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30/07/1997 | FRANCE | N°133577

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 30 juillet 1997, 133577


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février 1992 et 3 mars 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X... demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 14 novembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a réformé le jugement du tribunal administratif d'Amiens fixant le montant de l'indemnité à lui verser par Gaz de France en raison de la destruction d'une maison lui appartenant par suite d'une explosion de gaz ;
2°) de renvoyer l'affaire devant la co

ur administrative d'appel de Nancy ;
Vu les autres pièces du dossie...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février 1992 et 3 mars 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X... demeurant ... ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 14 novembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a réformé le jugement du tribunal administratif d'Amiens fixant le montant de l'indemnité à lui verser par Gaz de France en raison de la destruction d'une maison lui appartenant par suite d'une explosion de gaz ;
2°) de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fougier, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Boullez, avocat de Mme X... et de la SCP Coutard, Mayer, avocat de Gaz de France ;
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en retenant la date du dommage pour apprécier le montant de la valeur vénale de l'immeuble de Mme MENDES dès lors qu'il n'était pas prouvé ni même allégué par la requérante qu'elle aurait été dans l'incapacité de financer le rachat d'un autre immeuble d'une valeur analogue à celui qu'elle possédait ; que, par ailleurs, en indiquant qu'il convenait de prendre en compte le prix moyen du mètre carré de la zone de Saint-Quentin pour une maison similaire et dans un quartier similaire, les juges ont suffisamment motivé leur décision ;
Considérant que l'indemnité accordée à Mme X... au titre des troubles de jouissance correspond à la demande qu'elle a présentée ; que le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de l'arrêt de la Cour sur ce point doit être écarté ;
Considérant que Mme X... a, devant le tribunal administratif d'Amiens, demandé que le point de départ des intérêts soit la date du jugement ; que la Cour, qui n'était saisie en appel d'aucun moyen sur ce point, n'a commis aucune erreur de droit en ne modifiant pas le point de départ des intérêts fixé par les premiers juges au jour du jugement ;
Considérant cependant que, pour assurer une réparation intégrale du préjudice, l'indemnité qui doit être versée à la victime privée du logement dont elle est propriétaire et qui doit, pour se loger, louer un logement doit couvrir non seulement les loyers mais aussi les charges locatives que la victime n'aurait pas eu à exposer si elle avait pu continuer d'occuper l'immeuble dont elle était propriétaire ; qu'en indiquant que l'indemnité de relogement, qui couvrait implicitement tous les frais exposés jusqu'à la date de l'arrêt, devait être limitée aux loyers sans inclure les charges, la Cour n'a pas respecté le principe de la réparation intégrale du préjudice et a entaché sa décision d'une erreur de droit ; qu'il y a lieu d'annuler l'arrêt attaqué sur ce point ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de l'indemnité à accorder à Mme X... pour compenser les dépenses et notamment les charges locatives excédant celles qu'elle aurait dû supporter si elle avait pu continuer d'occuper l'immeuble lui appartenant, pour la période ayant précédé son relogement définitif, en fixant cette indemnité à une somme de 35 000 F ;
Sur les conclusions du recours incident de Gaz de France :

Considérant que si l'indemnité due au titre de la destruction de l'immeuble de Mme MENDES doit être limitée à la valeur vénale de celui-ci, cette limitation n'exclut pas l'indemnisation des autres chefs de préjudice liés à la perte de cet immeuble ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en indemnisant Mme X... des sommes qu'elle a exposées pour se reloger, la Cour aurait commis une erreur de droit, doit être écarté ;
Article 1er : L'article 1er de l'arrêt en date du 14 novembre 1991 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 : Le montant de l'indemnité que Gaz de France est condamné à verser à Mme X... est fixé à 250 000 F.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 4 : Le recours incident de Gaz de France est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à Gaz de France et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 133577
Date de la décision : 30/07/1997
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTROLE DU JUGE DE CASSATION - REGULARITE INTERNE - ERREUR DE DROIT - Evaluation du préjudice subi en cas de destruction d'un immeuble - Méconnaissance du principe de la réparation intégrale (1).

54-08-02-02-01-01, 60-04-03-02-01-04 Pour assurer une réparation intégrale du préjudice, l'indemnité qui doit être versée à la victime privée du logement dont elle est propriétaire et qui doit, pour se loger, louer un logement, doit comprendre, outre la valeur vénale de l'immeuble, non seulement les loyers mais aussi les charges locatives que la victime n'aurait pas eu à exposer si elle avait pu continuer d'occuper l'immeuble dont elle était propriétaire. En indiquant que l'indemnité de relogement, qui couvrait implicitement tous les frais exposés jusqu'à la date de l'arrêt, devait être limitée aux loyers sans inclure les charges, la Cour administrative d'appel n'a pas respecté le principe de la réparation intégrale du préjudice (1) et a entaché sa décision d'une erreur de droit. Annulation.

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - PERTE DE REVENUS - PERTE DE VALEUR VENALE D'UN IMMEUBLE - Destruction d'un immeuble - Evaluation du préjudice - Ensemble des frais exposés par la victime pour se reloger - y compris les charges locatives (1).


Références :

Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11

1.

Rappr. 1972-07-10, Dlle Castelli, p. 550 ;

1973-05-25, E.D.F. et S.C.I. Au Confortable, p. 372 ;

1983-03-18, S.C.R.E.G. et autre, T. p. 865


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 1997, n° 133577
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Fougier
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:133577.19970730
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