Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er septembre 1993 et 3 janvier 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Zoran Y..., demeurant chez M. X...
... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat annule la décision en date du 1er juillet 1993 par laquelle la Commission des recours des réfugiés a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mars 1993 par laquelle le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au statut de réfugié ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocle signé à New-York le 31 janvier 1967 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 25 juillet 1952 ;
Vu le décret du 2 mai 1953 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Ollier, Auditeur,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de M. Zoran Y...,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, dans sa demande devant la Commission des recours des réfugiés, M. Y..., qui s'était présenté devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides comme un ressortissant "yougoslave", soutenait que, d'origine serbe, il était né et avait toujours résidé en Croatie, et que, refusant de se battre contre ses parents ou ses amis, il craignait d'être enrôlé dans la garde croate ou dans l'armée fédérale de la nouvelle République Fédérative de Yougoslavie ; qu'en se bornant à relever, pour rejeter sa demande, qu'il ne ressortait pas "des pièces du dossier et des déclarations faites en séance publique que le requérant ait fait l'objet d'un ordre de mobilisation dans l'armée ou d'une persécution personnelle de la part des autorités yougoslaves" et que les craintes qu'il invoquait à cet égard étaient "trop vagues et imprécises pour le regarder comme entrant dans le champ d'application de la convention de Genève", la Commission des recours des réfugiés n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le requérant craignait d'être enrôlé dans la garde croate ; qu'en l'état du dossier soumis aux juges du fond, et eu égard notamment aux incertitudes qui pesaient, à la date de la décision attaquée, sur les modalités d'attribution de la nationalité des Etats issus de l'éclatement de la République Socialiste Fédérative de Yougoslavie, ce moyen n'était pas inopérant ; que M. Y... est dès lors fondé à demander l'annulation de la décision, en date du 1er juillet 1995, par laquelle la Commission des recours des réfugiés a rejeté sa demande ;
Article 1er : La décision de la Commission des recours des réfugiés en date du 1er juillet 1995 est annulée.
Article 2 : M. Y... est renvoyé devant la Commission des recours des réfugiés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Zoran Y... et au ministre des affaires étrangères (Office français de protection des réfugiés et apatrides).