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26/03/1997 | FRANCE | N°172795

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 26 mars 1997, 172795


Vu la requête enregistrée le 14 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 juin 1995 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 1995 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Leila X...
Y..., ressortissante de nationalité marocaine ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle Bousseta Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les

autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droi...

Vu la requête enregistrée le 14 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 juin 1995 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 1995 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Leila X...
Y..., ressortissante de nationalité marocaine ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle Bousseta Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Balmary, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le PREFET DE POLICE peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3°) Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Leila X...
Y... s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 février 1995, de la décision du PREFET DE POLICE du même jour, lui refusant le renouvellement de la carte de séjour temporaire qu'elle détenait en qualité d'étudiante et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3°) de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté de reconduite attaqué, Mlle Bousseta Y... était majeure, célibataire et sans enfant, qu'elle ne vivait pas avec sa mère et son beau-père, qui n'assuraient pas la prise en charge financière de ses études, et qu'elle n'avait pas, en revanche, interrompu toutes relations avec son père, demeuré au Maroc, qui contribuait pour partie au financement de ses études ; que dans ces conditions et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite, le PREFET DE POLICE n' a pas porté au droit de Mlle Bousseta Y... à une vie familiale normale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise cette mesure ; que la mesure de reconduite attaquée n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la violation par l'arrêté de reconduite attaqué de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée pour annuler ledit arrêté ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle Bousseta Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'au soutien de la demande d'annulation de l'arrêté de reconduite dont elle a fait l'objet, Mlle Bousseta Y... excipe de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement du titre de séjour qu'elle détenait en qualité d'étudiante ;

Considérant en premier lieu que, si Mlle Bousseta Y... affirme que le but principal de son séjour en France n'était pas la poursuite de ses études, elle n'établit pas avoir demandé de titre de séjour à un autre titre que celui d'étudiante ; que le PREFET DE POLICE a donc pu, sans commettre d'erreur de droit, examiner la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par l'intéressée le 30 octobre 1994 au regard des seules règles régissant le séjour des étudiants étrangers en France ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Bousseta Y... n'a obtenu aucun diplôme au cours de sa scolarité ; que depuis 1991 elle a changé chaque année de discipline, et qu'à la date de la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour, elle avait cessé de suivre les cours de la classe de seconde technologique à laquelle elle s'était inscrite à la rentrée de 1994 ; qu'au surplus, Mlle Bousseta Y... ne justifiait pas de ressources suffisantes lui permettant de séjourner en France ; que, dès lors, le PREFET DE POLICE a pu légalement lui refuser le renouvellement de sa carte de séjour temporaire en qualité d'étudiante pour ces motifs ; qu'ainsi, Mlle Bousseta Y... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiante en date du 15 février 1995 ;
Considérant enfin que si Mlle Bousseta Y... soutient qu'elle est arrivée en France à l'âge de 13 ans, et qu'une grande partie de sa famille y réside, qu'elle a suivi sa scolarité de manière assidue, ces circonstances ne sont pas de nature à démontrer que le PREFET DE POLICE aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 1995 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Bousseta Y... ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 30 juin 1995 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle Leila X...
Y... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mlle Leila X...
Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 172795
Date de la décision : 26/03/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 26 mar. 1997, n° 172795
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Balmary
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:172795.19970326
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