1997, n° 153385;165025;160958
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Guyomar
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Formation : 6 / 2 ssr
Date de la décision : 10/10/1997
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 153385;165025;160958
Numéro NOR : CETATEXT000007950815 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1997-10-10;153385 ?
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